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En réponse à :

L’escarre : une maladie générale

, par Michel

Bonsoir, Karin.

Je suis simplement heureux de votre bonheur. Il n’y a rien d’autre à faire que de savourer ce présent qui vous est offert.

Si on veut discuter cependant, je préciserais un point : il n’est jamais exact de dire : "vous n’avez rien", ou : "Elle n’a rien". Votre mère a quelque chose. Elle a quelque chose puisqu’elle a mal, et qu’elle est tout de même en difficulté d’état général. La seule chose qui soit vraie c’est que le scanner n’a rien montré. Ou encore que nous avons une idée de ce qu’elle n’a pas : pas de tumeur évidente, pas d’abcès évident. Il faut toujours remplacer : "elle n’a rien" par : "je ne trouve rien" ; et s’empresser d’ajouter que tout de même il n’y a pas tellement de choses dangereuses qui échappent à l’imagerie.

Quant à tirer des leçons de cette histoire...

Vous savez, il ne m’a pas été simple de vivre cette erreur de pronostic. Je n’oublie jamais combien la tenue de ces forums est un exercice risqué, et combien je peux envoyer mes correspondants sur des fausses pistes. Mais en fait la question n’est pas là. La question, c’est celle de l’acharnement thérapeutique.

Je l’ai déjà dit : on raconte n’importe quoi sur l’acharnement thérapeutique. Si on refait l’histoire de cette notion, on tombe très vite sur cette évidence : au cours de mes études on m’avait appris que tout devait être tenté pour sauver un malade, et qu’il n’était pas éthiquement (le mot n’existait guère) acceptable de le priver d’une chance. C’est cela qui a changé : à présent nous considérons en somme que la vie est moins un absolu qu’il y a un demi-siècle. Ce changement est positif. Mais outre que, peut-être, on n’en mesure pas toutes les conséquences sur la civilisation, on a grand tort de se figurer qu’il est simple. La position initiale l’était : on fait tout pour sauver la vie. L’autre ne l’est pas.

Ce que je vous ai dit, c’est que le pronostic de votre mère ma paraissait sombre. Et il l’était. Ce qui me met le plus mal à l’aise, c’est que si j’avais été le médecin de votre mère il y a une probabilité pour que j’eusse fait le même raisonnement, et que j’en conclue qu’il ne fallait rien faire. Et votre mère serait morte parce que quand on décide de ne pas s’acharner on n’est jamais démenti par les faits.

Ce que votre père a plus ou moins imposé s’appelle de l’acharnement thérapeutique. Et cela suffit à vous montrer la redoutable complexité du problème, et à vous faire comprendre pourquoi je suis exaspéré par cette rodomontade signée pourtant du Comité Consultatif National d’éthique : L’acharnement thérapeutique se définit comme une obstination déraisonnable, refusant par un raisonnement buté de reconnaître qu’un homme est voué à la mort et qu’il n’est pas curable, et qui fait royalement l’impasse sur le fait que l’acharnement thérapeutique, des fois ça marche. Votre histoire le prouve, une fois de plus.

Bien à vous,

M.C.

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