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En réponse à :

L’agonie

, par Michel

Bonjour, Patricia.

Ce que vous avez à comprendre est ce qu’il y a de plus difficile : il n’y a rien à comprendre.

On voudrait, surtout en période de deuil, qu’il y ait des explications, et le plus souvent des erreurs ou des coupables. Bien sûr il faut chercher des erreurs, et des coupables quand il y en a. Mais il ne faut pas se cacher qu’il s’agit aussi là d’un pur mécanisme psychologique. Quand j’entends les proches des victimes des massacres de novembre dire qu’ « ils veulent comprendre », c’est quelque chose de très fort et que nous devons respecter. Mais… Qu’y aurait-il à comprendre ? Leurs amis, leurs enfants, leurs conjoints sont morts à cause de la folie de pseudo-religieux, point final. Et je ne suis pas sûr qu’on favorise leur deuil en entretenant cette illusion. Mais la mort est l’absolu incompréhensible, l’absolu inacceptable, l’absolu arbitraire. Les proches des victimes des crashs aériens disent qu’ils se battent pour que cela n’arrive plus jamais ; comme si on pouvait rêver qu’il n’y ait plus jamais d’accidents d’avion. C’est que la mort et le deuil seraient moins terribles si au lieu d’être inéluctable elle résultait d’une erreur ou d’une faute ; si, au lieu d’être l’insensé par excellence elle pouvait servir à quelque chose. Mais la vérité est que la mort ne sert à rien, et qu’elle vient parce qu’elle vient.

En ce qui vous concerne, si vous avez raison de penser que votre frère est mort d’épilepsie, il faut qu’il ait été victime de ce qu’on appelle un état de mal. L’état de mal épileptique s’accompagne toujours d’un coma profond, de sorte que le malade n’y assiste pas. L’aspect du corps peut être comme il est, cela ne renseigne nullement sur ce que le malade a vécu, et dans ce cas particulier il n’a rien vécu du tout.

Pourquoi vos deux frères sont-ils partis à si peu d’intervalle ? Le plus probable est que c’est le hasard. Même si on a parfois le sentiment que deux êtres se sont suivis dans la mort parce qu’ils tenaient trop l’un à l’autre (mais ce sentiment correspond-il à une réalité, ou bien ne fait-il que refléter notre horreur de ce qui n’a pas de sens ? Donner du sens, c’est un peu maîtriser…). Il en va de même de la prescience qu’il semble avoir eue du danger qu’il courait : véritable prémonition ou simple hasard ? C’est indécidable. Et après tout, quelle importance ?

L’essentiel est dans ce deuil redoublé auquel vous vous trouvez affrontée. Et que vous en dire, sinon vous assurer de ma totale confiance en vous ?

Bien à vous,

M.C.

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