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En réponse à :

La personne âgée opposante

, par Michel

Bonsoir, Vanina.

Votre question est très fine. Mais la réponse risque de nous mener très loin, trop peut-être.

Je dirais d’abord que vous avez raison : vous vous trouvez devant une personne qui ne veut pas faire quelque chose ; votre projet à vous est de l’amener à le lui faire faire ; si vous parvenez à vos fins, alors il est totalement exact que vous avez manipulé la personne. Mais cette manipulation est-elle illicite ? Je ne le crois pas : songez au nombre de fois où, à ce compte, dans la vie courante vous manipulez votre entourage ? La vie sociale normale est faite de manipulations : combien de fois aurez-vous manipulé votre mari ? vos enfants ? Qu’est-ce que la séduction, sinon une vaste entreprise de manipulation ? Il ne faut pas se laisser piéger par les mots : parler de manipulation, c’est parler d’un acte répréhensible, autrement dit la notion même de manipulation est assise non sur l’acte mais sur son intention : manipuler, c’est vouloir nuire. Quand vous amenez la vieille personne à faire ce que vous voulez, votre intention n’est pas de nuire, elle est de l’influencer, ce qui est autre chose.

Mais ce que vous sentez, peut-être, c’est que vous êtes en position de surplomb : vous avez une technique, des connaissances, vous êtes en pleine possession de vos moyens, si j’ose dire le combat est inégal. Et il ne faut jamais perdre cela de vue, tant il est facile d’écraser l’autre du poids de son savoir, et tant il est facile (regardez les médecins) de remplacer l’observation attentive de l’autre par la récitation d’une leçon apprise. Et cette dissymétrie vous gêne.

Mais c’est pour cela qu’on vous paie. Vous n’avez pas le droit d’utiliser vos connaissances, vous en avez le devoir. Il y a une contrepartie, bien sûr, qui est que vous ne devez jamais abuser ce ces compétences. On vous autorise à pénétrer l’intimité de l’autre, on vous autorise à pratiquer sur lui des actes qui en tout autre circonstance seraient tout simplement des attentats à la pudeur ; mieux : on vous demande de les faire ; c’est à la condition que vous puissiez à chaque instant en rendre compte.

Surtout, gardez cette lucidité et ce questionnement : c’est la plus belle vertu d’un soignant.

Bien à vous,

M.C.

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