Poster un message

En réponse à :

La tutelle des personnes âgées

, par Michel

Bonsoir, Martine.

Il y a malheureusement un grand écart entre ce que je pourrais vous dire au nom du bon sens et de la loi et ce qui risque de se passer dans la réalité. Je vais donc reprendre votre message en vous livrant les commentaires qui me viennent à l’esprit.

Ma tante qui a de gros problèmes cognitifs a été mise sous tutelle par le Tribunal

Mais que s’est-il passé exactement ? Qui a demandé la tutelle ? La loi fixe la liste des personnes habilitées à demander une telle mesure. Je voudrais être sûr qu’elle a été respectée. D’un autre côté la loi est facile à tourner. Par exemple, les médecins ne sont pas autorisés à demander la mise sous tutelle d’un de leurs patients. Mais je savais bien, quand c’était nécessaire, demander une mesure de sauvegarde de justice, ce qui suffisait à alerter le Juge des tutelles qui pouvait alors se saisir du dossier. Ou, dans les cas les plus inquiétants, décrocher mon téléphone et appeler le Procureur. Tout de même : ma question a son importance.

et une tutrice non apparentée, désignée en novembre 2017.

Là encore, comment cela s’est-il passé ? La loi dispose en effet que le Juge est tenu de rechercher un tuteur dans la famille. Ce n’est que s’il n’en trouve pas qu’il peut recourir à un tuteur extérieur. Ce que je me demande, c’est si cela a été respecté. À vous lire j’aurais presque le sentiment que vous n’avez absolument pas été associée à la procédure. De fait je ne suis pas certain que les Juges soient toujours très regardants sur ce point : il faut dire que la loi en vigueur jusque, disons la loi de 2007, lui donnait pratiquement carte blanche, et je soupçonne que certains magistrats n’ont pas intégré leurs nouvelles obligations. Je voudrais donc vraiment en savoir davantage : le choix d’une tutrice extérieure à la famille doit être justifié, et il existe des moyens légaux pour faire modifier cet état de choses. Par exemple la mesure de tutelle est prise au cours d’un jugement, et ce jugement est susceptible d’appel et de cassation ; mais il y a des délais de prescription. Pour en décider il faut :
- Savoir comment vous avez été associées à la prise de décision.
- Voir plus précisément avec un avocat quelles sont les possibilités de recours.
- Avoir la certitude qu’il faut remettre en cause le choix de la tutrice. Je veux dire que la nomination d’un tuteur extérieur peut être un traumatisme pour la famille, alors que c’est très souvent une excellente solution.

Cette tante a été "hospitalisée" en EHPAD dont les coûts sont assez élevés.

Là aussi, rappelons la loi : quelles que soient les circonstances, et même sous tutelle, la personne protégée choisit librement son lieu de résidence. C’est une disposition qui n’a aucun sens : si la personne protégée a les moyens de prendre une décision aussi complexe que celle d’un choix de résidence, on se demande pourquoi il faut la protéger. Mais c’est ainsi.

D’autre part il faudrait se demander ce que le jugement de tutelle contient. On peut décider d’une tutelle aux biens de la personne protégée, une tutelle à la personne elle-même, ou les deux. Naturellement cette distinction est elle aussi un peu évasive car le tuteur aux biens a son mot a dire du simple fait qu’il paie les loyers ; mais enfin cela a une importance en cas de difficulté ou de conflit.

Elle dispose d’une retraite de 3000 euros et avait un capital de 100 000 euros.

Je ne sais pas où cela se passe. Mais il n’est pas si difficile de trouver un EHPAD dont le coût n’excède pas € 3 000. Il y a quelque chose qui ne me va pas : elle est en EHPAD depuis, mettons deux ans. Si le coût de l’établissement, non content d’absorber € 3000 euros par mois, a consommé l’essentiel du capital de € 100 000, c’est qu’on se trouve dans des coûts totalement prohibitifs. Il me semble qu’il y a matière à contester.

Apparemment, d’après la tutrice, qui a refusé de fournir à l’une des sœurs, le relevé annuel des comptes,

Il y a des cas où il est bon que le tuteur ne fournisse pas les comptes, et je ne sais pas s’il est tenu de le faire. Mais il me semble aberrant, dans le cas général, qu’un tuteur n’ait pas à cœur d’associer le plus possible la famille à la gestion.

Bref.

Il n’est pas bon, ou pas normal, que votre famille soit totalement évincée de ce type de décision. Je ne le comprendrais que si vous étiez notoirement incapables de participer au tour de table ; c’est le cas quand les conflits intrafamiliaux sont tels qu’il est plus sage de mettre la balle au centre ; c’est aussi le cas (plus rare…) quand la famille a été condamnée pour escroquerie en bande organisée.

Il vous faut revoir la procédure : comment en est-on arrivé à cette tutelle, mesure probablement judicieuse, mais dont vous me donnez l’impression qu’elle vous est tombée dessus à l’improviste ?

Il vous faut vous concerter en famille sur ce que vous voulez faire.

Vous pouvez ensuite :
- Revoir la possibilité d’établir une relation normale avec la tutrice.
- Demander au Juge que les comptes vous soient communiqués.
- Lui faire remarquer que le coût de l’EHPAD vous semble inadéquat.
- Éventuellement remettre en cause la désignation de la tutrice.
- Et demander qu’elle soit attribuée à l’un d’entre vous.

Mais, je le répète :
- Un tuteur extérieur est souvent une bonne chose.
- Il ne faut pas que le Juge conclue que vous vous inquiétez de voir l’héritage filer.
- Je ne sais pas ce qu’il en est des délais de prescription.
- Cela veut dire une procédure judiciaire, éventuellement longue (mais pas très coûteuse). Pour ma part je la souhaite car il me semble que certains points de l’application de la loi sur la tutelle demandent à être précisés par la jurisprudence.

Bien à vous,

M.C.

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.