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En réponse à :

La souffrance en fin de vie

, par Michel

Bonjour, Laura.

Je ne pourrais vous répondre que si je savais exactement ce qui se passe. En pratique cela supposerait que j’aie pu examiner le malade. Faute de remplir cette condition, je ne peux vous parler que d’un point de vue théorique.

Or il y a une hésitation : vous écrivez : à sa dernière irm on m’a dit qu’il n’y avait plus rien à faire. Cela pose deux questions au moins :
- De quand date cette IRM ? En général il est totalement futile de faire une IRM à un malade en fin de vie. Soit donc l’IRM date déjà de quelques semaines ou mois, soit nous ne sommes pas tout à fait en fin de vie. La troisième hypothèse est que nous aurions affaire à une équipe médicale dont le raisonnement n’est pas cohérent ; cela se produit.
- Que signifie : Il n’y a plus rien à faire ? Si c’est pour dire que rien ne peut plus éviter l’issue fatale, je comprends. Mais à condition que les personnes qui ont prononcé ces mots ne se désintéressent pas de la suite : c’est toute la raison d’être des soins palliatifs que de démontrer que c’est quand « il n’y a plus rien à faire » que le travail devient le plus exigeant.

Plus loin, vous décrivez le malade comme somnolent. Il peut se produire que la somnolence soit liée à autre chose que la tumeur elle-même, à un facteur incident sur lequel on pourrait jouer, mais il ne faut pas se faire trop d’illusions. Par exemple il pourrait s’agir d’un médicament mal toléré ; encore faudrait-il qu’on puisse s’en passer. Ou alors il somnole parce qu’il fait des crises d’épilepsie à répétition, même si elles passent inaperçues ; mais cela signifie tout de même quelque chose sur l’agressivité de la tumeur. Ou alors il y a une autre pathologie (infectieuse, par exemple) ; mais chez un sujet jeune cela indique tout de même une faiblesse inquiétante. Bref la somnolence est un signe assez fidèle que nous sommes près de la fin.

Du coup il y aurait une contradiction entre le fait que le malade somnole et le fait qu’il aurait eu une IRM récente. Ou alors il y a une explication qui m’échappe.

Bon. Si je comprends bien il est revenu à domicile, et il n’est pas prévu de le réhospitaliser. Ce point me pousse à penser que le plus probable est tout de même que les choses vont très mal.

Ce qui entraîne la somnolence, c’est l’œdème qui se produit autour de la tumeur ; et il n’y a que deux possibilités d’agir.

La première est d’augmenter le traitement corticoïde. Et l’augmenter massivement. J’y insiste car si nous sommes en fin de vie les modalités d’utilisation des médicaments ne sont pas les mêmes, et en matière de doses le gramme remplace couramment le milligramme. La difficulté théorique est que les corticoïdes pourraient venir aggraver l’épilepsie, mais il reste à savoir si on a le choix.

La seconde est de diminuer l’hydratation de la tumeur :
- En utilisant des perfusions de sucres très particuliers.
- En diminuant l’hydratation globale.

C’est sans doute le raisonnement du médecin traitant. Si c’est le cas il se pourrait bien qu’il soit dans le vrai.
Il y a un autre point à considérer. C’est qu’il est bien rare que ce type de malade n’ait pas eu de chimiothérapie. Si c’est son cas, alors il serait étonnant qu’on ne lui ait pas posé de chambre implantable, permettant d’administrer commodément des perfusions intraveineuses. Et si on dispose de cet abord veineux, alors la plupart des médicaments vont pouvoir être passés par ce moyen, ce qui permet d’augmenter les doses sans scrupules et de ne plus importuner le malade.

Reste à se demander ce que vaut votre remarque : faut-il respecter son refus. Sur ce point vous en savez plus long que quiconque, mais le chagrin peut fausser votre jugement. En tout cas si vous avez raison de penser qu’il refuse les soins, alors la question ne se pose plus, et il est impératif de respecter ce choix.

Bref je dirais ceci :
- Le plus probable est que nous sommes effectivement très près de la fin.
- Dans ces conditions, ce qu’on fait et ne fait pas n’a pas une grosse influence sur le résultat final.
- Mais le plus logique est de ne rien faire du tout.
- Sans oublier que, puisqu’il faut bien en parler, je souhaite à beaucoup de malades de s’éteindre ainsi dans un coma somme toute calme est sans douleur. Piètre consolation, mais que je vous offre quand même, faute de pouvoir offrir autre chose.

Mais surtout, surtout, n’oubliez pas que je parle d’un malade que je n’ai pas vu.

Bien à vous,

M.C.

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