Ma grand-mère, Pierrette est décédée mardi matin à l’âge de 86 ans. Elle ne vivait plus chez elle depuis novembre dernier suite à une chute. Déjà quelques semaines auparavant, nous trouvions son état préoccupant, elle avait perdu beaucoup de poids, avait des pertes de mémoires et des phases assez agressives (surtout dirigée contre mon grand-père). Lorsqu’elle est arrivée à l’hôpital (suite à sa chute), les examens ont révélées des troubles cognitifs importants et anciens et également une rectorragie difficilement traitables puisque elle avait par ailleurs des problèmes de circulation du sang avec risque de thromboses. Les analyses de sang ont montrées un état d’anémie et de dénutrition important.
A sa sortie de l’hôpital, elle est donc entrée en maison médicalisée. C’est à ce moment là que nous avons pris la mesure de l’ampleur de ses troubles : des hallucinations, des angoisses et une agressivité fluctuante.
Son délire le plus ancré, qui l’a d’ailleurs poursuivie jusqu’à la fin, était qu’un homme était entré dans sa chambre durant la nuit et l’avait agressée la laissant pour morte sur le sol et qu’à force d’appeler, les infirmières étaient venues la relever mais que l’homme en question lui avait cassé le bras en plusieurs endroit et le nez également et toutes ses douleurs étaient liés à cette agression, qu’elle revivait en permanence. Cet état d’angoisse était très difficile à vivre pour nous.
Quinze jours avant son décès, ma mère est partie en voyage à l’étranger, je passais donc tous les jours à la maison de retraite pour lui rendre visite et ensuite donner de ses nouvelles à mon grand-père, qui habitait toujours dans leur maison située à 50km. Car dans sa démence, ma grand-mère a développé une animosité envers mon grand-père et qui s’est terminé en refus catégorique de le voir.
Vendredi dernier alors que je passais lui rendre visite, je l’ai trouvée dans sa chambre avec deux infirmières, elle se plaignait de douleurs diffuses dans le haut du corps et ses constantes n’étant pas très bonnes elle a été transportée aux urgences.
J’ai donc suivie en lui promettant qu’elle ne resterait pas seule. En arrivant aux urgences, on ne m’a pas autorisé à entrer. J’ai pu la voir 5 minutes avant qu’elle parte à la radio et lui ai dit que je reviendrai le lendemain.
Le lendemain, son état ne s’était pas amélioré mais le week-end dans les hôpitaux publics les médecins sont très rares donc je n’ai eu quasi aucune informations, je suis revenue le dimanche et en fin d’après midi alors que j’allais rentrer, la douleur au niveau de l’abdomen a été telle que l’infirmière à appelé le médecin et qu’il a demandé un scanner. Résultat : péritonite due à un cailleau obstruant une artère. Pas d’opération envisageable donc soins palliatifs et pronostic très sombre. J’ai appelée ma mère pour qu’elle arrive le plus rapidement possible. Elle est arrivée le lundi après midi avec mon grand-père. Ma grand-mère commençait à être de plus en plus shootée et avait de plus en plus de mal à s’exprimer. Elle n’a, heureusement pour mon grand-père, pas eu de réaction de rejet en le voyant. Mon grand-père a été extrêmement choqué de la voir dans cet état et n’a pas pu rester longtemps dans la chambre et ma mère a donc été obligée de dire adieu à sa mère à ce moment-là et de rentrer chez elle avec mon grand-père. La voyant si mal et devant le constat que la morphine ne suffisait pas à la soulager ; nous avons pris la décision avec ma sœur de rester avec elle et de l’accompagner jusqu’à la fin.
Quelle expérience que celle-ci !!! La douleur n’était pour nous pas discutable, devant ses grimaces, ses gémissements et ses mains qui se plaçaient sur son ventre. C’est là que je ne comprends pas car malgré le caractère incurable de son état, les infirmières nous répétaient qu’elle ne pouvait pas faire plus et qu’elle devait attendre 4 heures entre deux doses supplémentaires de morphine (en plus de celle qu’on lui administrait en continue).
Nous avons donc passé une nuit qui restera gravée à jamais, une nuit à l’embrasser, à lui chanter des berceuses, à lui dire qu’on était là. Cela a été un véritable traumatisme pour nous d’autant plus que nous avions perdu notre père quinze ans auparavant des suites d’un cancer et que cela ravivait des choses.
Je n’oublierai malheureusement jamais ces gémissements, ses yeux qui se rouvrent et la terreur que l’on y lisait. Je ne suis pas une spécialiste mais je reste persuadée que l’on aurait pu faire plus pour la soulager.
Mes propos sont sûrement comme mon état un peu confus et je m’en excuse.