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En réponse à :

La souffrance en fin de vie

, par Michel

Bonjour, Nuitdeclipse.

Que dire, sinon que vous semblez être exactement là où il faut, dans l’état d’esprit qu’il faut pour assister votre père au mieux ? Parce que vous voyez parfaitement les choses, et que vous ne fuyez pas.

Cela pose bel et bien la question du sens de ce qui se passe. A quoi cela sert-il ? Je me dis que le plus difficile pour nous est d’accepter que les choses nous échappent, que nous n’y pouvons rien. Quand l’autre me quitte et que je reste sur le quai de la gare, il y a un moment où il s’éloigne et où je n’ai aucun moyen de le garder près de moi. Et je ne peux accepter la mort que si j’accepte mon impuissance radicale, impuissance à retenir celui qui part, impuissance même à le soulager. Je ne suis pas du tout sûr qu’on accepte mieux la mort en décidant de la contrôler (notre civilisation se targue d’être une civilisation qui contrôle toutes les situations, où nous mène-t-elle ?).

Naturellement il n’est pas question de laisser les malades souffrir. Mais il y a, inévitable, ce que vous décrivez : des zones d’incertitude. Souvenons-nous que la mort travaille plutôt bien quand on lui fiche la paix, et que le mourir se passe le plus souvent bien moins mal que nous ne pensons. Et quand il n’en va pas ainsi, nous avons les moyens, même s’il n’est pas simple (c’est le cas ici) de décider de les prendre. Je crois que le temps du mourir est un temps qui, mystérieusement, nous est donné, tant à celui qui part qu’à ceux qui le voient partir.

Vous me parlez encore de douleur. Je suppose que les médecins n’ont pas perdu de vue leur projet : ils ont arrêté la morphine pour mieux traiter la douleur, c’était une bonne idée, mais quelle est l’étape suivante ?

Enfin, vous vous posez la question de sa souffrance morale. On peut répondre sans crainte de se tromper : elle existe. Tout le problème est qu’il n’y a pas que cela, et qu’il faut évaluer comme on peut (mais on le peut, au moins partiellement) cette souffrance et se demander si ce qu’il vit, ce que vous tous vivez en dehors de cette souffrance justifie qu’on en reste là, ou s’il faut envisager de diminuer son état de conscience. Question très difficile, mais que l’équipe ne manque certainement pas de se poser.

Tout ce que je voudrais ajouter c’est que nous avons certes le devoir de prendre la bonne décision pour le malade. Mais quand cette décision est très complexe, ce que nous devons plus encore que prendre une décision parfaite est de prendre une décision droite. Notre devoir d’humains est d’être compétents, il est encore plus d’être honnêtes.

Je vous souhaite tout le courage que la situation demande ; il me semble que vosu touchez au terme de ce drame.

Bien à vous,

M.C.

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