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En réponse à :

Le grabataire en fin de vie

, par Michel

Bonsoir.

Malheureusement, je vais avoir bien peu de chose à ajouter. Car vous connaissez et comprenez parfaitement ce qui se passe, et vous y réagissez comme il convient d’y réagir. Tout ce que je peux dire c’est que cela me rassure quant à la manière dont vous allez pouvoir survivre à cette épreuve.

La mort est l’une de ces situations où nous ne pouvons pas éviter de chercher du sens.

En soi le monde n’a pas de sens ; C’est l’homme qui pose la question du sens. A partir de là on a deux options : soit on dit : "Non, rien n’a de sens, c’est une illusion de l’homme.", et on se retrouve dans les philosophies totalement matérialistes (et il n’y en a pas légion, Marx par exemple est bien moins matérialiste qu’il ne pense), ou on dit que la question du sens est une question majeure, et on se retrouve vite à poser les questions classiques de la métaphysique ; j’ajoute à titre personnel qu’il est bien difficile alors de se passer d’un dieu, mais c’est une autre histoire.

Bref, c’est l’homme qui cherche le sens. Et pour cette raison il a besoin que le hasard soit tenu en laisse.

Nous pensons que ce qui se produit autour du mourir est porteur de sens. Je le pense moi aussi ; il se peut que ce soit une illusion. Mais je me demande si c’est là l’important. Ce qui importe c’est que le malade parte paisiblement, et que le deuil des survivants soit le moins terrible possible. Et il y a toutes les raisons du monde pour penser que, dans les maladies chroniques, le décès est toujours précédé d’une phase plus ou moins longue de coma ; ce coma peut passer inaperçu de l’entourage, parce que l’évaluation de la profondeur d’un coma ne va absolument pas de soi. Donc quand un malade décède dans les minutes qui suivent le départ d’une personne, le plus probable est tout de même qu’il n’est pas en état de s’en apercevoir. Est-ce sûr ? Non. Mais cela dépend, précisément, de la réponse que nous entendons donner à cette question du sens.

Il est bien difficile de trouver des mots qui soulagent votre souffrance. Mais il me semble que si les choses ont un sens, alors elles se passeront dans le respect de la volonté de votre compagnon ; mais pour qu’elles aient un sens il nous faut poser l’hypothèse que le mourant dispose jusqu’au bout d’un minimum de liberté de choix. Et si elles n’ont pas de sens, alors il faut privilégier l’hypothèse inverse : le malade n’est plus réellement conscient, et les choses n’ont d’importance que pour nous.

Je crois, à vous lire, que vous aurez la lucidité et la sagesse de laisser advenir ce qui doit advenir. Et que vous aurez la force.

Le seul piège serait, mais vous en êtes consciente, de vivre cette seconde perte comme une copie de la première. Ce n’est pas le plus facile.

Je reste à votre écoute.

Bien à vous,

M.C.

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