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En réponse à :

L’agonie

, par Michel

Bonsoir, Bénédicte.

Ce que vous vivez tous est inhumain, en effet. Et vous vous demandez comment il se fait que votre mère "tient" encore.

Les deux questions sont liées, mais pas peut-être comme vous le pensez. Car ce que vous cherchez (c’est toujours ce qu’on cherche), c’est un sens à cette histoire. Il ne faut pas oublier qu’en fait elle n’a probablement aucun sens. Ou du moins elle n’a que le sens que vous lui donnez, que le sens que vous élaborez tous ensemble. L’histoire est inhumaine parce qu’elle n’a pas de sens ; or le rôle de l’humain est de donner du sens à un monde qui, de lui-même, n’en a pas.

Votre mère tient parce qu’elle tient. La seule question est de savoir s’il est encore possible de faire quelque chose de ce temps.

Il y a le problème des douleurs. Ou plutôt des plaintes ; car, comme je vous l’ai dit, il n’est pas si fréquent que la douleur soit un gros problème dans les tumeurs cérébrales. Donc il faut se demander :
- Si la douleur est liée à la tumeur.
- S’il ne s’agit pas d’une de ces douleurs qui appellent d’autres traitements que la morphine ; en principe une équipe de soins palliatifs doit y penser, et doit savoir le traiter. Mais, et je parle d’expérience, il arrive qu’on passe à côté d’une évidence.
- S’il ne s’agit pas d’autre chose que d’une douleur.

Mais peu importe au fond. Si on ne trouve pas de solution, et si l’inconfort de la patiente est trop grand, alors il est toujours possible, et vous avez raison d’y penser, d’envisager une sédation qui, au moins, fera qu’elle n’assiste pas à ce qui se passe. Mais, comme vous dites, il y a aussi l’amour que vous lui donnez, de sorte que ce type de décision relève d’une discussion avantages/inconvénients qui est tout sauf simple à mener.

Quant aux escarres, j’aurais tendance à dire que dans une situation comme celle que vous vivez elles signent l’effondrement du patient, et annoncent un décès très proche. Ce n’est pas l’équipe qui a baissé la garde, ou fait une erreur : l’escarre dans ce contexte est inévitable.

Je suppose que les soins sont réduits au minimum : plus rien à ce stade n’est obligatoire.

Un dernier mot, que je ne sais pas expliquer : l’état dans lequel vous êtes, avec, au fond, cette pensée que vous n’osez pas vous formuler parce qu’elle est culpabilisante, que maintenant il faut que ça cesse, est dans mon expérience l’indice le plus sûr que, justement, ça va cesser très vite.

Je vous souhaite de garder tout votre courage dans ce qui s’avance à grands pas.

Bien à vous,

M.C.

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