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En réponse à :

Préalables à une psycholologie du sujet âgé

, par Michel

Bonjour, et merci de votre message.

Je comprends votre réaction, et je suis conscient du caractère provocateur de mon propos : quoi de plus terrifiant, de plus barbare, que l’électrochoc ? Mais nous sommes ici pour parler en vérité, même quand cette vérité nous décoiffe. Pour prendre une exemple encore plus gore, je suis farouchement opposé à la peine de mort ; mais ce que le physiologiste sait, c’est que quand il s’agit de tuer son prochain la méthode la moins bestiale est la guillotine, talonnée par le garrot franquiste. Ça met du sang partout, mais c’est un autre problème.

Passons. S’agissant de l’électrochoc, il faut dire tout d’abord :
- Que dans ses débuts, il se pratiquait sans anesthésie ; c’est révolu.
- Qu’on a fait n’importe quoi avec les électrochocs.
- Que les troubles de mémoire ont été surestimés.

Cela n’empêche pas qu’il en existe une utilisation raisonnée : l’électrochoc est remarquablement efficace dans les dépressions dites mélancoliques, et plus encore dans les dépressions délirantes. Je vais vous raconter les choses à l’ancienne, car ces distinctions n’ont plus guère cours, ce qui me semble une erreur (je supplie les psychiatres de cesser de lire). De mon temps on distinguait trois types de dépression :
- La dépression réactionnelle : le sujet est triste, et quand on considère ce qu’il vit on se dit qu’il y a de quoi ; le modèle de dépression réactionnelle est le deuil.
- La dépression névrotique : le sujet est triste, et quand on considère ce qu’il vit on se dit qu’il n’y a pas de quoi. C’est un trouble de l’adaptation à la réalité.
- La dépression mélancolique, qui est tout autre chose, et qui est de l’ordre de la psychose. Je la décrirais en disant qu’il s’agit en somme d’un délire de dévalorisation : tout comme il y a des délires mégalomaniaques dans lesquels le sujet se croit le meilleur du monde, il y a des délires dans lesquels le sujet se croit le pire du monde. Quand nous lisez dans le journal qu’un forcené a tué sa femme et ses enfants avant de se faire justice, il s’agit d’un mélancolique, qui s’est cru le pire des hommes, et tellement mauvais qu’il fallait qu’il meure ; mais que même mort il aurait encore pu faire du mal à son entourage, raison pour laquelle il fallait qu’il le supprime.

Vous imaginez sans peine la souffrance de ces malades.

D’où l’intérêt de l’électrochoc dans cette pathologie ; car les antidépresseurs sont plutôt moins efficaces, et surtout leur action est beaucoup plus lente.

En gériatrie le problème se double d’une difficulté : celle de la tolérance des médicaments. Il y a en effet deux grandes classes d’antidépresseurs :
- Les anciens, type Anafranil, qui sont très efficaces mais posent d’importants problèmes de tolérance dans plus d’un tiers des cas ; or il faut souvent utiliser de fortes doses.
- Les nouveaux (dont la principale propriété est d’être beaucoup plus chers), qui ne m’ont jamais impressionné par leur efficacité dans les dépressions graves, et qui du reste posent leurs propres problèmes de tolérance.

Ajoutons que quelle que soit la classe utilisée les effets bénéfiques peuvent se faire attendre un, voire deux mois.

Je demande donc que soit réexaminée la question de l’électrochoc, surtout en gériatrie.

Quant à savoir comment ça marche...

Bien à vous,

M.C.

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