La bandelette urinaire Un petit texte pour la formation des infirmières et aides-soignantes

81 | par Michel

Dans la pratique quotidienne du soignant, une attention particulière est portée aux urines. Les anomalies qu’on repère ou croit repérer ne justifient pas toujours un examen biologique. Une utilisation raisonnée de la bandelette urinaire permettrait souvent de préciser les choses à moindres frais.

LES IDÉES :

Ce que les soignants rapportent, ce sont des informations liées à léspect des urines. Ils en tirent fréquemment des conclusions.
- Les urines sont maladorantes : il doit y avoir une infection.
- Les urines sont épaisses, chargées de sédiment : ce doit être du pus.
- Les urines sont rouges : il y a du sang.
- Les urines sont abondantes : il doit y avoir un diabète ; elles sont peu abondantes, ou très brunes : elles doivent être concentrées, le malade doit être déshydraté.

Or ces idées sont fausses, ou du moins très insuffisantes. Par exemple :

- Le rein sert avant tout à éliminer les déchets produits par l’organisme et la couleur et l’odeur sont liés à l’alimentation :

Il n’y a pas que les microbes qui sentent.

Et le plus souvent les microbes ne sentent pas.

- De même l’épaisseur des urines signale l’existence d’un sédiment. Mais le plus souvent le sédiment est fait de cristaux ; il est rare que ce soit du pus.

L’inspection des urines est donc très trompeuse, et il vaut mieux vérifier ce qu’on voit avant de l’interpréter. Or cette vérification est souvent très simple à effectuer.

LA BANDELETTE URINAIRE :

Les bandelettes urinaires courantes comportent 8 plages :

- 1. Leucocytes : c’est la seule manière de prouver qu’il y a du pus.
- 2. Nitrites : de nombreux microbes (mais pas tous) fabriquent des nitrites.
- 3. Sang : c’est le seul moyen de prouver qu’une couleur rouge ou foncée est liée à un saignement.
- 4. Densité : c’est la seule manière de dire que les urines sont concentrées.
- 5. Corps cétoniques : on en trouve en cas de diabète décompensé, mais aussi en cas de jeûne.
- 6. Glucose : la glycosurie est presque toujours liée à une glycémie élevée.
- 7. Protéines : de nombreuses maladies rénales entraînent une fuite de protéines.
- 8. pH : mesure de l’acidité urinaire.

Seules les six premières nous intéressent pour notre propos actuel : l’existence d’une protéinurie, ou d’un pH inhabituel, sont des données à signaler mais il n’y a guère que le médecin qui puisse en tirer des conclusions.

REMARQUES SUR L’UTILISATION DES BANDELETTES :

- Il faut respecter les temps d’utilisation : on ne fait pas de bandelette urinaire sans chronomètre.
- La lecture se fait de préférence à la lumière du jour.
- Il est rarement logique de demander un examen cytobatériologique des urines avant d’avoir effectué une bandelette, car si elle est normale on n’ira le plus souvent pas plus loin.
- Les résultats normaux sont aussi importants que les autres. C’est pourquoi chez le malade incontinent on peut utiliser l’essorage de couches. Si on découvre une anomalie on n’en tirera pas de conclusions, car la technique de recueil est suspecte ; mais si on ne voit rien c’est qu’il n’y a rien : s’il y a des leucocytes on n’est pas sûr qu’ils viennent des urines, mais s’il n’y en a pas on est sûr qu’il n’y en a pas dans les urines...

L’INFECTION URINAIRE :

En règle générale on considère que s’il n’y a pas de leucocytes il n’y a pas d’infection. Mais si on trouve des leucocytes de manière isolée, cela ne prouve pas qu’il y a une infection.
A l’inverse s’il y a des nitrites on peut considérer qu’il y a une infection. Mais de nombreux germes ne produisent pas de nitrites.
Donc :
- S’il y a des leucocytes et des nitrites, il y a sans doute une infection.
- S’il n’y a ni l’un ni l’autre, il n’y a probablement rien.
- S’il y a des nitrites et pas de leucocytes, il y a sans doute une colonisation peu agressive.
- S’il y a des leucocytes et pas de nitrites, soit il n’y a rien soit il y a une infection à germes ne produisant pas de nitrites.

Mais même s’il y a une infection, il n’est pas certain qu’on la traitera. On ne traite que les infections urinaires qui le nécessitent.

La bandelette d’un malade sondé est toujours anormale.

Quand rechercher une infection urinaire ?

Le soignant est invité à rechercher une infection urinaire quand il constate les faits suivants :
- Couleur ou odeur suspectes.
- Douleur abdominale ou lombaire.
- Signes d’irritation vésicale.
- N’importe quel signe digestif.
- Fécalome.
- Changement de comportement inexpliqué.
- Fièvre.

L’HÉMATURIE :

L’abondance de l’hématurie est rarement un problème : il faut qu’il y ait au moins un litre d’urine pour qu’il y ait un litre de sang. Ce qui fait la gravité d’une hématurie, c’est sa cause.

LA DENSITÉ URINAIRE :

La seule manière de parler d’urines concentrées est de mesurer la densité. Le soignant qui parle d’"urines concentrées" doit donc pratiquer une bandelette.

Quand les urines sont concentrées cela indique deux choses :
- Que le rein est dans un état suffisamment bon pour pouvoir concentrer les urines (le rein du sujet âgé est souvent défaillant sur ce point).
- Et le plus souvent que le malade est déshydraté : si le rein concentre les urines c’est d’abord pour économiser l’eau.

LES CORPS CÉTONIQUES :

Toute prézsence de corps cétoniques impose une glycémie capillaire.
- Si la glycémie est basse : ce malade ne mange pas.
Si la glycémie est élevée, il s’agit d’un diabète décompensé, à traiter en urgence.

LE GLUCOSE :

La glycosurie n’apparaît que quand la glycémie est supérieure 1,6 g/l, du moins quand le rein est normal. En gériatrie ou en soins palliatifs la surveillance de la glycosurie pourrait suffire à surveiller les diabètes de type II.

CONCLUSION :

Toute inquiétude sur les urines implique une bandelette ; c’est d’autant plus logique que les flacons de bandelettes, une fois ouverts, se périment très vite.