Poster un message

En réponse à :

Soins palliatifs et pensée magique

, par Michel

Bonjour, et merci de ce message.

Que vous répondre ? Il y a dans ce que vous dites beaucoup de choses que je partage, bien sûr : il ne manque pas de cas où les choses se sont déroulées de telle manière qu’on ne peut guère les expliquer autrement.

Mais je crois que dans ce domaine la prudence s’impose. Car l’homme est l’animal qui ne peut se passer de donner du sens à ce qu’il voit. Je crois même que c’est sa fonction. Il ne faut pas oublier que le sens est une construction intellectuelle. Il faut encore moins oublier que la condition de toute pensée scientifique est d’admettre que la nature n’a pas de sens.

Si on garde cela, alors on peut se souvenir que la situation la plus fréquente est celle de la maladie qui survient parce qu’elle survient, et de la mort qui arrive parce qu’elle arrive. Cela nous est insupportable parce que si c’est le hasard qui décide alors nous devons perdre tout espoir d’avoir barre sur l’événement, y compris quand notre tour viendra ; nous préférons donc nous raconter des histoires, mais ce sont, le plus souvent, des histoires, et les exceptions que nous connaissons tous ont beau être éclatantes cet éclat ne doit pas nous masquer le reste.

Je ne crois pas que le suicide soit impossible, je crois même qu’il est plus fréquent qu’on ne pense, et qu’en gériatrie il faudrait réévaluer la part de la dépression dans les actes suicidaires ; ce qui est une façon de dire que le suicide, surtout réussi, ne me semble pas réservé aux malades psychiatriques.

Ce que vous dites de la peur de la mort serait à creuser dans la perspective des travaux de Maisondieu : la démence est effectivement une porte de sortie (mettons pour 20% des cas), et il se peut qu’il s’agisse de malades qui ont peur de la mort. La peur de la mort existe, à mon sens, et le fait qu’elle ne repose sur rien n’empêche nullement cette existence, même si vous avez pleinement raison de noter que dans cette peur se mêlent des arguments plus rationnels. Mais peut-être faut-il affiner : j’ai peur de mourir en ce moment, parce que je n’ai pas fini des choses auxquelles je tiens, parce que ma femme en serait malheureuse… Mais il y a aussi cette terreur du trépas, c’est-à-dire de l’impensable ; pour le moment cela ne me soucie guère, mais qu’en sera-t-il quand les choses se préciseront ? Ces deux aspects de la peur de la mort sont indépendants, et ils ont chacun leur force. Bref je ne partage pas totalement votre certitude sur ce point, et je crois qu’on peut tout à fait avoir peur de sa propre mort.

Mais tout cela est à approfondir.

Bien à vous,

M.C.

modération a priori

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

Qui êtes-vous ?
Ajoutez votre commentaire ici
  • Ce champ accepte les raccourcis SPIP {{gras}} {italique} -*liste [texte->url] <quote> <code> et le code HTML <q> <del> <ins>. Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.