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En réponse à :

Le grabataire DFT en fin de vie et son aidant

, par Michel

Bonsoir, Carole.

Je me sens bien pauvre.

J’éprouve de manière plus intense que jamais cette vérité qu’on oublie généralement : le fait que je vous accompagne implique que je ne sais pas où nous allons. Je vous accompagne, je ne vous guide pas, c’est vous qui choisissez le chemin.

C’est étrange. Vous accompagnez votre homme, et moi je vous accompagne.

Je vous dis ça parce que je vois bien que (comment pourrait-il en être autrement ?) votre position oscille ; il y a quelque temps vous étiez en forte demande de solutions, qu’elles soient juridiques ou autres ; puis il y a eu cette séquence, que j’ai tant admirée, où vous aviez entrepris de lutter au jour le jour ; j’imagine bien que vous n’avez pas cessé de le faire, mais ce qui me semble dominer aujourd’hui c’est votre épuisement et votre désespoir. Soit. Je vous suis sur ce chemin.

Vous écrivez : DFT à un stade avancé ; mais c’est là un point sur lequel je n’ai jamais pu me faire une opinion. Je vous ai dit combien cette maladie est piégeuse, parce que pendant longtemps les patients ont des fonctions intellectuelles qui semblent plutôt préservées, de sorte qu’on sous-estime la gravité du trouble. Il est d’ailleurs banal que les proches passent sans crier gare du déni au catastrophisme parce que la réalité de la situation est difficile à appréhender. Jusque récemment vous pensiez que ses fonctions supérieures étaient préservées, disons à 80%. Était-ce une illusion ? Ou bien, quand vous parlez de stade avancé, ne faites-vous que reprendre les propos qu’on vous tient sans y adhérer personnellement ? Quelque chose me dit que c’est entre les deux, et que vous sentez que l’évolution est là, plus lourde qu’imaginé. Est-ce pour autant un stade avancé, je ne sais pas.

Il le faudrait pourtant, car on vous parle de deuil blanc. Déjà, ça n’a pas de sens : le deuil blanc est celui qu’il faut bien faire quand le dément perd la faculté de reconnaître ses proches, interrompant ainsi la relation affective. Ce n’est absolument pas le cas, je dirais même que si votre ami ne vous reconnaissait plus, alors une partie de son problème serait réglée. D’autre part il s’agirait tout de même de savoir si une autre solution est, au moins théoriquement, possible pour lui, ce qui renvoie à la question précédente. J’ai toujours gardé cette hypothèse sous le coude : il se peut que son état soit tel qu’il ne tirerait plus aucun bénéfice significatif d’une admission dans un établissement plus adapté. Or une chose est de vous recommander d’entrer dans un deuil qui s’impose à vous, une autre est de vous conseiller de faire votre deuil d’une revendication légitime.

Toujours est-il qu’il s’éloigne de vous. Et si je comprends bien il se comporte comme s’il se rendait compte de la charge qu’il vous impose. C’est alors sa tristesse, sa résignation, sa détresse qui déteignent sur vous. C’est nécessairement très dur.

Ce qui me semble certain, c’est que rien ne peut lui être plus précieux que votre présence ; même si elle vous semble inefficace, elle ne l’est pas.

Je crois que je vous avais parlé de http://www.medicalistes.org/alois/.

Bien à vous,

M.C.

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