Je ne suis pas precisement les details de cette affaire, dont les aspects sont nombreux et ne concernent pas tous la fin de vie, mais aussi la responsabilite d une equipe, du medecin, de leur formation, de leur competence, etc.
En ce qui concerne la fin de vie et par rapport aux questions deja discutees ici, il y a deux points importants souleves par les commentateurs du compte rendu de l audience du19/06/2014, dans le cas d une sedation permettant de mettre en paix le patient sans le tuer :
1) La duree de la fin pour le patient refusant toute alimentation.
2) La duree de l agonie (inconsciente, mais eprouvante pour l entourage).
1) Nous avons vu le critere indispensable qu est la decision du patient et l acte d arreter de s alimenter pour s avancer vers la mort qu il choisit. Nous avons vu que la sedation lui permet de ne pas assister a sa propre mort ni de souffrir des defaillances successives de ses organes. Faut il attendre la fin, ou y a t il un point de non retour permettant a la fois de considerer que la volonte du patient a ete exprimee et respectee, et de mettre un terme a une attente inutile ? Il y a aussi une sous question, celle du produit utilise, celui qui permet d abreger l attente : il me semble qu il y a une difference entre une injection de potassium et une dose excessive d hypnovel, non pas dans la volonte de tuer qui est la meme, mais dans l effet eventuellement ressenti.
2) Abreger l agonie inconsciente ? Si les manifestations de l agonie ne sont pas reductibles par usage de sedatifs meme a forte dose, on en revient au point precedent.
Donc, peut on abreger la vie lorsque la mort est inevitable, qu elle a ete choisie et entamee par le patient, et que la phase de l agonie est la pour une duree indeterminee ? Ce n est pas exactement un cas de souffrance irreductible puisque le patient est sedate. Est on dans un cas d euthanasie ? On sait que le patient est en train de mourir, et de quoi il meurt. Est il legitime de vouloir ecourter l agonie meme inconsciente ?
Je vois bien les contradictions et nuances des discussions possibles, cependant la question merite d etre posee, car elle concerne un cas de figure tres particulier dans lequel la solution de la sedation ne suffit pas a convaincre completement : pourquoi attendre durant des semaines ?
(...)
Je vois que vous avez repondu dans la suite de votre chronique.
On peut reduire la souffrance du patient et le rendre inconscient.
On peut reduire les manifestations de l agonie.
Neanmoins, la question de la duree de l agonie reste posee : l agonie est la, irreversible, le patient a exprime sa volonte eventuellement en accelerant lui-meme cette agonie (en refusant traitement/alimentation), et il aurait souffert de se savoir dans cet etat s il avait ete conscient.
Ce cas de figure n est pas exactement le cas recurrent dans l affaire du Dr Bonnemaison.
Mais si nous disons qu on ne peut justifier de tuer pour accelerer la mort, a contrario nous limitons la comprehension par la societe et la justice (a posteriori et par un jugement) des cas d euthanasie a ceux où le manque de moyens rend impossible le traitement de la souffrance a laquelle on ne peut soustraire le patient autrement qu en lui donnant la mort.
Ce qui limiterait considerablement les cas d euthanasie relates dans de nombreux temoignages, qui semblent tres comprehensibles et souhaitables, et justifierait qu on demande a la justice de les examiner de façon rgoureuse.
Donc, 3 options :
On ne peut justifier de tuer pour accelerer la mort : pas d euthanasie dans ce cas, meme toleree.
On peut justifier de tuer pour accelerer la mort, c est le medecin qui en decide : euthanasie du fait du medecin en concertation avec le patient, illegale mais toleree, avec jugement eventuel lorsqu il y a contestation.
On peut justifier de tuer pour accelerer la mort : critere de demande d euthanasie en phase agonique, faite par le patient au prealable, ou bien par l entourage durant la phase agonique.