Poster un message

En réponse à :

La déshydratation en gériatrie

, par Michel

Bonjour, Florence.

Je comprends votre détresse.

Mais il faut nuancer le propos : la morphine n’est nullement contre-indiquée chez l’insuffisant rénal ; il faut seulement adapter les doses, et je n’ai pas de raison de penser que cela n’a pas été fait. D’autre part c’était une situation difficile : si on a donné de la morphine c’est qu’on avait des raisons de penser que votre père était agité parce qu’il avait mal. Et le problème est alors toujours le même : peut-on laisser un malade avoir mal ? Il est de situations où on doit assumer une part de risque.

Ce que nous aurions à nous demander c’est quel est le mécanisme qui a conduit au décès. Pour cela il faut savoir quelle était la gravité de la déshydratation et surtout ce qui l’a provoquée. Quand on doit hospitaliser un malade précaire, il y a de multiples raisons pour que les choses se passent mal. Je crois qu’il serait important que vous preniez contact avec l’équipe médicale pour voir quelles ont été leurs hypothèses. Mais il ne faut pas se cacher que dans ces situations nous travaillons souvent à l’aveugle, et qu’il est toujours très présomptueux pour un médecin de prétendre avoir des certitudes ; souvent on fait comme on peut, comme on croit, et c’est précisément la raison pour laquelle on se retrouve si souvent dans le mur. Par exemple quand on réhydrate on sait parfaitement que rien ne permet de savoir si l’état cardiaque va pouvoir supporter les volumes de liquide qu’on apporte ; mais on sait ce qui va se passer si on ne réhydrate pas.

C’est pourquoi il est si difficile de composer avec les familles. Il s’agit de situations extrêmement complexes, et si (on pouvait cependant le faire) on vous avait invitée au tour de table où la décision a été prise (encore aurait-il fallu que l’urgence ait permis d’en organiser un) vous auriez été bien en peine de peser le pour et le contre ; il vient un moment où on est bien forcé de s’en remettre aux professionnels, quand il s’agit de décisions extrêmement pointues. Je sais bien que l’heure est à dire que le malade, ou son entourage, doit être partie prenante des choix, mais il ne faut pas se cacher qu’on se paie largement de mots : je peux, je dois vous expliquer ce que je fais ; quant à considérer que votre savoir, votre expérience, égalent les miens, c’est un peu un leurre. Allons plus loin : le risque dans ces discussions est de vous refiler le mistigri d’une décision que je n’ai pas le courage de prendre.

Alors les médecins décident. C’est leur mission. Et ils se trompent. Et parfois ils voient mal, et parfois ils sont négligents. Ou incompétents. Mais rien ne permet de le dire ici, j’ai vu trop de ces situations où on m’a confié un malade dans un état plus ou moins catastrophique, et où avant même que j’aie pu me faire la moindre idée...

Allez voir l’équipe. C’est le mieux.

Bien à vous,

M.C.

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.