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En réponse à :

L’ADMD et le ridicule

, par Michel

Bonjour.

Après avoir hésité je prends la décision de publier votre mail. J’ai hésité, pour la première fois depuis l’ouverture de ce site, parce qu’il s’agit d’un lieu d’échange, de dialogue, de confrontation, éventuellement rude ; je ne suis pas disposé à y laisser une grande place à l’injure.

Mais je me suis dit qu’il y des injures qui se ridiculisent d’elles-mêmes, et qui du même coup ridiculisent, non seulement leur auteur, ce qui n’a guère d’intérêt, mais la cause qu’elles se figurent servir ; or je me demande si vous avez pris garde au fait que ce forum est lu, que ces lecteurs (trop peu nombreux pour avoir un poids dans le débat, mais suffisamment pour que vous trouviez un intérêt à vous y exprimer) ont un cerveau. Ils jugeront. Pour ma part je constate que les choses ne bougent guère : il existe sur ce site plusieurs exemples de discussion avec des partisans de l’euthanasie ; les choses se passent toujours de la même manière : le plus souvent l’interlocuteur ne tarde pas à prendre la fuite, et quand il ne le fait pas il en vient bien vite aux seules armes dont en réalité il dispose : la haine, l’insinuation, la calomnie. Derrière son vernis de sérénité et de hauteur de vue, l’ADMD n’en montre pas beaucoup d’autres ; c’est dommage : le débat mérite mieux.

Bref, lisons votre message. Il y a quatre paragraphes.

À l’un de mes commentaires :

J’ajoute (libre à vous de vous sauver en me suspectant de ne pas savoir écouter les malades, ou de ne pas savoir les regarder) que je n’ai jamais été confronté à une demande ferme d’euthanasie de la part d’un malade.

Vous répondez :

Oui, de la même façon : aucun chirurgien n’a jamais entendu d’objection de l’opéré qu’il avait sur la table d’opération. Même quand il se trompait de jambe à amputer.

Cette réponse est tout simplement fascinante.

Passons rapidement sur le fait qu’en soi elle n’a aucun sens : il y a beau temps que les chirurgiens ont pris l’habitude de discuter avec leurs patients (du moins y en a-t-il suffisamment pour que chacun puisse en choisir un qui ait cette intelligence). Or nous parlons d’écouter les malades. Et s’agissant de l’opéré qui est sur la table, s’il n’est pas endormi il peut parler et s’il l’est la question ne se pose plus.

Mais là n’est pas l’important : elle est dans l’idée que vous semblez vous faire d’un malade en fin de vie. La seule image que vous trouvez est donc celle d’un opéré sur une table ; comme s’il s’agissait de l’opérer ; comme s’il se trouvait incapable de parler, de dire sa volonté, de communiquer avec son entourage. Il faut sans doute se trouver hanté par une bien grande terreur de la mort pour véhiculer de telles fantasmagories. La réalité est que la fin de vie est une période de vie intense, au cours de laquelle le malade, pour peu qu’on se donne les moyens de lutter contre les causes de ses éventuels inconforts, communique de façon très claire. Il est même tout à fait capable de dire où il en est, même de dire qu’il consent à la mort. Mais une demande d’euthanasie c’est autre chose : c’est un malade qui dit, non seulement qu’il s’est fait à l’idée de mourir, non seulement qu’il aimerait que la mort vienne, mais encore qu’il veut qu’elle lui soit donnée. Or, dans ma pratique, tant celle du gériatre que celle du médecin de soins palliatifs, je n’ai jamais entendu ces mots. Il arrive que nous discutions d’euthanasie avec les malades ; j’ai pris la peine de compter ces discussions, cela concerne environ 2% des patients ; mais ces discussions ont toujours lieu à l’arrivée du patient, jamais au moment où la question pourrait se poser réellement. C’est pourquoi je crois, comme beaucoup (et même si cela ne dispense pas le médecin d’y participer loyalement), que dans ces discussions d’arrivée on parle en fait d’autre chose.

Parmi les inepties du discours de l’ADMD, il y a celle-ci : Elle veut un droit ouvert à ceux qui le veulent, parce qu’ils jugent leurs souffrances physiques ou psychiques insupportables, un droit en faveur de la liberté individuelle. (communiqué du 14 février 2012) Il faut avoir une singulière conception de la liberté pour se figurer qu’un malade en proie à des souffrances insupportables dispose d’une quelconque liberté. Quand un malade souffre il faut le soulager, nous savons le faire ; on pose les questions après.

Bref ce qui est fascinant dans cette réponse, c’est non seulement l’incroyable méconnaissance de la réalité mais surtout le mépris qu’elle professe à l’endroit des malades en fin de vie, qui sont tout ce qu’on veut sauf des morceaux de viande sur un étal. On comprend mieux dans ces pourquoi la seule réponse qu’on envisage soit de leur faire débarrasser le plancher.

Mais continuons.

À un autre de mes commentaires :

Dois-je comprendre que pour vous aussi il est évident que je n’aime pas les malades ?

Vous répondez :

Si, si, vous les aimez, pas de problème là-dessus. Vous les aimez, comme un chasseur aime son chien, comme un veau aime la vache qu’il tête, qu’elle soit sa mère ou pas. C’est votre gagne-pain. Que vous fassiez votre boulot, très bien. Que vous profitiez de la situation pour augmenter votre chiffre d’affaire, un peu artificiellement, sur des personnes en situation d’extrême détresse, c’est absolument honteux.

Voici la raison pour laquelle j’ai pensé à ne pas publier votre mail. Car à cette sottise j’ai déjà répondu de façon très claire ; et je vous avais demandé de la retirer, car une discussion suppose des interlocuteurs honnêtes, et je n’ai pas de temps à perdre avec les autres.

Je vais donc vous le redire une dernière fois. Je suis salarié du service public hospitalier, je n’ai jamais eu de secteur privé, et je vous défie d’expliquer par quel miracle je pourrais tirer un quelconque bénéfice financier d’une activité de soins palliatifs. J’ajoute que ma situation sur ce point est celle de la quasi-totalité des professionnels de la discipline, où on ne rencontre guère que des salariés du service public ou des associatifs également salariés et sans activité privée.

Quant à savoir si oui ou non j’aime mes patients, vous ne pouvez pas plus que moi le dire. J’observe simplement que vous en jugez.

Vous me parlez ensuite de la justice, et vous m’offrez là un festival.

Collusion entre magistrats et soins palliatifs, il n’y a pas besoin de supposer cela, les magistrats appliquent la loi. Point. Par chance, comme ils ont largement à faire ailleurs, ils ne s’occupent des cas d’euthanasie, que s’ils n’ont vraiment rien d’autre à faire.

Votre mépris s’étend donc à la magistrature ; j’en prends note. Mais je relève surtout la sottise principale : les magistrats appliquent la loi. Dire cela c’est ne rien comprendre à ce qu’est la justice. Car s’il ne s’agissait que d’appliquer la loi, on n’aurait aucun besoin des juges : ce qui applique la loi c’est le radar. Les juges sont là, précisément, pour évaluer de quelle manière on va appliquer la loi, ce qui revient à dire qu’ils sont là pour évaluer de quelle manière on va ne pas l’appliquer. Quant à dire qu’ils ne s’occupent des cas d’euthanasie que s’ils n’ont vraiment rien d’autre à faire, outre que cela dénote une ignorance du système judiciaire au moins aussi crasse que celle que vous manifestez au sujet du système de santé, cela montre que votre mépris s’étend bien vite aux juges, qui selon vous s’occupent des affaires d’euthanasie pour passer le temps. De tels propos poussent à se demander ce que vous mettez sous les mots de liberté et de démocratie.

Mais les tenants de soins palliatifs profitent de toutes les occasions pour faire du buzz et tenter de faire prospérer leur bizness, alors les magistrats s’en occupent forcément.

Le feu d’artifice continue. Les professionnels du soin palliatif font du buzz. Je note donc que ce sont eux qui ont placé Chantal Sébire sur le devant de la scène, ce sont eux qui ont publié le livre de Vincent Humbert le jour même où sa mère lui donnait ses barbituriques, ce sont eux qui ont fait connaître le drame d’Hervé Pierra… Souhaitez-vous que je continue ? sur cette question s’il y a buzz il est le fait de l’ADMD ; s’il y a lobby, il est du côté de l’ADMD. Mais je dois reconnaître qu’aucun ridicule ne vous fait peur.

Mais avec tact et humanité, autant que j’ai pu en juger, au grand dam des tenants des soins palliatifs. Mais il n’empêche que ce sont des soucis pour ceux qui se voient chercher des poux dans la tête pour avoir aidé un de leur proche à trépasser.

Voilà à quoi vous en êtes réduit. Essayez donc, si vous le pouvez, de me produire un seul élément attestant d’une intervention quelconque du mouvement des soins palliatifs dans la procédure judiciaire intentée à l’encontre du Dr Tramois ; ou du Dr Bonnemaison. Et bien vite il ne vous restera plus que la minable hypothèse du complot ourdi dans l’ombre entre le Procureur, l’Archevêque et le Président du Conseil de l’Ordre.

Quant à votre conclusion :

Je persiste évidemment à affirmer que les "soins palliatifs" pensent d’abord à leur portefeuille. Et je précise : il n’est pas honteux de fournir un service à ceux qui le demandent et de se faire rétribuer pour cela, ce qui est honteux de la part du lobby des soins palliatifs, c’est de vouloir augmenter son chiffre d’affaire, (auprès de personnes en situation de fragilité, de surcroît).

Je n’ai pas à y répondre, l’ayant déjà fait. Vous en arrivez bien vite à vous répéter, ce qui ne se produirait sans doute pas pas si vous aviez autre chose à dire. J’aurais préféré lire vos commentaires sur les propos de M. Romero au sujet d’Hannah Jones ou d’Eluana Engaro, puisqe j’attends toujours qu’un adepte du lobby pro death ait enfin le courage de le faire.

Bien à vous,

M.C.

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