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En réponse à :

Le grabataire en fin de vie

, par Michel

Bonsoir, Claudine, et merci de ces nouvelles.

Je note déjà un point très important (et qui va bien compliquer les choses) : deux mois après votre premier message, votre mère est toujours en vie. Cela n’allait pas de soi à vous lire en janvier. Et elle est en maison de retraite, ce qui signifie qu’elle est dans un projet, même si ce n’est guère le sien. Il nous faut donc abandonner l’hypothèse qu’elle aurait décidé d’aller vers sa fin ; ou pour être plus précis, elle y va certainement, mais à pas comptés.

Dans ces conditions il est impératif de reprendre l’ensemble de la situation. Par exemple le fait qu’elle soit hospitalisée pour un problème pulmonaire doit être considéré sous un angle gériatrique pur : il s’agit d’une malade qu’on entend guérir de son infection. Cela suppose qu’on se donne des moyens adaptés, et si en soi cela n’exclut pas d’utiliser la morphine comme je vous le suggérais, ce n’est pas l’option la plus immédiate : ce type de traitement est plutôt utilisé en fin de vie. Pour la situation que vous décrivez les armes sont bien plutôt antibiotiques. Quant à la manière de la prendre en charge dans l’EHPAD, je crois que le mieux est de vous en tenir au bon sens. Oui, il se peut malgré tout qu’elle laisse aller un peu les choses. Et il se peut que cela la rende vulnérable. Mais je vous recommanderais plutôt d’adopter une attitude neutre : faites soigner ce qui se laisse soigner, et ne cherchez pas à lutter contre le reste. En particulier il ne faut certainement pas limiter les visites ou prendre des précautions qui compromettraient son interaction sociale : si la vie qui lui reste à un sens, elle est dans les relations qu’elle peut encore nouer ou entretenir, et elle ne doit pas payer sa survie du prix d’un isolement.

De la même façon, je relativiserais, au moins provisoirement, le sentiment que vous avez sur son adaptation à la maison de retraite. Il est évident qu’elle ne voulait pas y aller ; même ceux qui décident d’aller en maison de retraite le décident à contrecoeur. Mais il ne faut pas accorder trop de crédit à ce qu’elle peut exprimer à ce sujet : elle n’a guère le choix, il faut bien qu’elle fasse son deuil et il faut bien qu’elle le fasse en se plaignant. L’expérience montre que l’adaptation souvent n’est pas si mauvaise, même si les résidents ne l’avouent pas. Ce qui n’exclut nullement une dépression : la dépression du sujet âgé est d’une incroyable fréquence, et la seule manière de s’en sortir est de traiter, même dans le doute, tant on a de (bonnes) surprises.

Il ne faut pas vous laisser impressionner par le terme de mouroir. Je n’en connais pas de plus injuste. Oui, quand on entre dans une maison de retraite c’est pour n’en ressortir que mort. Mais à ce compte j’ai exercé dans des mouroirs dont j’ai été très fier.

Je crois que le moment est venu pour vous de lire le texte que j’ai récemment consacré à la culpabilité. J’y ajouterai simplement que je ne crois absolument à la nécessité de se sacrifier...

Bien à vous,

M.C.

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