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En réponse à :

Les troubles psychiatriques du sujet âgé

, par Michel

Bonjour.

La réponse à votre question est malheureusement assez simple.

Ce que vous décrivez, c’est un fléchissement intellectuel somme toute assez brutal chez un sujet très âgé. De deux choses l’une : ou vous avez raison, ou vous avez tort.

Supposons que vous ayez raison. Il faut se demander pourquoi il y a ce fléchissement, avec trois orientations essentielles :
- Un trouble organique : le cerveau de votre père fonctionne mal parce qu’il est placé dans de mauvaises conditions (oxygénation, glucose, fièvre, etc.). La liste des causes est relativement longue, mais tous les médecins la connaissent.
- Un trouble psychiatrique, notamment un délire ; reconnaissons que cela n’y ressemble pas.
- Un trouble réactionnel (réactivation d’un deuil ancien dans la perspective d’une fin de vie qui approche, anxiété aiguë, etc.
Ces trois orientations demandent une investigation rigoureuse, éventuellement une hospitalisation pour être certain de ne rien oublier.

Mais le plus probable est que vous avez tort. Vous croyez que ce fléchissement est récent, mais il n’en est rien. Je ne vais pas réécrire ici tout ce qui se trouve dans La démence ou l’art du camouflage. Qu’il me suffise de vous rappeler que la démence, même évoluée, est parfaitement compatible avec une vie d’apparence normale, et que les proches se laissent presque systématiquement piéger, découvrant le désastre comme un événement récent alors que les choses en fait se dégradent depuis longtemps.

Or regardons les faits. Vous en apportez quatre :
- Il est désorienté, et désorienté dans l’espace ; c’est donc une désorientation grave.
- Il présente un trouble mnésique majeur. C’est là qu’il faut se prononcer très vite : soit il s’agit d’un trouble de l’attention/concentration, qui s’insérerait dans le cadre d’une confusion mentale ; soit il s’agit d’une atteinte mnésique grave, et alors l’hypothèse à privilégier est celle d’une démence avancée.
- Il a des troubles du comportement qui indiquent qu’il n’a pas d’autre moyen de réagir à la situation.
- Enfin, et surtout, il y a votre formulation : il y a encore 5 mois il parvenait à se gérer seul. Vous n’avez pas écrit : Jusqu’ici il ne présentait aucun trouble intellectuel. Non : ce que vous écrivez, c’est qu’il y avait des dégâts, mais que somme toute il arrivait encore à se débrouiller à peu près. En somme vous avez depuis longtemps repéré que tout n’était pas parfait, mais on vous a dit : « c’est l’âge », ce qui est à la fois tout à fait vrai et dépourvu de sens. Oui, avec l’âge les troubles intellectuels se font plus fréquents ; ça ne les empêche pas d’être des troubles intellectuels ; c’est comme si on disait qu’il est normal de mourir à la fin de sa vie.

Bref, je souhaite de tout cœur que votre père soit victime d’une pathologie aiguë curable qui va normaliser la situation pourvu qu’on s’en donne les moyens. Mais je n’y crois pas une seconde. En réalité ce qui éclate aujourd’hui c’est une situation ancienne, qui évolue depuis plus de trois ans, et que votre père n’a plus les moyens de dissimuler.

La première chose à faire est de décider si on va explorer l’ensemble des possibilités. Si on veut le faire, on aura du mal à se passer d’une hospitalisation. Si on renonce à le faire, c’est qu’on valide l’hypothèse d’une démence qui se révèle brutalement. La question alors est celle de l’avenir : il peut devenir indispensable d’organiser une entrée en institution. Si on veut lutter contre les troubles du comportement tout en le maintenant à domicile, il va devenir indispensable de prescrire des sédatifs, voire des neuroleptiques, avec des effets très dommageables sur la performance intellectuelle.

Mais peut-être pouvez-vous m’en dire plus ?

Bien à vous,

M.C.

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