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En réponse à :

Le diabète en fin de vie

, par Michel

Bonsoir, Ines.

La question que vous posez est passionnante, parce qu’elle permet de voir toute la problématique des soins palliatifs.

Il me semble qu’il y a deux questions préalables.

La première est : quel est votre pronostic ? De quoi parlons-nous ? S’agit-il d’un patient en soins palliatifs ?
- Il peut être en soins palliatifs parce que de toute manière il n’y a plus d’espoir d’améliorer la situation. Pour autant la mort n’est pas là, sa venue dépend d’une complication qui viendra quand elle viendra. Dans ce cas on doit partir du principe qu’il reste du temps.
- Ou alors il peut être au bout du bout, avec une mort imminente et un pronostic qui se compte en jours.
De ce point de vue, la question ne se pose que si vous êtes dans la première situation : il s’agit alors d’un malade certes en fin de vie, pour qui certes on va limiter les soins à ce qui vise à améliorer la qualité de vie, mais on n’est pas en soins palliatifs terminaux ; j’emploie à dessein cette terminologie un peu passée de mode mais à laquelle je tiens.

La seconde question est : que dit le malade ? Peut-il dire quelque chose ? Peut-il avoir une opinion ? S’il est en état de parler, et s’il semble en état de donner un avis éclairé, il n’y a rien d’autre à faire que de suivre sa décision.

Et un troisième point :

Si ce malade est en soins palliatifs à domicile, je n’imagine pas une seule seconde qu’il n’y ait pas autour de lui une équipe. J’ai fait beaucoup de choses à domicile, mais pas seul.

Ceci posé, faisons un peu de médecine.

Vous découvrez un diabète à 82 ans. Cela me pose immédiatement une question : s’agit-il d’un diabète iatrogène (cortico-induit par exemple) ? Si c’est le cas, l’état du malade permet-il de suspendre ce traitement ?

Il y a des signes de décompensation, notamment la polyurie. L’HbA1c est effectivement très haute. Si donc vous décidez de ne pas traiter, il y a de fortes chances pour que votre malade n’aille pas très loin. Dans ces conditions votre stratégie est nécessairement liée à votre pronostic général : si votre malade a deux semaines devant lui, vous n’avez guère à faire de traiter le diabète. Si le pronostic est moins mauvais (et si le malade en est d’accord), alors il faut envisager de traiter.

Il y a deux raisons de traiter.

La première est de prolonger la vie du malade. Il faut que sa qualité de vie le rende opportun. Par contre je crois que si vous décidez de traiter il faut traiter. Je veux dire par là que je n’aime pas l’idée du Daonil faible. Avec des produits faibles vous n’aurez que des résultats faibles ; d’autre part les sulfamides de ce type vous feront toujours courir un risque majeur d’hypoglycémie grave. Bref, entre le trop et le trop peu vous allez multiplier les risques. Si donc vous décidez de traiter, c’est l’insuline.

La seconde est d’améliorer le confort du malade. Et de ce point de vue les choses sont claires : l’un des symptômes les plus pénibles de la fin de vie est aussi l’un des symptômes les plus pénibles du diabète, il s’agit de l’asthénie. Et l’insuline est le seul traitement qui permette d’améliorer l’asthénie. Si donc vous décidez de traiter, c’est l’insuline.

Reste à savoir comment on procède pour limiter les inconvénients de cette proposition. Et je crois que vous pouvez le faire en utilisant une insuline retard de nouvelle génération, dont la cinétique très améliorée permet, avec une seule injection par jour, d’avoir un effet suffisamment régulier. Quant à la surveillance, je vous proposerais volontiers dans ce contexte de ne pas faire de glycémie capillaire, et de vous régler sur la glycosurie (après avoir, bien entendu, vérifié que la fonction rénale n’est pas trop catastrophique). Comme vous le savez le glucose passe dans l’urine à partir d’une glycémie supérieure à 1,6 g/l ; si donc vous réglez votre traitement pour avoir une glycosurie faible mais non nulle vous éviterez les hypoglycémies et vous vous retrouverez avec une glycémie moyenne autour de 2 g/l, largement inférieure à ce qui déclencherait une décompensation diabétique.

Mais, je vous le répète, cela suppose que vous ayez préalablement répondu à deux questions :
- Que veut le malade ?
- Quel est votre pronostic ?

Bien à vous,

M.C.

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