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En réponse à :

La démence ou l’art du camouflage

, par Michel

Bonjour, Géraldine.

J’ai l’impression, et ce peut être un danger, de bien voir cette situation. Je vais donc vous livrer juste quelques commentaires.

Sur l’état hépatique ; il se peut que les gastro-entérologues aient modifié leur position, mais à l’époque où je savais quelque chose, on disait qu’il faut distinguer l’hépatite alcoolique, trouble biologique qui, passé la dangereuse période aiguë, guérit toujours (pourvu que l’intoxication cesse), et la cirrhose, lésion anatomique qui ne guérit jamais. Naturellement un malade atteint de cirrhose peut présenter de poussées d’hépatite, et quand cette poussée disparaît le malade revient à son état de base ; mais la cirrhose, elle, continue d’évoluer, et c’est elle qui fera le pronostic à long terme.

Bon. Laissons cela. Si je maintiens qu’il ne va pas de soi de faire la différence entre démence alcoolique et démence fronto-temporale, il faut bien reconnaître que l’histoire que vous racontez est caractéristique. Ce qui est très déroutant dans la démence fronto-temporale, c’est que des pans entiers des fonctions intellectuelles restent ou semblent rester intacts. Notamment le raisonnement est moins atteint que le jugement. Le raisonnement c’est ce qui me fait dire que deux et deux font quatre ; le jugement c’est ce qui me fait dire que deux et deux font peu de chose. Ce que vous décrivez c’est un trouble typique du jugement : il ne se rend pas compte de sa situation notamment financière. J’y ajoute :
- Un certain degré d’aboulie : il a des projets, mais n’en mène réellement aucun.
- Une perte du sens des convenances sociales : quelle que soit la situation, il n’a pas à venir voir votre service repro.

La situation risque donc d’être ingérable ; il faut même prendre en compte un risque de violence.

Mais il est totalement exact que nous ne pouvons pas prévoir la vitesse à laquelle les choses vont s’aggraver. Il y aurait donc danger à vous contenter de tenir le coup en espérant une dégradation rapide.

Je dois donc vous mettre en garde contre l’abnégation. D’ailleurs vous parlez de votre éducation catholique stricte. Soit. Nous sommes donc en terrain connu. Ce que je dirais c’est que la morale catholique n’a pas prévu le cas. Je veux bien qu’on s’interroge sur le devoir de supporter les défauts d’un mari. Je veux bien qu’au nom de la foi dans le sacrement de mariage on décide qu’il faut sacrifier son bonheur pour rester avec quelqu’un avec qui on ne s’entend plus (enfin, ce n’est pas ce que j’ai fait dans ma vie). Mais ici nous parlons d’un malade. On n’abandonne pas un mari malade ; mais cela vous oblige, non à le prendre en charge vous-même mais à vous donner les moyens pour que rien ne lui manque ; et vous vous êtes parfaitement acquittée de ce devoir quand vous avez trouvé les professionnels qui s’en chargent. Le reste, c’est à votre libre disposition. Et j’ajoute que, face à un malade souffrant de démence fronto-temporale, vous allez tout simplement au casse-pipe, que vous n’y arriverez pas, que vous serez moins performante que les professionnels et qu’à bref délai votre devoir d’épouse sera de passer la main.

Bien à vous,

M.C.

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