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En réponse à :

La sottise se porte bien

, par Michel

Bonjour, Unautre.

Bien sûr, nous ne devons pas juger l’affaire, et il faut être très prudent. Mais observez qu’au même stade de l’enquête on nous en avait dit beaucoup plus dans l’affaire Bonnemaison. Ceci me laisse supputer qu’il n’y a que ce qu’on nous a dit ; toutefois nous ne parlons qu’« à la lumière de ce que nous savons », ne l’oublions pas.

Du coup, s’il y avait des indices, des témoignages, il me semble qu’on en saurait déjà bien plus. Mais de toute manière je ne verrais pas d’obstacle à ce que dans cette matière on instaure un contrôle judiciaire sur les comportements des médecins.

Je crois que l’action solitaire est toujours dommageable dans ces situations. Encore faut-il que les circonstances ne la rendent pas inévitable. Mais un médecin de soins palliatifs qui, au minimum, ne ferait pas partie d’un groupe de parole me poserait question. Et quand je relis les situations de fin de vie que j’ai accompagnées à domicile, je ne crois pas avoir provoqué de gros désastres, mais il aurait sûrement mieux valu que je puisse en parler : si tous les psychanalystes sont astreints à une supervision, ce n’est pas trop demander que vouloir qu’un médecin qui côtoie la mort bénéficie du même regard extérieur.

Je persiste à dire que le médecin n’a de comptes à rendre qu’à son patient. Je dis cela parce que j’ai trop vécu de situations, notamment en unité de soins palliatifs, où mine de rien les volontés de la famille l’emportaient sur celles du patient (dame, c’est la famille qui survit, c’est elle qui dépose des réclamations). Mais je sais aussi que cette position est excessive. Dans la vraie vie le fait de décider une sédation (ce qui est une décision thérapeutique qui est du ressort du seul médecin) crée une situation à laquelle il faut bien que la famille s’adapte. En somme le médecin prend en charge une communauté faite d’un malade, de son entourage et de son équipe soignante. Si les décisions ne doivent être prises que dans l’intérêt du malade, il faut considérer :
- Que si la famille va mal cela retentira sur le patient.
- Qu’il s’agit aussi d’accompagner la famille, qui a donc des besoins et des droits. Ces besoins et ces droits doivent être pris en compte, même si cela passe après ceux du patient.
Or la sédation perturbe la relation entre le patient et ses proches. D’où des obligations pour le médecin.

Le midazolam est un médicament comme un autre. Sa seule (!) particularité est que si on ne respecte pas les règles, au demeurant fort simples, d’utilisation, on va se retrouver avec un arrêt respiratoire. C’est comme le fugu, en somme : si le cuisinier n’est pas compétent le convive meurt ; s’il l’est il n’y au aucun danger. Ce qui se passe c’est que le produit fait partie de ce qu’on appelle la réserve hospitalière, d’où il suit que sa délivrance en ville est compliquée. Du coup les médecins libéraux se rabattent sur des drogues alternatives, ce qui est dommage, car au total les solutions alternatives sont bien plus dangereuses.

Je ne crois pas une seconde que le midazolam soit un marqueur d’euthanasie. Remarquez d’ailleurs que les militants de la mort pour tous n’en parlent pas : leur cheval de bataille n’est pas une benzodiazépine (Valium, Hypnovel, etc) mais un barbiturique (pentobarbital). Je n’ai jamais compris pourquoi. D’une manière générale je n’ai jamais compris pourquoi les procédures d’euthanasie telles qu’on les utilise par exemple aux Pays-Bas sont d’une telle complexité. Ou plutôt si : je crois que je l’ai compris, mais cela n’a rien à voir avec l’intérêt du patient.

Bien sûr il y a une zone d’ambiguïté entre sédation et euthanasie ; cette zone naît du fait qu’à un moment le seul critère est la pureté de l’intention du médecin, ce qui tout de même est impalpable. En somme la différence entre sédation et euthanasie est que dans un cas le médecin pousse sa seringue en se disant : pourvu que je n’en mette pas trop, alors que dans l’autre il se dit : pourvu que j’en mette trop. C’est un peu fin comme différence. D’où l’importance de la supervision, et même du contrôle judiciaire.

Donc le seul problème est bien qu’un médecin soit interdit d’exercer alors que sa seule infraction (c’en est une) est de s’être procuré du midazolam sans respecter la procédure.

Après, on peut se questionner : pourquoi ne l’a-t-il pas respectée ?

En ce qui me concerne, je ne la respectais pas, tout simplement parce qu’il n’y avait pas de procédure : le midazolam était un produit strictement hospitalier, il fallait bien que je me débrouille.

Pour ce qui est de ce médecin, j’avoue que si j’avais eu une épouse anesthésiste, je ne me serais probablement pas embarrassé de procédure. Mais on ne peut exclure qu’il ait agi de la sorte parce qu’il avait des choses à cacher. Tout ce que je dis c’est que dans ce cas il s’y est pris comme une bûche : il y a tout de même des moyens beaucoup plus simples de tuer son prochain, même avec des médicaments.

Bien à vous,

M.C.

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