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En réponse à :

L’affaire de Bayonne

, par Michel

Bonjour, et merci de ce message. Il me touche car j’y vois de votre part une marque de confiance.

Je vois que vous parlez de deux choses :
- Il y a d’une part la question du référendum d’initiative citoyenne, pour lequel vous militez. Je ne sais pas quoi en penser, il me semble cependant que ce pourrait être une fausse bonne idée ; avez-vous lu La démocratie d’apparence, ouvrage très inégal mais qui me semble analyser cette question de manière très pertinente.
- Et puis il y a la question de la légalisation de l’euthanasie. Parlons de cette dernière.

Ou plutôt parlons-en assez peu, car si vous vous êtes promené sur ce site vous avez sans doute lu l’essentiel de mes arguments contre. Je relèverai simplement deux de vos phrases :

L’État doit seulement s’assurer que la décision de mettre fin à ses jours est bien libre éclairée, réfléchie et réitérée.

Et... comment fait-il ? Il y a donc un tiers qui en juge ? Comment gérez-vous les refus ? Comment concevez-vous cette ultime liberté qui est en réalité une liberté conditionnelle ? Je vous fournis les exemples si vous me répondez sur ce point. En attendant je tiens qu’on ne peut pas en même temps revendiquer cette liberté et la soumettre à un contrôle. A moins qu’il ne soit de pure forme ; cela me fait penser qu’il y a un chiffre que je n’ai jamais trouvé : c’est celui des euthanasies qui ont été refusées aux Pays-Bas.

Une personne, qui n’est plus capable d’exprimer sa volonté mais dont le testament de vie indique des conditions dont on constate qu’elles sont réalisées.
Exemple : Si je ne reconnais plus ma femme ou mes enfants je veux exercer mon droit à bénéficier d’une aide médicamenteuse pour mourir d’une mort douce.

Et c’est à moi que vous voulez faire croire une chose pareille ? Moi qui sais de longue expérience que le malade en fin de vie change d’avis très souvent et très rapidement (heureusement : cela montre qu’il vit encore des choses importantes et qu’il s’adapte) ! Je ne peux pas imaginer une seconde ce simplisme qui serait de se comporter comme si le malade était lié par un papier qu’il a écrit quelques semaines, mois ou années avant. Dire cela c’est méconnaître l’intensité de la vie psychique dans les derniers temps. La contradiction interne de votre formulation : Si je ne reconnais plus ma femme ou mes enfants je veux exercer mon droit ne se résout pas, en tout cas pas par ce moyen.

Mais je n’insiste pas sur ces points, d’ailleurs la seule chose utile serait d’en discuter de manière plus structurée.

Ce qui en revanche me laisse pantois, c’est votre première phrase :

Nous n’aurions pas le cas de ce médecin devant la Justice Si le référendum d’initiative citoyenne, souhaité par 82 à88 % des Français, avait été instauré car une proposition serait soumise aux 45 millions d’électeurs qui pourraient CHOISIR les conditions de la loi permettant à chaque personne de bénéficier d’une aide médicamenteuse pour mourir d’une mort douce.

Voyons. J’ai écrit, et je le répète, que nous n’avons pas d’autre élément que ceux que la presse nous a livrés. Il faut donc être prudent. Mais si nous voulons parler de l’affaire de Bayonne, la seule solution est de faire comme si les informations étaient exactes. D’autre part je présume que vous n’avez pas d’autres informations que les miennes. Parlons donc de ce qu’on nous a dit, sans pour autant prétendre que nous jugeons de l’affaire elle-même.

Et ce que nous croyons savoir, c’est que le médecin de Bayonne a administré des substances mortelles à des personnes âgées qui étaient dans un état de conscience altéré. Nulle part on ne nous a dit qu’elles avaient rédigé un testament de vie ou des directives anticipées. Le médecin de Bayonne a tué des personnes qui n’avaient rien demandé.

Alors, dites-moi : ce comportement, il répond à laquelle de vos propositions ?

Vous voyez bien...

Le médecin de Bayonne a enfreint la loi Léonetti (et si les faits sont avérés, je lui reprocherait notamment d’avoir tué ces malades sans s’être seulement donné les moyens d’évaluer leur degré de souffrance : s’il s’en était préoccupé, la première chose qu’il aurait faite aurait été de prendre l’avis d’autres soignants). Mais il aurait enfreint aussi la loi proposée par l’ADMD, et il aurait également enfreint la vôtre. L’affaire de Bayonne doit être pour vous le contre-exemple absolu.

C’est pourquoi je vous pose la question que je voulais poser par cet article. Car mon but n’est certainement pas de partir en guerre contre mon confrère. Ce que je pointe c’est simplement ceci : comment se fait-il que des militants dont je n’ai pas de raison de soupçonner l’honnêteté intellectuelle adhèrent à une association qui ne craint pas d’utiliser n’importe quelle situation, même quand elle va aussi spectaculairement à l’encontre de ses propres thèses ? Comment se fait-il que vous acceptiez cela ?

J’avais déjà pointé cette anomalie dans un article sur les cas d’Hannah Jones et Eluana Engaro. J’y étais d’autant plus à l’aise que si j’avais eu à me mêler de ces affaires j’aurais probablement jugé comme les juges anglais, et j’aurais probablement milité pour qu’on arrête l’alimentation d’Eluana Engaro. Mais ces deux affaires n’ont aucun rapport avec des situations d’euthanasie, et j’ai été scandalisé de voir que malgré cela l’ADMD les utilisait pour pousser ses thèses. Cet article m’a valu quelques messages d’insultes, mais personne ne s’est hasardé à me répondre sur le fond. Le ferez-vous ?

Bien à vous,

M.C.

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