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En réponse à :

La sottise se porte bien

, par Michel

Bonjour, Alexandra.

Je peux vous répondre très rapidement : le midazolam n’est pas un médicament en tension de production, il est assez facile d’augmenter la cadence, et les doses utilisées restent faibles. Il n’y a donc pas de pénurie à craindre.

Par contre je songeais à un article sur ce thème. Je voulais l’intituler Rions un peu, mais je ne suis pas sûr que ce soit clair pour tout le monde. Du coup je sursois. Mais voici ce que j’aurais écrit :

Quiconque a un peu flâné sur ce site connaît mon hostilité farouche à toute légalisation de l’euthanasie. Je ne change pas d’avis.

Imaginons maintenant une situation particulière. Simple expérience de pensée tellement l’hypothèse est invraisemblable. Supposons une maladie qui se répande ; il y a des formes graves, et en tel nombre que les moyens de réanimation sont saturés.

On se trouve alors en situation de médecine de catastrophe. Dans ce cas la règle est simple : si on veut sauver tout le monde on ne sauvera personne. La première chose qu’on fait en arrivant sur un site de catastrophe, c’est du tri ; on va sélectionner les malades qui ont le plus de chances de guérir, et on laissera mourir les autres, y compris ceux dont les possibilités de survie ne sont pas nulles.

Pour ces dernières personnes, il n’y a qu’une chose à faire : assurer le confort. Et en pratique par une sédation.

Oui, mais comment ?

On va créer des unités aiguës de soins palliatifs. Il faut dire que médecin de soins palliatifs c’est le type même du job qui s’improvise. La sédation, c’est l’enfance de l’art. Essayez, pour voir.

Oui, mais la fin justifie les moyens. Sans doute comprenez-vous mieux maintenant les cris d’orfraie que je poussais en lisant dans la loi Claeys-Léonetti que la sédation profonde et continue pouvait se pratiquer partout ; y compris à domicile et en institution, en ignorant superbement que pour la sédation les conditions d’environnement et de compétence sont des conditions éthiques. Mais de cela la loi Claeys-Léonetti se garde bien de souffler mot : sédatez toujours, si ça gagne pas ça débarrasse.

Mais dans l’utopie dont je vous parle, il y a pire : la pénurie de professionnels fait qu’on n’a pas les moyens d’en distraire pour dorloter les mourants : il faut tout mettre sur les autres.

Or la raison pour laquelle je ne veux pas d’euthanasie, c’est que je m’engage à assurer le confort des mourants.

Dans ce cas, qui n’a aucune chance de se produire, il est bien plus conforme à l’honnêteté, au lieu de laisser le malade mourir en étant mal pris en charge, de l’expédier d’un bon coup de potassium. J’ai toujours dit que si le problème de l’euthanasie ne se pose pas en France aujourd’hui, je ne dirais pas la même chose si j’étais au nord du Sahel avec pas de morphine et un flingue chargé.

Et voilà comment on pourrait être amené à valider une exception d’euthanasie au seul motif, dont pourtant même l’ADMD n’ose pas se réclamer, de ce qui est in fine une contrainte économique. Je vous laisse imaginer comment, une fois cela admis, on pourrait revenir en arrière.

La crise du coronavirus nous impose donc une réflexion éthique. Et elle nous l’impose en urgence, ce qui est la pire des situations.

Tiens, je crois que je vais publier ça tel quel.

Bien à vous,

M.C.

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