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En réponse à :

La perfusion sous-cutanée

, par S. Béraud-Sudreau

Bonjour Docteur,

J’ai déjà eu l’occasion de vous poser des questions, et j’ai toujours eu grand intérêt à lire vos réponses ou celles d’autres intervenants.

Ma belle-mère, 95 ans, atteinte de démence à prédominance vasculaire, est en EHPAD depuis 2 ans. Depuis novembre dernier, elle mange très peu, alors qu’après son arrivée, elle avait grossi, ayant bon appétit. Au départ, je pense qu’elle n’arrivait plus à utiliser ses couverts, et refusait de demander de l’aide. Mais si mon époux lui présentait une cuillère, là, elle mangeait correctement. Et était heureuse qu’il lui propose un petit gateau au dessert.
Petit à petit, elle a mangé de moins en moins, et mi avril, mon époux a engagé une personne pour la faire manger le soir. Cela marchait bien, et cette personne, ancienne aide-soignante en EHPAD, calmait ses angoisses. Début août, la situation a encore évolué, et depuis, elle ne mange quasiment plus. Une heure trente pour 5 cs de soupe et un demi pot de compote. Même le sucré, qui était ce qui lui plaisait le plus, l’intéresse moins.
Mais elle ne marche pas et passe ses journées assise dans son fauteuil roulant ou au lit, ses besoins sont donc assez limités, je suppose. Elle a une boisson hyperprotéinée au gouter.

Lorsque mon mari lui dit "vous ne mangez pas", en général elle répond "mais si je mange", puis serre les dents sur la cuillère... Ou elle répond "j’ai bien mangé au déjeuner (ou au gouter), je n’ai pas faim, ce n’est pas bon" (et elle a souvent raison, d’autant qu’elle mange mixé, beurk). S’il lui demande si elle souhaite se laisser mourir, elle répond non. Sauf un soir où elle lui a répondu " je n’ai pas de mari, par de femme, plus d’amis, ou ils sont loin, alors, à quoi bon." Et lorsqu’il lui a demandé quand elle voulait mourir, tout de suite, plus tard, elle a répondu "ah,non, pas tout de suite, dans 15 jours". Ca ne me parait pas traduire un désir exagéré d’en finir...

Récemment, elle a eu un malaise et son médecin traitant l’a fait hospitaliser, pour qqs examens. Elle est rentrée en 24 heures, réhydratée, et en pleine forme, enchantée de son séjour (?). J’avais déjà constaté cela il y a 3 ans, un séjour de qqs jours en hôpital l’avait rajeunie. Je pense qu’on s’occupe plus d’elle là bas que dans son EPHAD, et c’est ce qu’elle veut, de l’attention.
Le médecin a fait poser une perf pour la réhydrater, 10 jours, à raison d’une perf tous les 2 jours. Elle a très bien supporté, et a tout de suite eu l’air moins décharnée. Même s’il faut relativiser, elle pèse 45 k pour sans doute moins d’1,40 m, ce n’est pas la cachexie. Le médecin a bien précisé à mon époux qu’elle n’était pas en fin de vie, même si, évidemment, ne pas boire ni manger correctement, n’améliore pas le pronostic. Avec sa démence, elle n’a pas la sensation de faim ni de soif, c’est classique, nous le comprenons.

Le problème vient d’une soeur de mon mari, encore... Pour qui poser une perf est de l’acharnement thérapeutique. Car ma belle-mère lui aurait souvent dit qu’elle en avait assez de cette vie, priait le Seigneur de la rappeler et ne voulait en aucun cas d’acharnement. Ma belle-soeur demande donc à mon époux (personne de confiance) de dire au médecin que les enfants sont opposés à tout traitement.

Mon mari interroge sa mère très régulièrement (il y va 2 soirs par semaine) elle ne se plaint jamais de sa vie, et lui répond toujours que tout va bien, qu’elle n’a mal nulle part (sauf exceptions, et elle le dit dans ces cas-là), elle est juste épuisée et veut aller se coucher pour se reposer. Evidemment, ce qu’elle a toujours souhaité, c’est que ses filles s’occupent d’elle, et ça, elle n’a pas cette chance...

Vendredi dernier, sa fille ainée est venue la voir, et là, ô surprise, elle a très bien mangé (déjeuner).

J’ai bien aimé que vous expliquiez qu’une personne démente pouvait exprimer des souhaits lucides, pour ce qui la touche, c’est exactement ce que je constate, mais pour quelqu’un qui vit loin, c’est impossible à croire je suppose.
Elle est très claire sur ce qu’elle veut pour elle avec mon mari, mais il me parait parfaitement possible, hélas, qu’elle dise autre chose à sa fille puinée, dont elle a un peu peur.

Comment faire la part des choses ? Mon mari a beaucoup réfléchi à la question, et ne voit pas de problème avec une perfusion de temps en temps.

Vous indiquez que ces malades n’ont pas faim, réellement, et ne souffrent donc pas. Mais il lui arrive de dire "ah, enfin de la vraie nourriture", et de manger avec appétit, même si c’est de plus en plus rare. Je n’ai donc pas l’impression qu’elle refuse systématiquement de manger. Se pourrait-il qu’il y ait un peu de dépression, parce que ses filles ne s’occupent pas d’elle ?
Elle ne sait plus leurs noms, a oublié avoir été mariée, perdu son mari et une fille (il y a 60 ans), ne sais plus que son nom de jeune fille, et croit souvent avoir 8 ou 9 ans. Mais je pense qu’au fond d’elle-même, elle sait qu’elle a 2 filles. D’ailleurs, il lui arrive, dans ses moments de lucidité, de dire combien elle est déçue par ses enfants. C’est vraiment une maladie très étrange...

Comment réagir si tous les frères et soeurs demandent à ce qu’elle ne soit plus ni réhydratée, ni même soignée (arythmie cardiaque) ? Quelle volonté devons-nous respecter ? Ce que disait ma belle-mère avant de perdre complètement la tête (à condition de croire ma belle-soeur) vs ce qu’elle dit à mon époux ?

Je vous remercie d’avance de l’attention que vous porterez à mon (trop long) message.
Bien à vous. SBS

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