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En réponse à :

L’agonie

, par Michel

Bonjour, Noémie.

Merci de ce témoignage, qui éclaire si bien les difficultés, mais aussi les surprises de la fin de vie ; il me pousse à dire encore une fois que, même si nous savons tous combien ces moments sont pénibles, ils contiennent de la vie, et qu’il faut y regarder à deux fois avant de dire que cette vie n’a pas lieu d’être.

Je voudrais simplement revenir sur cette histoire de confusion mentale, dont vous dites que les médecins n’ont pas su vous l’expliquer. Il se peut qu’ils ne l’aient pas fait ; mais la confusion mentale est un trouble si déroutant qu’il se peut aussi qu’ils vous l’aient expliqué mais que, ne les trouvant pas adaptées, vous ayez méconnu ces explications.

Je dis cela à cause de ce que vous écrivez : Les médecins n’ont pas pu nous expliquer cette démence pendant les 2 derniers mois, car il n’y avait aucune atteinte au cerveau.. Il y a là deux choses qu’un médecin ne peut dire en aucun cas ; en effet :
- La confusion mentale n’a rien à voir avec une démence.
- Dans l’immense majorité des cas de confusion mentale, il n’y a aucune atteinte cérébrale.

La confusion ne résulte presque jamais d’une lésion cérébrale ; ce n’est pas un trouble lésionnel, c’est un trouble fonctionnel. C’est ce qui arrive à un cerveau qui se trouve placé dans de mauvaises conditions de fonctionnement. Le prototype de la confusion mentale est tout simplement... l’ivresse : quand on trempe un cerveau dans l’alcool, il marche beaucoup moins bien. Et si, comme après tout je vous le souhaite, vous avez la moindre expérience de ce qui se passe quand on a (un peu) trop bu, vous pouvez vous faire une idée assez juste de ce qu’est une confusion. D’autres situations sont bien connues, notamment la fièvre : le cerveau n’aime pas qu’on le chauffe.

En fin de vie il y a de multiples raisons d’entrer en confusion, car il y a de multiples dysfonctionnements ; et je persiste à penser que le médecin doit absolument faire l’inventaire de toutes les causes de confusion, car beaucoup sont curables. Ce n’est que quand on a fait le tour de toutes les causes classiques (je ne vais pas vous les énumérer, il y en a deux pages) qu’on peut envisager deux autres causes, extrêmement fréquentes mais sur lesquelles on se rabat trop souvent comme sur une solution de facilité :
- Les confusions médicamenteuses, notamment morphiniques. Il arrive que certains cerveaux ne supportent pas la morphine ; le choix est alors entre laisser le malade confuser et le laisser avoir mal ; pour moi le choix est vite fait.
- Les confusions psychogènes : de nombreux malades se réfugient visiblement dans la confusion pour échapper à un vécu trop angoissant. Quand on arrive à cette conclusion le plus sage est sans doute de ne rien faire et de laisser le malade avec cette défense.

Ce pourrait être cela que vous avez vécu ; j’y pense surtout à cause de sa conclusion en forme de boutade ; au fond il y a quelque chose de commun entre la confusion mentale et l’humour : les deux réalisent une prise de distance qui permet de dire plus facilement des choses qu’on a du mal à exprimer autrement.

En tout cas la confusion mentale est certainement plus pénible pour l’entourage que pour le malade. Piètre consolation sans doute ; mais je vous l’offre.

Bien à vous,

M.C.

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