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En réponse à :

La confusion mentale

, par Michel

Bonsoir, Abdelhafidh.

Comme vous l’avez remarqué, la situation de votre père évoque celle rapportée par Jérôme le 31 août. Et elle appelle de ma part les mêmes réserves :
- Le diagnostic de confusion est tout à fait légitime, mais il n’est pas certain.
- Le diagnostic de démence a été éliminé ; dont acte. Mais il faut garder en tête que c’est un diagnostic moins facile qu’on ne pense, et que l’élément essentiel est l’évolution, ce qui fait qu’on doit éviter de se presser avant de tirer des conclusions définitives.

D’autre part je crois ferme une chose : si on pose le diagnostic de confusion mentale il est obligatoire d’hospitaliser le patient, et de le faire en urgence. En effet dans la moitié des cas environ la confusion mentale a une cause physique (la liste est longue, je l’évoque dans l’article) ; or il faut agir vite :
- Parce que si on laisse la confusion s’installer on a ensuite toutes les peines du monde à la réduire.
- Parce que la cause de cette confusion peut elle-même être une affection dangereuse : par exemple l’insuffisance respiratoire aiguë peut provoquer une confusion ; mais de toute manière il vaut mieux ne pas laisser les gens en insuffisance respiratoire aiguë.

Cela n’a pas été fait pour votre père. J’en conclus que l’hypothèse privilégiée n’est pas celle d’une confusion mentale. Vous savez, si j’ai écrit cet article, c’est parce que la confusion mentale est un phénomène très méconnu, y compris par les professionnels. Il s’agit de quelque chose de très précis mais de diagnostic pas toujours facile, d’où mon obsession de préconiser une grande rigueur dans son approche. Ici le plus probable est que les médecins qui connaissent la situation n’ont pas en vue une vraie confusion mentale, même s’ils utilisent le terme par habitude ou commodité de langage. Vous avez le même phénomène de relâchement linguistique avec les mots de délire et d’hallucinations, qui sont souvent employés l’un pour l’autre alors qu’ils décrivent des phénomènes radicalement différents (avec cette circonstance aggravante que bien des médecins oublient qu’ils correspondent à des mécanismes différents, et appellent des réponses différentes).

Bref, je serais prudent. Et je vous rappellerais tout d’abord que je n’ai pas vu votre père, et que par conséquent je ne parle que d’un point de vue théorique.

Nous avons donc un patient qui présente :
- Une inversion du rythme veille/sommeil.
- Un sentiment de dépersonnalisation, survenant quelque temps après.
- Un état hallucinatoire dont le sujet est incapable de faire la critique (ce qui fait poser la question d’une note délirante associée).
- Des fonctions supérieures d’allure normale.

Ceci est compatible avec une confusion mentale, mais on ne s’explique pas bien pourquoi tout débute par un trouble du sommeil. Il est tentant de se demander si cette sorte d’état second n’est pas un effet indésirable d’un somnifère ; j’ai vécu cela personnellement et j’en garde un souvenir cuisant.

Tout le problème en pareil cas est de savoir si on est allé au fond des choses.
- Un bilan sanguin était nécessaire ; il ne suffit pas à faire le tour de toutes les causes de confusion.
- Un test cognitif était nécessaire. Mais, je vous le redis, il ne suffit nullement à éliminer une démence, notamment de type Alzheimer. Et je ne parle même pas ici de ces troubles apparentés dans lesquels l’altération des fonctions cognitives n’est pas au premier plan.
- Il y a chez le sujet âgé une foule de troubles psychiatriques, de diagnostic difficile, qui demandent une réelle expertise dans le domaine : je ne m’y risquerais pas moi-même.

Alors… Ce que j’en pense ?

Peu de chose. C’est trop difficile, et je me ridiculiserais en émettant une opinion sur un malade que je n’ai pas vu. Mais je vous recommanderais bien de consulter plutôt un gériatre, qui aurait pour mission de vérifier que toutes les pistes, notamment physiques et médicamenteuses, ont été explorées : il y a tant à faire que cela ne peut être réalisé qu’en hospitalisation. Et je resterais obnubilé par l’hypothèse d’une démence : tout de même, dans un tel contexte, c’est sur quoi, hélas, on finit neuf fois sur dix par tomber. Pire : même quand on parvient à établir un diagnostic plus bénin, comme une intolérance médicamenteuse, une infection méconnue, etc., il se produit souvent qu’on s’aperçoive au bout d’un certain temps qu’en fait il y avait aussi une démence dessous.

Bien à vous,

M.C.

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