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En réponse à :

La mort, un acte social

, par Michel

Bonsoir, Françoise, et merci de votre précieux, et sans doute coûteux témoignage.

Notre désaccord n’est je crois qu’apparent, et repose sur un malentendu.

Les médecins de ma génération ont appris qu’il y avait trois sortes de dépression :
- La dépression réactionnelle, dont l’exemple est le deuil : je suis triste parce qu’il m’est arrivé une catastrophe.
- La dépression névrotique, dans laquelle la tristesse du sujet semble hors de proportion avec ce qui la cause, et qui pourrait être comparée à un mal-être (pardon pour le schématisme).
- La mélancolie, qui est un trouble psychotique, équivalant à un délire de dévalorisation. D’ailleurs il y a des mélancolies délirantes. C’est rare, et très particulier ; Quand on lit dans le journal qu’un forcené a tué sa femme et ses quatre enfants avant de se faire justice, il y a gros à parier que c’était un mélancolique qui se figurait qu’il était le pire des hommes, tellement mauvais que même mort il arriverait à faire souffrir sa famille, de sorte que la seule manière de la protéger est de la tuer. Au maximum de ce délire il y a le syndrome de Cotard, dans lequel le patient est persuadé qu’il n’existe pas.

Bon, depuis une trentaine d’années ce schéma est passé de mode. Je ne suis pas psychiatre, et je ne sais pas si cet abandon est une bonne chose, j’ai le sentiment tout de même qu’on y reviendra.

Ce dont je parlais c’est de la mélancolie ; les autres dépressions en tout cas sont d’une autre nature et relèvent d’autres mécanismes.

Et puis il y a d’autres situations. Il ya des gens que la vie n’intéresse pas ; il y a des gens qui ne se remettent pas d’une blessure, il y a... Dans le vieux schéma je tendrais à les classer dans les dépressions névrotiques.

Bref, ce vieux schéma n’est peut-être pas complet.

S’agissant du suicide il faut retenir que le risque est maximum chez le mélancolique, moindre dans les autres formes ; moindre ne veut pas dire nul, malheureusement.

Et comme vous dites, le suicide vise toujours à échapper à la souffrance. Mais il me semble qu’il ne vise pas que cela.

Vous écrivez :

si les hommes se pendent volontiers en France, ce n’est, à mon sens, pas par volonté d’afficher leur mort, mais encore une fois, faute d’autre solution.

Le commun des mortels n’a pas accès aux médicaments qui permettent une mort douce et certaine. Il ne sait pas comment se les procurer sans donner l’alerte ; il craint de "se rater".

Sans doute ; mais je ne suis pas totalement persuadé.

D’abord parce que si on passe une nuit dans un service d’urgences on va constater qu’il y a un nombre impressionnant de "suicides manqués" pour lesquels le suicidant ne s’est pas trompé de produit, et à peine de doses. Le savoir en matière de suicide est plus répandu qu’on ne pense.

Ensuite parce que beaucoup de suicidants déploient une grande ingéniosité (et une grande énergie) pour parvenir à leurs fins ; or les données nécessaires se trouvent en quelques secondes sur Internet.

Cela ne vaut pas pour tout ni pour tous, bien sûr. Mais cela m’incite à penser que dans le suicide se joue aussi autre chose.

Après il va de soi que je ne sais rien du suicide, et que je parle avec l’idée que j’ai de ce que serait le mien. C’est maigre.

Et lorsqu’il consent à avaler les petites pilules prescrites par le médecin, il peut arriver que le premier effet ressenti soit une levée des inhibitions et non une levée du voile gris qui obscurcit sa vie.

Je ne sais pas. On a parlé de cette levée d’inhibition, puis on a dit qu’elle n’existait pas, puis on en reparle...

Et, j’ai beau avoir retourné cet acte en tous sens depuis 7 ans, je n’arrive pas à lui attribuer le moindre sens.

Rien. Il ya des souffrances indicibles qui ne reposent sur rien, ou sur rien de communicable. Souvent ce n’est pas un secret, et même celui qui souffre ne peut dire de quoi il souffre. Mais il souffre.

Merci de votre confiance. J’aimerais pouvoir vous aider à parvenir à la paix.

Bien à vous,

M.C.

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