Cet article a été relu le 9 avril 2012

Une enquête sur la maltraitance : I : le questionnaire

21 | (actualisé le ) par Michel

GENERALITES :

La maltraitance est un problème majeur dans les institutions. Un groupe de réflexion sur ce thème s’est formé à l’hôpital saint Jean. Les premiers débats ont montré qu’il était difficile de s’accorder sur une définition de la maltraitance. Cela a conduit le groupe a envisager une étude préliminaire visant à circonscrire le sujet.

Cette étude a pris la forme d’un questionnaire rédigé par l’un des membres du groupe. Il a été diffusé par l’encadrement une semaine donnée au cours de séances de transmissions. Tous les soignants présents se sont vus remettre le questionnaire (annexe I), qu’il leur était demandé de remplir à leur convenance, aucune consigne particulière n’étant donnée.

Le questionnaire a recueilli 33 réponses. Il y a une centaine de personnes inscrites à l’effectif, mais de manière au demeurant contestable le questionnaire n’a été adressé qu’aux membres du personnel soignant. Ont donc été exclus du questionnaire :
- Les soignants absents.
- Les cadres, médecins, surveillante.
- Le personnel administratif et médico-social.
- Les membres des services techniques.
- Les membres du personnel hôtelier.
- Les équipes de nuit.
Soit une quarantaine de personnes. D’autre part une équipe a refusé de répondre individuellement, et a fourni une réponse collective. Au total on peut considérer que sur 60 personnes ayant reçu le questionnaire 40 ont participé à l’étude, soit un taux de réponse de 2/3. Ce taux de réponse est évidemment un succès. Toutefois il faut pondérer cette opinion : cela laisse en effet une trentaine de sujets non répondeurs, et il est plausible que ce soit parmi eux que se retrouve une population particulière relativement à ce thème, soit que les maltraitants s’y retrouvent tous (mais c’est loin d’être certain) soit que les non répondeurs soient majoritairement plus mal à l’aise avec ce sujet.

Les résultats du questionnaire sont consignés en annexe II.

Le questionnaire comme maltraitance :

Il n’est pas possible de considérer ce questionnaire sans prendre en compte la résistance des soignants à ce genre d’exercice. Retenons notamment que les soignants n’ont pas manqué d’éprouver une certaine méfiance, liée notamment au fait que le questionnaire était présenté par l’encadrement, ce qui a probablement pesé sur les réponses ; mais retenons aussi que pour la plupart ils se sentent mal à l’aise devant l’écrit, et que le simple fait de devoir écrire est pour eux une source importante de stress.

QU’EST-CE QUE LA MALTRAITANCE ?

La question posée était : pour vous maltraiter, c’est :

Il fallait d’abord essayer de cerner le problème. La première question était donc délibérément très ouverte, et demandait simplement ce qu’était la maltraitance pour la personne interrogée.

On reste frappé par le nombre des situations de maltraitance décrites dans ces réponses. Rappelons qu’elles concernent la moitié environ de l’effectif soignant (40 sur 70 en incluant les absents). Elles donnent l’impression que les soignants baignent dans une atmosphère de maltraitance dont ils sont les témoins autant que les acteurs.

Ceci doit être entendu, et rien ne permet de le relativiser. On relèvera simplement quelques points qui peuvent plaider pour une atténuation :
- Il y a certainement un « effet questionnaire », et il faudrait notamment être sûr que les actes décrits correspondent à des situations effectivement observées plutôt que des situations imaginées pour donner une réponse.
- Il y a une incohérence entre la fréquence décrite, le lien fort qui existe avec le principe du signalement systématique à l’encadrement (cf. infra) et la rareté des signalements réellement effectués.
- Il semble que la maltraitance soit cause d’une grande souffrance chez les soignants. Ceci devrait entraîner une forte participation au groupe de parole... ce qui n’est pas le cas ; d’autre part le travail sur la maltraitance est une initiative de l’encadrement.

L’analyse des réponses permet de retrouver un nombre de thèmes très restreint.

Certaines situations de soins sont vécues comme des maltraitances :
« Faire un soin à un résident quand il le refuse »
« Imposer une situation à une personne non consentante »
« Imposer quelque chose à quelqu’un alors qu’il refuse totalement ».
D’autres situations, faisant appel à des pratiques effectivement discutables mais dont l’intentionnalité louable n’est pas contestée, font l’objet de commentaires très nuancés : « Être obligé de donner des soins particuliers (attacher les résidents, forcer sur l’alimentation...) ; ou ne pas pouvoir en donner ». Avec une extraordinaire lucidité ce soignant met le doigt sur le problème essentiel : en somme la seule situation qui ne soit pas suspecte de maltraitance serait celle où le patient et le soignant s’accordent sur le soin à effectuer. Mais dans la pratique une telle conception relève de l’angélisme : on sait parfaitement que le désir du soignant et celui du patient ne coïncident que rarement ; non seulement il y a tous les cas où le patient refuse les soins proposés, mais il y a encore plus souvent sans doute ceux où le patient, par faiblesse, par lassitude, par peur ou par simple gentillesse, se laisse forcer la main. Ce que dit ce soignant c’est que toutes ces situations sont source de maltraitance.

Un autre soignant déclare : « Faire aux autres ce que je ne voudrais pas que l’on me fasse ; refuser d’accorder à l’autre les droits et les devoirs que je me reconnais ». Indépendamment du recours au précepte classique de la Règle d’Or, ce qui est mis en évidence ici c’est le pouvoir humanisant du devoir : n’est membre du clan que celui à qui on a attribué un rôle, ce qui revient à lui confier des devoirs.

Les conditions de travail sont maltraitantes : « dans la rapidité » ; « obliger »

Il y a certainement une maltraitance ordinaire, dont les soignants pensent qu’elle est presque banalisée. « Manque de respect à autrui ; être un minimum agressif (verbalement, gestuellement) » ; notons que la maltraitance verbale est bien reconnue, peut-être même plus que la maltraitance physique (ce qui est somme toute une bonne chose : il est heureux que l’inconduite verbale soit plus fréquente que les coups) ; « des gestes brusques » « gestes déplacés ». La nécessité d’une formation ou d’un soutien est pointée : « Avoir des gestes agressifs d’ignorance ».

On relève cependant des situations beaucoup plus inquiétantes, qui au minimum pointent des soignants en difficulté, ou en manque de formation, au maximum des individus au comportement délictueux :
« Bousculer ; peut-être en venir à la frapper » (On ne prend guère de risque en présumant que cette réponse témoigne d’un fait vécu, voire d’un fait dont l’auteur de la réponse se sent coupable, soit qu’il l’ait commis soit qu’il ait failli le faire. Redisons ici que nul n’est à l’abri d’un dérapage ; la question n’est pas de savoir si on est parfait mais simplement comment on va se perfectionner).
« Frapper les résidents. Brusquer une personne. Donner des coups ».
Ces situations semblent d’une fréquence non négligeable. De même il y a des défauts de soins qui ne peuvent être tolérés, et qu’on ne soupçonnait pas dans notre maison :
« Un manque de soins ».
« Ne pas répondre à l’appel ». On savait qu’il y a sur ce point des négligences, on ignorait qu’elles pouvaient être délibérées (Rappelons toutefois que le traitement de cette problématique de l’appel ne va pas de soi : dans ce domaine il existe des malades ou des résidents dont le comportement est abusif, voire maltraitant, et pour qui on n’arrive à aucun compromis. Il peut être alors nécessaire de mettre en place une gestion particulière de leurs appels, et cette gestion peut comporter des éléments de fermeté. On reviendra sur ce point. Disons seulement qu’une précaution irréductible est de prendre ce genre de décision en équipe, et de la réviser à terme rapproché) ; on trouvera plus bas :
« Retrait de sonnette ; « oubli » de faire boire lors des repas ».
« Ne pas donner à manger à quelqu’un ».
« Oubli délibéré de faire boire ou manger ; pressions, menaces psychologiques ».

Cependant d’une manière générale c’est le manque de respect qui est le plus souvent cité, ce qui témoigne d’un haut niveau de conscience chez les soignants ayant répondu : « La maltraitance est verbale et physique ; manquer de respect à autrui par n’importe quel moyen ».

Un soignant apporte un élément fondamental, celui de la finalité : « Ne pas respecter l’autre et profiter de notre statut, de notre supériorité physique et/ou intellectuelle afin d’imposer notre bien-être au détriment de l’autre ». Pour lui on ne peut parler de maltraitance que si le comportement profite au soignant. Le comportement décrit est celui du racisme/colonialisme.

CE QUI MET LE SOIGNANT MAL À L’AISE :

La première question demandait une définition a priori de la maltraitance. Même si cela n’a rien de surprenant il n’allait pas de soi que les réponses décrivent à ce point des maltraitances survenues dans l’établissement. C’est pourquoi une seconde question visait à savoir ce qu’il en est de la maltraitance dans la maison. On a essayé de l’aborder en posant deux questions interdépendantes.

La première question était purement quantitative :

Vous êtes vous déjà senti mal à l’aise devant une situation ?

Il faut d’abord noter que sur les 33 réponses 4 ne répondent pas et 2 répondent non ; donc près de 20% des soignants ne parlent pas d’un malaise. Mais ceci nous réserve une surprise. Car les soignants qui ne se disent pas mal à l’aise ont été témoins de faits relativement lourds, notamment en termes de négligences :
- « Parler agressivement, bousculer, ne pas répondre à l’appel ».
- « Mauvaises paroles, gestes déplacés ».
- « Manque de respect parole/geste ».
- « Être violent physiquement ou moralement envers nos patients ».
- « Frapper les résidents ».
- « Brusquer une personne. Donner des coups. Insulter une personne. Imposer quelque chose à quelqu’un alors qu’il refuse totalement ».
Par ailleurs deux soignants n’ont pas répondu alors qu’au dessous ils décrivent dans quelle situation ils se trouvent mal à l’aise.

Tous les autres ont éprouvé un malaise. Ceci montre combien le problème pèse en termes de souffrance des soignants. Ici encore ce serait la fonction du groupe de parole que de permettre de structurer une réflexion sur ce thème.

On demandait ensuite des exemples de situation ayant mis le soignant mal à l’aise.

On ne sera pas surpris de retrouver des thèmes identiques à ceux de la première question. On sera davantage étonné, précisément, des différences.

Le premier thème est celui des soins imposés :
- « Le fait de faire prendre une douche quand ils ne veulent pas ».
- « Devant le refus d’un résident de manger, de se laver ».
- « Faire des douches à des personnes imbougeables ».
Ici le problème vient de la mauvaise image du soignant tel qu’il se perçoit. Le malaise naît de la différence entre l’idéal de soin du soignant et la réalité de son acte. Mais il faudrait aller plus loin, car le problème posé est relativement facile à résoudre : si on prend le dernier cas cité : « Faire des douches à des personnes imbougeables », la solution est simple : ou bien le malade est en état de recevoir sa douche et la question de ce point de vue est simplement de former le soignant pour qu’il rectifie une opinion trop pessimiste ; ou bien le malade n’est pas en état de recevoir sa douche et il faut modifier le plan de soins. La question serait donc de savoir pourquoi le professionnel souffre alors que son problème n’existe pas pratiquement. Et c’est important : il souffre et le patient est maltraité.

C’est la même difficulté que l’on rencontre dans le commentaire suivant : « Devant la famille, quand il nous est impossible de leur donner leur alimentation et qu’on sorte de la chambre sans les avoir nourris, je ressens une certaine gêne devant la famille qui s’inquiète ». Cette remarque est fascinante. Car la situation qui est décrite n’a aucun rapport avec un problème de maltraitance. Il importe donc de comprendre pourquoi le soignant en parle. Et il n’est pas très difficile de voir qu’en fait il voit le rapport dans la nature de sa gêne : l’échec de sa prise en charge lui renvoie la même image de mauvais soignant que dans le cas précédent. La base de son malaise est la culpabilité para rapport à un idéal. C’est la première irruption du thème de la culpabilité, il est probable qu’on n’en a pas fini avec lui. Ajoutons enfin que pour se tromper de la sorte il faut que la soignante soit très sensible à ce qui lui apparaît comme une ambiance de maltraitance.

On retrouvera ce thème de la culpabilité dans d’autres commentaires :
- « Ne pas pouvoir gérer une situation ».
- « Annonce décès ».
- « Impossibilité de comprendre et de se faire comprendre ».
Dans ces derniers commentaires on voit se superposer un second thème qui est celui de l’impuissance. Ceci n’est pas lié au hasard : les situations de maltraitance germent sur le terreau de l’impuissance et de la culpabilité.

Une série de commentaire constitue autant de témoignages d’actes de maltraitance :
- « Geste brutal et agressif dans la parole ».
- « Agressivité dans les paroles ; toilette rapide avec des gestes brusques ; retrait de sonnette ; « oubli » de faire boire lors des repas ».
- « Par des paroles ou des gestes ».
- « Quand une personne parle mal à un patient, ou lève la main même sans frapper, mais juste le geste choque ».
- « Maltraitance verbale et manque de respect par rapport à l’âge ».
- « Une personne qui dit à un résident : « Je ne suis pas là pour me faire emmerder par une vieille » ».
- « Crier sur quelqu’un de manière méchante ; bousculer quelqu’un pour la toilette ; ne pas donner à manger à quelqu’un ».
- « En étant témoin d’une maltraitance, ou en en étant l’auteur ».
- « Un soignant tapant un malade ou l’agiter violemment et aussi vis-à-vis des paroles (ex. : tutoiement) ».
- « Absence de réponse ; manipulation délibérément violente ; oubli délibéré de faire boire ou manger ; pressions, menaces psychologiques ».
- « Brutalité physique et verbale ».
- « Un soignant qui frappe un résident ».
- « Agression verbale d’un soignant vis-à-vis d’une personne âgée fragile ne pouvant se défendre ».
Cette série de témoignages est éprouvante : elle nous rappelle que les actes de maltraitance existent dans notre maison. La question est de savoir ce qu’il convient de faire de ce rappel. On peut évidemment choisir de le relativiser : il se peut que ces témoignages correspondent à des fantasmes ; il se peut aussi qu’ils se réfèrent tous aux mêmes actes ; mais outre qu’une telle minimisation est en soi dangereuse la question n’est pas là : il y a suffisamment d’arguments pour affirmer qu’il existe des actes de maltraitance et la seule chose qui nous importe est de savoir comment on peut y remédier. La difficulté est cependant que pour des raisons de confiance ce questionnaire ne saurait déboucher sur une enquête, qu’il faudra mener ultérieurement.

Le malaise peut venir d’autres situations :
- « Devant certaines familles ».
- « Agressivité d’un résident »
- « La fille d’une résidente ».
- « Lorsque les résidents nous agressent verbalement et physiquement ».
Ceci renvoie de toute évidence au mécanisme de culpabilité/impuissance dont on a déjà parlé : le malaise provient là de ce que le soignant se trouve sans réponse, comme l’illustre l’extraordinaire réponse suivante : « Lorsque vous vous faites gifler sans raison par un résident il n’est pas possible de riposter œil pour œil dent pour dent ni même de lui adresser une remontrance car bien souvent c’est un geste réflexe témoignant son insatisfaction générale et non un geste qui vous est adressé personnellement ». Ici se trouve mis en scène toute la problématique de la maltraitance. On peut en effet raisonner de manière relativement simple dans le cas exposé, où le résident est considéré comme irresponsable : l’article 64 de l’ancien Code Pénal s’applique sans difficulté. Mais en règle générale les choses sont plus mêlées : il y a danger (et peut-être maltraitance) à considérer la personne âgée comme incapable, et c’est cela que le soignant ressent ici : il ne peut pas ne pas répondre (peut-être serait-ce même là une autre maltraitance), mais il ne parvient pas à trouver une réponse adaptée, peut-être parce qu’il n’y en a pas. On peut parfaitement soutenir que le résident est dans la vie, que la violence fait partie intégrante de la vie et qu’il y a danger à créer autour de la personne âgée un monde flou et cotonneux où tout serait rose et où il ne serait pas utile de respecter les soignants ; ce dont il est question c’est de créer autour de la personne âgée un environnement affectif, et cet environnement est fait à parts égales de tendresse et de fermeté. Le problème est uniquement dans les dangers d’une telle position. Il faudrait pouvoir rappeler commodément que le respect de la personne passe par la reconnaissance de ses droits, de ses devoirs et de leurs limites : l’intégrité de chacun est reconnue, y porter atteinte est sanctionné par le code pénal. Ne pas considérer l’acte (coups portés) comme délictueux consiste à nier le citoyen derrière le résident. Enfin il y a aussi dans ce témoignage la question de ce que peut faire le soignant de la maltraitance qu’il a ressentie ; certes il y a tout le soutien que ses collègues ou le groupe de parole peuvent lui apporter, mais cela peut-être ne suffit pas.

Notons enfin cette remarque, qui se suffirait presque à elle-même : « Prendre conscience que cela peut être un acte grave, qui met en danger deux personnes ». Cette splendide remarque pose tout de même question : quel rapport avec un sentiment de malaise ? Ceci, sans doute : le soignant qui s’exprime est en train de dire qu’il s’est senti mal à l’aise lorsqu’il s’est rendu compte d’une sorte de symétrie : en maltraitant l’autre il se maltraitait lui-même.

D’AUTRES MALTRAITANCES :

Question : Il n’y a pas que la maltraitance des soignants envers les résidents. Pouvez-vous en citer d’autres ?

L’idée de la question était de permettre aux soignants de sortir de leur isolement. Parler de maltraitance est toujours culpabilisant, puisqu’on a l’habitude de ne considérer que la maltraitance des soignants envers les résidents. Il s’agissait de leur donner les moyens d’en décrire d’autres.

On remarque d’abord que trois soignants ne répondent pas. Pourtant l’un d’eux vient de signaler « Agressivité d’un résident » à la question précédente.

L’un des soignants fait un constat terrible, sur lequel nous reviendrons : « La maltraitance est partout, visible et dure à supporter ». Il est possible qu’il ressente très douloureusement les actes de maltraitance des soignants, mais plus probablement il est sensible à une ambiance générale de rapports humains dans l’établissement (la société ?) : l’image qu’il en a est donc celle d’une communauté où l’agressivité est généralisée.

Les autres réponses se groupent aisément.

Il y a d’abord la maltraitance des résidents entre eux :
- « Les résidents entre eux ».
- « Les résidents peuvent être maltraitants : ex. : parler mal ».
- « Maltraitance des pensionnaires entre eux. ».
- « Entre résidents ».
- « Résidents/résidents » (trois fois).
- « Il y a aussi la maltraitance entre les résidents ».
- « Les résidents sont très souvent maltraitants entre eux ».
- « Des résidents envers les résidents ».
30% des soignants pointent ce fait.

Il y a aussi la maltraitance des résidents envers les soignants. Naturellement on peut contester cette définition, et se demander si elle doit être mise sur le même plan que la maltraitance des soignants envers les patients ou résidents ; le fait est que dans ce questionnaire 60% des soignants franchissent ce pas :
- « Celle des résidents envers les soignants ».
- « Les résidents peuvent être maltraitants : ex. : parler mal ».
- « Les résidents envers les soignants ».
- « Les résidents envers nous ».
- « Maltraitance des résidents et d’autres personnes envers les soignants ».
- « Quand un patient est très énervé, coups, griffures, tapes. ».
- « Résidents envers soignants ».
- « Il y a maltraitance des résidents envers les soignants ».
- « Il y a aussi la maltraitance des résidents envers les soignants » (trois fois).
- « La maltraitance des résidents envers les soignants lorsqu’ils abusent de votre patience par exemple ».
- « Résidents/soignants » (quatre fois).
- « Maltraitance des résidents envers les soignants » (deux fois).
Un soignant note que la maltraitance des résidents est « plus souvent verbale que physique : le physique est plus souvent lié à une maladie ». Tout en lui laissant la responsabilité de cette assertion, on peut relever que ce soignant analyse très finement la situation en repérant que la maltraitance physique signe une perte plus grande des repères sociaux.

Le comportement des familles envers les soignants est volontiers assimilé à une maltraitance :
- « Les familles contre les soignants ».
- « Les familles envers nous ».
- « Et la maltraitance des familles envers les soignants ».
- « Familles/soignants ».
- « Agressivité des familles rapport aux soignants ».
Cette maltraitance est durement ressentie, et on peut se demander ce qu’on doit faire de cette remarque : certes les soignants, étant professionnels, sont censés gérer la maltraitance reçue mieux que des familles en souffrance ; cependant ce qui est pointé là est une symétrie liée au fait que les familles sont aussi des aidants.

Les relations familiales sont souvent vécues comme empreintes de maltraitance :
- « Les familles envers les résidents ».
- « Les résidents envers leurs familles ».
- « Les familles envers eux ».
- « Et la maltraitance des familles envers leurs proches ».
- « Famille/résident ».
- « mais aussi les familles envers leurs propres parents ou d’autres résidents ».
20% de soignants en repèrent.

D’autres soignants notent la maltraitance des soignants entre eux :
- « Par contre, vis-à-vis des collègues ou de la hiérarchie, je penserais plus à du harcèlement ou une mauvaise entente. ».
- « Soignants envers soignants ».
- « Entre soignants » (six fois).
- « Entre collègues ».
plus précisément un soignant note : « des aides-soignantes envers les IDE ; aucun respect suivant les personnes. ».
30% de soignants en parlent.

Deux soignants relèvent la maltraitance des soignants envers les familles. Deux autres parlent de la maltraitance générale de la société : « Je pense plus à la maltraitance familiale (parents/enfants, /employeur/employée familiale » ; « Familiale, dans la vie sociale (ex. : vol à l’arraché, acte médicamenteux, etc...). ». Enfin un soignant pointe la maltraitance institutionnelle : « Le manque d’attention à l’autre et de pouvoir répondre à ses demandes à cause du stress ambiant. ».

L’impression qui se dégage de cette question est l’omniprésence surprenante de la maltraitance. Tout se passe comme si les soignants vivaient le monde qui les entoure comme profondément violent. Ce sont 60 situations de maltraitance qui sont repérées, en plus de la maltraitance des soignants envers les résidents. Il importe peu de savoir quelle est la réalité de ce phénomène : on ne s’avancerait guère en postulant que la maltraitance des soignants est très largement défensive et répond au désir de se protéger, ou de contre-attaquer dans un environnement hostile. On retrouve alors les trois composantes essentielles de tout comportement maltraitant : culpabilité, impuissance, sentiment d’insécurité.

LA RÉPONSE À LA MALTRAITANCE :

La séquence suivante visait à explorer les réactions face à la maltraitance.

Quand vous avez un doute sur une situation de maltraitance, que faites-vous ?

On proposait donc une série de réponses sur ce thème.

L’abstention :

La première était : « Je ne fais rien ». Malgré le danger qu’elle comportant, cette formulation négative était délibérée. On demandait ensuite « Pourquoi ? ».

8 soignants ne répondent pas, mais parmi ceux-ci l’un explique : « ça dépend », et un autre dit : « j’en discute avec les collègues ».

13 répondent qu’ils ne font rien, mais plusieurs donnent une explication :
- « J’en discute avec mes collègues les plus proches pour ne pas se baser sur un seul jugement et ensemble nous décidons d’intervenir soit auprès de la personne maltraitée ou de la hiérarchie ».
- « Pour arrêter immédiatement la situation, en rediscuter après un temps de pause et réflexion ».
- « J’essaie d’en parler entre collègues ».
- « Cela dépend de la situation ».
Il se peut bien sûr que les soignants en question n’aient pas su se repérer dans la formulation négative ; mais le plus probable est qu’ils ont considéré que ce qu’ils faisaient n’était pas une action. On en déduit ce que n’est pas « agir » pour ces soignants que de partager le doute avec des collègues, ou de transmettre à l’encadrement.

Un autre donne une explication plus intéressante : « Pour pas que la situation s’envenime » ; il y a là une crainte d’aggraver la situation qui pointe sans doute la nécessité de disposer d’une instance particulière pour gérer les phénomènes de maltraitance de manière efficace et raisonnée. L’un d’eux a rapporté une maltraitance liée aux soins refusés par le patient, un autre a parlé de ses difficultés à gérer les situations. Un autre craint d’être injuste : « Car comme je doute que ce soit de la maltraitance je ne peux affirmer » ; on reconnaît là l’un des mécanismes qui font méconnaître la maltraitance. Un autre parle de sa « Peur de dénoncer », pointant là un autre de ces mécanismes ; l’étonnant est que cette réponse n’apparaisse qu’une fois. Un dernier explique : « Un cas signalé une fois non résolu par les supérieurs » ; cette réponse demande à être méditée : d’une part ce soignant pense visiblement que, puisqu’il n’a pas vu de modification c’est que les « supérieurs » n’ont pas agi ; il n’a pas pensé que, peut-être, les « supérieurs » n’ont pas pu trouver de solution ; mais d’autre part, et surtout, il s’agit là d’un véritable appel de détresse : il faudrait que les « supérieurs » disposent d’une sorte de pouvoir magique leur permettant de résoudre toutes le situations, comme si leur impuissance valait trahison de la protection qu’ils doivent. Si cruelle est la souffrance liée à la maltraitance que ce soignant ne supporte pas l’échec de ceux dont il attend protection. Ceci pose un problème de communication : les « supérieurs » ne devraient-ils pas rendre compte à celui qui a été à l’origine d’un signalement de la suite qui a été donnée à la transmission de cette information, somme toute très importante, sans pour cela entrer dans les détails ? Signaler est très difficile, et l’est encore plus s’il n’y a aucun retour. Mais d’un autre côté on peut soutenir que le devoir du soignant qui est témoin d’un acte de maltraitance est de le signaler. Ce qui est fait de son signalement ne le regarde en rien, et il n’aurait pas, par exemple, à être juge d’une éventuelle sanction ; au vrai le fait de l’informer confinerait au voyeurisme.

Parmi ceux qui ont déclaré qu’ils ne faisaient pas rien, quatre ne précisent pas ce qu’ils font. Les autres répondent :
- « Pour éviter que cela aille trop loin » : il s’agit de répondre à une situation vécue comme une urgence.
- « J’en parle à la personne concernée ».
- « Suivant la situation j’en parle déjà aux collègues ».
- « Je le dis au médecin ».
Les actions proposées sont une verbalisation. Cette verbalisation paraît un élément important de la stratégie : « En parler si possible pour combattre une part obscure de mutisme, la peur de dénoncer et de faire du bourreau une victime. Si petite soit-elle une démarche ne sera jamais vaine » ; « Maltraitance = malaise/mal-être (de l’agresseur), ce qui implique action/soins » ; « de s’interroger, de rechercher des informations qui peut s’appuyer son doute ».
La raison de cette action est dite clairement une fois : « Parce qu’on ne peut tolérer la maltraitance. ». Il est à noter que ce soignant s’est jusqu’ici exprimé de manière très parcimonieuse.

Il est remarquable de noter que dans toutes ces réponses, quelle que soit la position prise lors de la première question (ne répond pas, dit qu’il ne fait rien, dit qu’il fait quelque chose) la quasi-totalité des actions proposées consiste dans une verbalisation. Les soignants ont conscience de l’enjeu majeur de la parole dans la stratégie de prise en charge de la maltraitance. C’est bien le silence et plus encore la solitude du témoin qu’il convient de briser, ce qui renforce l’idée que la création d’une instance de gestion de ces phénomènes est une urgence. Reste à savoir comment on peut le faire.

Le partage :

La seconde proposition était : « Partager le doute avec les collègues ». Ici les choses sont beaucoup plus tranchées, puisque quatre soignants seulement ne répondent pas et deux seulement répondent non. Il faut noter que parmi ceux qui ne répondent pas un commentera : « D’en parler de ses suppositions, d’en rechercher, de connaître les causes », ce qui permet de penser qu’il s’agit d’un oubli. D’autre part, s’agissant de ceux qui répondent qu’ils ne s’en ouvrent pas aux collègues, tous les deux ont répondu à la question précédente qu’ils ne faisaient pas rien. Le premier commentait en disant : « Parce qu’on ne peut tolérer la maltraitance », le second en disant : « Suivant la situation j’en parle déjà aux collègues ». Donc la réponse du second est probablement une inadvertance ; quant au premier on peut présumer que s’il n’en parle pas c’est parce que pour lui, et sans doute un peu imprudemment mais c’est une autre histoire, les choses sont claires.

Tous les autres en parlent aux collègues. Les justifications, quand elles sont données, sont de plusieurs ordres :

Une première réponse est particulièrement instructive : « Cela concerne tout le service et ils savent sans doute des choses que l’autre ne connaît pas. Juger ensemble s’il faut intervenir » ; ici la notion intéressante est le caractère collectif des situations de maltraitance. Il faudra se demander pourquoi ; mettons ici comme pierre d’attente que ceci rappelle ce qui se passe dans les sociétés tribales, dont la conscience collective l’emporte sur la conscience individuelle au point que souvent leur langue n’a pas de pronom personnel singulier : chez les Touareg quand un membre du clan est assassiné cela se dit : « Notre sang a été versé ». Ainsi la maltraitance est d’emblée un mal fait à la collectivité, non à l’individu, et la réponse ne peut être que collective. Ce n’est pas un soignant isolé qui peut résoudre le problème.

D’autres veulent comparer leurs informations pour éliminer le doute :
- « Pour connaître l’avis des autres, pour recouper des situations ».
- « Pour une meilleure interprétation, afin d’être sûr de notre opinion ».
- « Être bien sûr de ne pas se tromper, voir si les collègues ont le même point de vue ».
- « Pour s’assurer du bon fondement de son soupçon ».
- « Pour avoir l’avis des autres et voir si mon idée était la bonne ».
- « Confronter d’autres visions pour une meilleure objectivité. Chercher l’adhésion de nos craintes pour exclure toute injustice ».
- « Recueillir des preuves ».
- « Pour être sûr du fait ».
Le doute, la crainte de commettre une injustice sont très présents et montrent le désir de ne pas réagir à chaud.

La recherche collective d’une solution est également très importante :
- « Pour trouver des solutions ».
- « Le dialogue nous permet de discuter de la situation, d’agir ».
- « Deux avis valent mieux qu’un et nous travaillons en équipe ».
On trouve ici une notion presque socratique : la solution ne peut se trouver que par une élaboration en commun, n’est juste que ce sur quoi on peut se mettre d’accord.
- « Pour essayer de comprendre et trouver quelques solutions ».
- « Mieux comprendre la situation ».
Ici affleure un autre thème qui est la nécessité de comprendre la maltraitance : certes elle doit être traitée pour elle-même et rien ne peut l’excuser, mais une attitude purement répressive ne suffirait pas.

S’il y a des réponses qui ne sont que circulaires : « J’en parle avec mon collègue » ; « Savoir ce qu’ils en pensent », d’autres ouvrent sur des perspectives plus étranges :
- « Par culpabilité et trouver une solution ; pour en parler et être entendu par autrui ». Certes il peut s’agir là de la maltraitance exercée par le soignant lui-même, mais on croit entendre ici que même lorsqu’il n’en est pas l’auteur le soignant qui est témoin d’une maltraitance en épreuve une vague culpabilité. Culpabilité peut-être de ne pas avoir agi mais aussi culpabilité de concourir à créer un monde où la maltraitance est possible, mais plus radicalement peut-être parce que la faute de la maltraitance a toujours quelque chose de mystérieusement collectif.
- « Pour être sûre de mes impressions et pour se libérer d’un poids ». On entend ici à peu près la même chose : l’aveu libère de la faute, même quand il n’y a pas de faute.
- « On en parle souvent, et sentiment d’impuissance et culpabilité ». C’est la même remarque. Ajoutons ici que le soupçon se fait plus précis : on parle souvent de maltraitance, ce qui indique que le phénomène est d’une fréquence insoupçonnée.
- « Protéger les sentiments ». Cette phrase un peu énigmatique met en évidence le fait que le soignant témoin d’une maltraitance pourrait se sentir en danger : le spectacle de la maltraitance est si violent qu’il induit une souffrance dont le poids demande une prise en charge par la collectivité.
- « Pour savoir si les collègues sont maltraités ou réagissent aux mêmes réactions que les résidents. ». On croit entendre ici que la maltraitance pourrait avoir quelque chose de contagieux.

En somme la maltraitance n’est pas considérée par les soignants comme un événement intéressant seulement le maltraitant et le maltraité. Ce n’est pas (ou pas seulement) parce qu’on pense que la maltraitance résulte d’une situation générale qui favorise son éclosion, et dont toute la communauté porte peu ou prou la responsabilité, mais plutôt parce que la maltraitance, par nature, est un phénomène de groupe. Le maltraitant est vécu comme un symptôme, et la maltraitance est une sorte de calamité dont nul ne serait à l’abri, que ce soit comme victime potentielle ou comme bourreau en puissance. Répétons-le : la bonne grille de lecture est sans doute celle des sociétés archaïques, dans lesquelles la personnalité collective l’emporte sur la conscience individuelle. C’est que la violence est une occurrence où la conscience d’être tend à se dissoudre, ce qu’au reste chacun éprouve lorsqu’il perd son calme.

La référence à la hiérarchie :

La troisième proposition était : Transmettre à l’encadrement.

7 soignants (20%) ne répondent pas. L’un commente cependant :
- « Pour l’équipe ; pour une continuité des soins ».
- Un autre : « Si on ne peut régler le problème en équipe, oui ».
- Un autre : « Parfois mais rarement : peur des retrouvailles, peur de la suite des événements ».
- « L’importance de l’équipe, d’en parler, de se renseigner ».
Cela fait supposer que leur non-réponse est un oubli. Notons qu’un seul soignant fait état de son souci pour la cohésion de l’équipe et de la crainte de représailles (On peut naturellement penser que le mot « retrouvailles » est mis ici par erreur à la place de « représailles ». ; mais les erreurs sont rarement gratuites : ce que ce soignant a écrit, c’est qu’il est difficile à l’équipe de survivre après que l’un d’entre eux ait failli à l’ « esprit de corps » ; c’est d’ailleurs ce qu’on entend souvent lorsqu’il s’agit de régler un conflit dans une équipe : « Je ne veux pas qu’il y ait une mauvaise ambiance ».) s’il dénonce un comportement déviant. D’un côté il faut du courage pour avouer cette crainte, de l’autre on avait cru comprendre dans de conversations privées que cette crainte est beaucoup plus présente.

4 soignants ne transmettent pas à la hiérarchie. L’un ne dit pas pourquoi. Pour les autres les raisons sont le désir d’agir d’abord discrètement : « J’en parle d’abord avec la collègue », mais aussi la crainte d’accuser à tort : « Difficile de raconter situation et contexte exact », et enfin la frustration de ne pas voir sa démarche aboutir : « Pas toujours bien écouté j’ai l’impression ». Notons que ce soignant répondait à la question Partager le doute : « Par culpabilité et trouver une solution ; pour en parler et être entendu par autrui », signifiant par là que l’écoute est meilleure de la part de l’équipe que de la part de l’encadrement. Celui qui déclarait : « Un cas signalé une fois non résolu par les supérieurs » transmet cependant à l’encadrement (« Oui, parfois ») en justifiant : « Ce sont nos supérieurs ».

Les autres soignants transmettent, mais ils ne sont donc que 2/3. Leurs justifications sont de plusieurs ordres :

On retrouve tout d’abord l’idée que la gestion de la maltraitance est affaire de groupe : « Dans l’intérêt de tous » ; « Il faut en parler en groupe, c’est plus facile pour essayer de trouver une solution si cela peut se faire » ; « Il ne faut pas rester sur un doute, tout le monde doit observer pour aboutir à une conclusion ». Ici l’idée est que l’encadrement fait partie du groupe : c’est donc tout l’établissement qui se trouve partie prenante.

Certains pensent que l’encadrement dispose d’une compétence supérieure : « Capacité à mieux gérer la situation délicate » ; on peut naturellement se demander s’il s’agit d’autre chose que du désir de se défausser d’une responsabilité, mais il est plus probable que face à la douleur engendrée par la maltraitance la hiérarchie se voit investie d’une sorte de pouvoir magique, la relation tendant ici à se calquer sur une relation parents-enfants : « Pour pouvoir améliorer certains cas, prévenir » ; « Une réaction, une situation particulière peut révéler un mal-être d’un résident, ou à A.-S. » (on trouve ici l’idée que la lutte contre la maltraitance va peut-être imposer de faire une sorte d’effraction dans l’intimité du maltraitant ; le caractère lui-même violent de cette effraction impose le recours à l’autorité) ; « Toujours en vue de trouver des solutions » ; « Pour remédier à la situation ; que ça ne se reproduise plus ; élucider la complexité des comportements » ; « Essayer de résoudre le problème ».

Ailleurs il s’agit clairement de prendre des mesures disciplinaires : « Pour éviter que cela se reproduise » ; « Toujours parce qu’on ne peut tolérer la maltraitance » ; « Si les soupçons sont fondés cela permet de protéger la personne concernée par la maltraitance ». Notons ici le caractère ambivalent du propos : la personne concernée par la maltraitance, c’est le maltraité, mais c’est aussi le maltraitant ; ce sont les deux qu’il faut protéger de la maltraitance.

Enfin certains soignants précisent à qui ils transmettent : « Sinon, M. C... (le Directeur de l’Établissement) » ; « Médecin » ; « Surtout au médecin ». Notons ici que le recours au médecin est une sorte de compromis : le médecin n’a aucun pouvoir disciplinaire, mais il fait partie à la fois de l’équipe soignante et de l’équipe dirigeante, ce qui le met en position symbolique de messager, ou de médiateur.

La position des soignants vis-à-vis d’une éventuelle répression de la maltraitance est donc ambiguë : d’un côté c’est à bon droit qu’on insiste sur la complexité des situations, de l’autre il semble que l’idée que la maltraitance est d’abord un fléau à éradiquer par une attitude sans complaisance de chacun a encore beaucoup de chemin à faire.

Autre réponse :

Une dernière option, libre, était proposée. Elle n’a pratiquement pas été utilisée. Un seul soignant note : « Essayer à tout prix de rompre le silence » et justifie en disant : « Il existe toujours une solution. Tout préjudice doit être réparé. ». Un autre, qui n’a pas répondu, note cependant : « Dans ce domaine nous sommes toujours en recherche de mieux. ».

Suite dans : "Une enquête sur la maltraitance : II"