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L’agonie

Cher docteur,
Comme l’ensemble des personnes ayant laissé un message sur cette page, je tiens à vous remercier à mon tour pour cette description et cette analyse très éclairante de l’état agonique qui, si elles n’apportent aucune réponse affirmative, éclairent néanmoins nos esprits endoloris.
Je ne puis m’empêcher, en passant, de m’étonner du désintérêt majoritaire du milieu médical au sujet de toutes ces questions, comme si la mort (son processus fatal et l’éternité qui suit) était relégué à de l’ésotérisme et à des histoires de fantômes... Je ne suis ni croyant ni mystique mais je crois très fortement, pour l’avoir vécu ces dernières semaines, aux "forces de l’esprit", à la communication par d’autres langages que la parole ou le geste. Quand donc la science, si cartésienne, sortira-t-elle de son pragmatisme ? Pouvons-nous envisager de comprendre pleinement le vivant si l’on délaisse la mort et ses mécanismes secrets ?

Suite à votre texte, j’ai deux questions à vous poser.
Ma grand-mère est décédée hier soir (à 75 ans) dans une chambre d’hôpital où elle est entrée le 31 juillet dernier soit-disant pour une simple déshydratation, une sous-nutrition, une désorientation, que nous croyions alors reliés à une chute qu’elle avait faite quelques jours plus tôt. Le jour de sa prise en charge, un premier verdict est tombé (inattendu) : une très grosse masse colonisait l’utérus et comprimait les urtères, empêchant l’urine de passer et occasionnant des infections urinaires sérieuses.

Au final, il a été découvert que cette masse était principalement fibromateuse mais qu’une partie était sans doute d’origine cancéreuse. Les investigations et les soins ne sont pas allés plus loin que la pose de sondes directement dans les reins puisque des masses cancéreuses avaient été trouvées à proximité des reins. La chose était irréversible. La mort était donc à attendre, son arrivée était la grande inconnue. Aujourd’hui nous connaissons la réponse, il aura fallu moins de 2 mois (au moins à compter des premiers signes d’appel car en remontant le temps, bien des choses auraient pu être considérées comme telles).

Selon votre définition de l’agonie, je peux donc dire que l’agonie de ma grand-mère a duré environ 5 heures.
En entrant dans sa chambre hier, j’ai constaté une respiration très gênée (comme les autres jours) mais avec des symptômes différents. Après moins de 5 minutes de présence, j’ai été témoin d’un premier événement troublant, il constitue ma première question :

Soudain, ses yeux se sont ouverts pour se révulser. Il a semblé que la respiration se coupait. Du sang a coulé de sa bouche (elle venait de se mordre la lèvre) ainsi qu’une sorte d’écume. Elle s’est presque immédiatement mise à convulser (faiblement), une sorte de rictus sur la lèvre gauche. Cette agitation a duré moins d’une minute puis s’est calmée pour atteindre une totale fixité, y compris du regard que je devinais légèrement sous ses yeux mi-clos et surtout de la respiration. J’ai cru que le moment était arrivé. Pendant tout ce moment je lui tenais la main, lui parlait, l’embrassait. Après ces quelques secondes de fixité, le souffle est revenu puis elle a poussé deux espèces de cris, bouche fermée. Puis la respiration constatée à mon entrée s’est réinstallée.
Cet événement s’est reproduit 5 fois entre 15h00 et 18h15 (heure de son décès).
Comment analysez vous ce comportement ? La mort a-t-elle été provoquée par étouffement (je précise que les œdèmes étaient nombreux).

L’autre question concerne cet aspect vaguement ésotérique mais dans tous les cas mystérieux de ces moments. Lors de la première de ces crises, lui parlant, tenant de la rassurer, je me suis permis de lui dire que si elle sentait la chose possible, il fallait qu’elle "lache". Sur toute la période de son hospitalisation, la dégradation et le glissement ont été très sensibles, avec des jours où des paliers étaient clairement franchis (le jour où plus aucune parole ne sortait de sa bouche par exemple). Et dans les 10 derniers jours, il me semblait que quelque chose la "retenait".
J’ai assisté aux 4 premières crises. Les deux premières seul et les deux suivantes avec mes parents. A la suite de la quatrième, j’ai dit à mes parents, et en m’adressant aussi à ma grand-mère, que peut-être le moment était venu pour nous de partir de la chambre pour la laisser partir. Ma gd-mère était la discrétion incarnée, la pudeur faite femme, et peut-être quelque chose de ce tempéremment jouait dans la dernière extrêmité. J’ai été convaincu de cette idée suite à une conversation avec une infirmière des soins palliatifs. Celle-ci m’expliquait que de nombreuses personnes mouraient seules alors que leurs proches les veillaient jour et nuit - la mort survenant en quelques minutes le temps d’aller chercher un café ou de sortir prendre l’air.
J’ai donc pensé que ma gd-mère était peut-être dans cette situation.
Et le fait est que mon intuition s’est révélée exacte. Nous avons donc quitté l’hôpital après avoir dit un adieu conscient à ma grand-mère, lui disant ouvertement que nous partions pour la laisser tranquille à 18h00 exactement. 45 minutes plus tard, une personne de notre famille nous appelait pour nous annoncer qu’en arrivant dans sa chambre à 18h20 il l’avait trouvée sans vie.
C’est à partir de là que j’ai présumé que dans ce dernier quart d’heure un 5 accident s’était produit. Le dernier.
Ma question : selon vous, cette hypothèse du choix de partir est-elle plausible ? Avez-vous observé des cas semblables dans votre expérience ?

J’arrête ici mon roman que j’avais pourtant espéré court.
Je vous remercie par avance pour vos éclaircissements.
Bien à vous,

MC

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