Gériatrie, soins palliatifs - Michel Cavey - commentaires Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2024-01-08T18:21:43Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18027 2024-01-08T18:21:43Z <p>Bonjour, Florence, et merci de ce message.</p> <p>La réponse est malheureusement très simple : une sonde JJ sert à évacuer l'urine quand il y a un obstacle sur l'uretère. Or vous savez ce qui se passe quand il y a un obstacle sur les voies urinaires : cela provoque une surpression d'urine en amont, avec deux conséquences : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> C'est particulièrement douloureux : le cas le plus fréquent de douleurs liées à un obstacle est celui des calculs rénaux, qui donnent des coliques néphrétiques. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si on ne lève pas l'obstacle on aura une destruction du rein.</p> <p>Il est donc indispensable d'avoir des sondes qui fonctionnent. Et les questions ne se poseraient qu'à la marge, et pour le principe : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> A-t-on eu raison de les poser ? Il faudrait en savoir plus mais je vois mal quelle erreur de diagnostic aurait pu conduire à poser des sondes pour rien. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Pourrait-on imaginer de contourner l'obstacle en amenant directement le ou les uretères à la peau ? Cela se fait ; il faudrait cependant être sûr que ce sera plus confortable que les sondes JJ. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> S'il n'y a qu'une seule sonde parce que l'autre voie urinaire est normale, pourrait-on envisager de retirer le rein du côté obstrué ? Il va falloir trouver un chirurgien pour le faire. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Peut-on espacer les changements de sonde ? Je ne sais pas. Là aussi il faudra en persuader le néphrologue.</p> <p>Par contre le fait que nous soyons somme toute en situation de fin de vie ne change rien à l'affaire : même à une semaine du décès la pose de sonde JJ serait le seul moyen de prendre en charge la douleur d'une obstruction des voies urinaires, et même à une semaine du décès je la ferais poser : il n'y a pas d'autre choix, sauf à opter pour une sédation qui nécessiterait des doses massives de drogues ; on serait en limite d'euthanasie.</p> <p>Mais si le service est bien organisé, le changement de sonde n'a pas de raison d'être un acte très agressif. Je ne m'inquièterais donc pas trop.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2024-01-08T11:46:33Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18026 2024-01-08T11:46:33Z <p>Bonjour Docteur,<br class="autobr" /> Je suis tombée sur votre site étant à la recherche de réponses concernant une nouvelle hospitalisation de mon père très âgé (95 ans) et qui est en maison de retraite. Il doit, depuis plusieurs années subir tous les 6 mois une intervention pour changer une sonde JJ ;<br class="autobr" /> Nous n'arrivons pas mes soeurs et moi à avoir une réponse quand aux conséquences d'une non-intervention ? Notre père est assez faible, se nourrit bien mais reste dénutri. Son médecin référent a pris sa retraite en juin dernier sans nous informer. Nous voulons pour notre père une fin de vie la plus confortable possible. Avez-vous eu cette problématique de soins ? <br class="autobr" /> Nous ne savons pas trop quelle est la bonne décision pour lui.<br class="autobr" /> Merci de prendre le temps de me répondre, votre énergie et votre site est bien précieux !<br class="autobr" /> Bien cordialement <br class="autobr" /> Florence</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-10-17T22:04:04Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18025 2023-10-17T22:04:04Z <p>Bonsoir, Marietta, et merci de ce message.</p> <p>Je vais peut-être un peu vite, mais je crois vous comprendre.</p> <p>Ce que je lis, c'est que dans votre pratique la question de l'euthanasie ne se pose pas. Je partage ce sentiment. Encore faut-il regarder les choses comme elles sont. Et cela conduit à dire des choses qui sont un peu à contre-courant. Tellement à contre-courant qu'à les dire on ne peut récolter que des coups de bâton.</p> <p>J'ai compté : j'ai assisté à un bon millier de décès. Je peux commencer à me faire une idée de la manière dont les choses se passent.</p> <p>Il y a, mettons 500 000 décès par an en France. Dans 90% des cas la personne n'a tout simplement besoin de rien. C'est exactement ce que vous me dites : la mort est un collègue de travail, certes un peu rébarbatif, mais qui fait plutôt bien son job quand on ne lui casse pas les pieds.</p> <p>On se retrouve donc avec 50 000 patients qui ont besoin d'aide dans leurs derniers moments, qu'il s'agisse d'une action médicale ou d'une présence psychologique ou spirituelle. Dans 90% des cas les moyens courants suffisent.</p> <p>Ce sont donc 5 000 personnes par an qui nécessitent des soins spécialisés de type palliatif. Encore faut-il préciser les choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il suit de là que l'équipement en lits de soins palliatifs est suffisant en France. Le scandale est dans leur répartition : on sait qu'une bonne quinzaine de départements n'ont aucun équipement. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Cela suppose que la culture palliative soit largement répandue chez tous les professionnels de santé. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je me souviens que, dans l'unité de soins palliatifs dans laquelle j'ai travaillé, la quasi-totalité des patients étaient dans un état pour lequel je n'aurais eu aucune difficulté à les soigner à domicile.<br class="autobr" /> Quand je vous disais qu'on risque des coups de bâton…</p> <p>Alors tant qu'à faire dans l'inaudible, aggravons notre cas.</p> <p>Oui, comme vous le soulignez, les vieilles personnes n'ont pas besoin de nous pour quitter la vie quand elles l'ont décidé.</p> <p>Oui, nous savons faire. Et nous faisons bien. Je sais parfaitement de quel prix je vais payer ce que je viens d'écrire : assertion typique de l'arrogance, de la suffisance du médecin qui prétend savoir mieux que le malade ce qu'il ressent ; manifestation éclatante de son mépris pour la souffrance du malade. Et je n'ai aucune défense. Aucun moyen d'expliquer que la souffrance se diagnostique, s'évalue, se mesure, que ça s'apprend et que c'est notre métier. Et que nous sommes probablement un peu mieux placés pour le faire qu'un entourage qui est <i>aussi</i> en proie à sa propre souffrance ; et à qui on ne peut expliquer que la souffrance de leur être cher n'est pas ce qu'ils croient sans se faire cingler d'un « Évidemment, pour vous il ne souffre pas assez ». Ça me fait penser aux cancéreux en fin de vie : « Comment, Docteur, vous ne lui donnez pas de morphine ? » Allez donc expliquer que dans plus d'un tiers des cas les cancers évoluent sans aucune douleur…</p> <p>Je crois que je connais le fin mot de cette histoire, reste à oser le dire.</p> <p>Ce que la gériatrie nous apprend, c'est que le <i>caring</i> n'est pas le <i>cocooning</i>. Le <i>caring</i>, Dieu sait si nous en avons fait notre raison de vivre. Mais nous savons aussi que les gens sont plus solides que nous ne le croyons, et que le respect de la dignité de la personne exige que nous la tenions pour un adulte capable d'assumer son état. Oh, oui, ma pratique m'a appris que c'est plus compliqué que ça.</p> <p>Mais voilà : une mort simple, ça n'existe pas, ce n'est pas entendable. Il faut que ce soit un drame de fer et de sang. On ne paie plus de pleureuses, le drame est intériorisé, mais pour moi qui suis en train de perdre l'être que j'ai de plus cher au monde, il est impensable que les choses se passent en douceur. D'où cette situation démoralisante que nous avons tous vécue : le patient vient de décéder, nous avons réalisé un accompagnement parfait, des symptômes maîtrisés dans les règles de l'art, une prise en charge psychologique impeccable, la famille nous remercie longuement et, au moment de partir, laisse échapper : « Quand même, il a bien souffert ».</p> <p>Soyez fière de ce que vous faites. Je n'aurais qu'une réserve. Vous écrivez : <i>Des PMA de morphine et de midazolam sont mises en place mais il nous arrive de ne pas avoir besoin de les utiliser</i>. Je crois que je vois très bien de quoi vous voulez parler. Mais je ne suis pas trop pour. Une sédation, ça s'individualise, ça se surveille, ça se dose. Le risque à ne pas le faire est de surdoser, mais surtout de sous-doser. C'est pourquoi je trouve totalement irréaliste la proposition de la loi Claeys-Léonetti de pratiquer des sédations en maison de retraite. Entendons-nous : ma première sédation, je l'ai faite à domicile. Mais j'étais formé, c'était mon risque et j'y ai passé la nuit. Maintenant, je sais bien que vous n'avez pas le choix et qu'on fait avec ce qu'on a. Mais ça m'inquiète toujours.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-10-15T20:40:08Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18024 2023-10-15T20:40:08Z <p>Bonjour,<br class="autobr" /> je viens de lire votre article très interresant. Je suis infirmière en ephad accueillant des personnes démentes ( alzheimer ou apparentés , corps de lewy, aphasie primaire progressive , demence vasculaire).Nous les accompagnons jusqu' a la fin de leur vie. Nous faisons appel souvent à l' équipe mobile de soins palliatifs. Quand il n' y pas d'autres pathologies cette fin de vie se manifeste souvent par un arret de l'alimentation de la personne (elle refuse) avec fausses routes ou pas et arret de l' hydratation. Des PMA de morphine et de midazolam sont mis en place mais ils nous arrivent de ne pas avoir besoin de les utiliser.<br class="autobr" /> J ai souvent le sentiment d' etre les oubliés de toute ses discussions j e n' ai pas vraiment de question mais aimerais avoir votre avis sur nos pratiques en gériatrie<br class="autobr" /> Merci</p> La souffrance en fin de vie 2023-09-23T13:57:05Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article85#comment18023 2023-09-23T13:57:05Z <p>Bonjour, Claire, et merci de ce message.</p> <p>Je crois que je peux prendre le risque de vous répondre assez simplement. Je dis ça parce qu'il me faudrait en savoir plus sur la situation concrète du patient auquel vous pensez ; mais je le suppose en fin de vie.</p> <p>Et la réponse est alors très simple : chez le patient en fin de vie, comme d'ailleurs chez tous les malades graves, la question de la faim et de la soif est une des rares qui ne se posent pas : ils n'ont pas faim, et pas soif. C'est l'une des grande escroqueries des zélateurs de l'"aide active à mourir" que de prétendre que la sédation revient à faire mourir les gens de faim et de soif : mourir de faim c'est terrible quand on a faim ; mourir de soif c'est terrible quand on a soif. Mais ce n'est pas le cas. Nous le savons parce qu'il se produit que, même temporairement, ils sortent de cet état, et qu'ils peuvent nous le dire. Allons plus loin : dans les cancers la tumeur sécrète des hormones qui coupent l'appétit ; nous le savons fort bien car nous avons les pires difficultés à les faire manger. Ou boire : lors de la canicule de 2003 15000 personnes sont mortes parce qu'elles ne savaient pas qu'elles avaient soif. Elles ne sont pas mortes de soif, mais de déshydratation, ce qui est un autre sujet.</p> <p>Heureusement, en ce qui concerne votre malade. Car vous m'écrivez qu'il est alimenté par du glucose. Mais... un litre de glucose apporte 200 calories ; il en faudrait dix litres pour assurer un apport calorique suffisant. Autant dire qu'il est hydraté, mais pas alimenté. Pour ma part j'évitais de donner du glucose, car ça ne sert à rien, je me bornais à donner du sérum salé, sauf dans le cas où ce n'était pas possible.</p> <p>Mais je sens bien que votre question est de savoir s'il souffre de ne pas être nourri. Je n'ai pas vu ce malade, mais je parie sans risque : non. Par contre il va mourir notamment de dénutrition ; mais cela n'est pas cause de souffrance, et de surcroît nous serions bien en peine d'y remédier : il faudrait une alimentation artificielle, par exemple par sonde, et cela poserait bien davantage le problème de l'acharnement thérapeutique. S'il est en fin de vie, je ne le ferais certainement pas.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> La souffrance en fin de vie 2023-09-23T11:49:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article85#comment18022 2023-09-23T11:49:12Z <p>Cher monsieur,</p> <p>J'ai une question.</p> <p>Ressent on la faim quand on est alimenté QUE par glucose et chlorure de sodium ?<br class="autobr" /> Je vous remercie pour votre précieux retour.</p> <p>Bien cordialement, <br class="autobr" /> Claire Pistil</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-05-16T09:27:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18002 2023-05-16T09:27:12Z <p>Bonjour, Dom.</p> <p><i>La plupart des gens autour de moi croient dur comme fer qu'une loi autorisant l'euthanasie et le suicide assisté les libérera de la contrainte de mourir "contre leur gré"</i></p> <p>Bien sûr ! L'enfumage n'est pas de leur fait : c'est à eux qu'on ment.</p> <p><i>Quant à votre ambition d' "éclairer", lors de débats futurs, le simplisme des solutions miracle, à base d'approximations, d'exemples émotionnellement spectaculaires, d'illusions de "pouvoir agir"... comment dire : vous y croyez vraiment ?</i></p> <p>Pas une seconde. Mais s'il y a un au-delà, ceux qui, alors qu'ils pouvaient parler, se seront tus au motif que ça ne sert à rien, seront jugés plus sévèrement que ceux qu'ils auraient dû combattre.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-05-16T08:24:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18001 2023-05-16T08:24:12Z <p>"mauvaise foi et ignorance, mensonge et sottise" ...</p> <p>Je ne sais pas. La plupart des gens autour de moi croient dur comme fer qu'une loi autorisant l'euthanasie et le suicide assisté les libérera de la contrainte de mourir "contre leur gré" - ou du moins de mourir dans des conditions qui leur semblent "indignes".</p> <p>Moi je crois que mourir est juste inacceptable, quelle que soit la façon dont on meurt.</p> <p>Le reste - à nouveau - n'est que blabla présomptueux : notre mort ne nous appartient pas d'avantage que notre venue au monde.</p> <p>Quant à votre ambition d' "éclairer", lors de débats futurs, le simplisme des solutions miracle, à base d'approximations, d'exemples émotionnellement spectaculaires, d'illusions de "pouvoir agir"... comment dire : vous y croyez vraiment ?</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-05-15T19:24:41Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment18000 2023-05-15T19:24:41Z <p>Bonsoir, Dom.</p> <p>Vous devez bien penser que je partage totalement ce que vous écrivez.</p> <p>Mais je n'ai pas voulu, dans cet article, poser le problème en ces termes : ce n'était pas mon sujet. Ce que vous écrivez vise en effet à répondre à une question cruciale : la vie vaut-elle d'être vécue jusqu'au bout ? Et je le crois. Le problème est que ce point de vue est nécessairement contestable : on vous rétorquera que c'est votre récit, pas celui de la défunte Mais plus encore on trouver des gens pour dire que la vie vaut certainement d'être vécue, mais que pour ce qui me concerne, franchement, non merci (après tout, il est certainement très agréable de faire du ski mais ça ne me dit rien). Et je comprends parfaitement ces vieilles personnes qui, chargées d'ans et rassasiées de jours, comme dit la Bible, attendent la mort avec une impatience dont je n'ai pas de raison de douter.</p> <p>Tout ce que je voulais, c'était mettre en évidence que, sans même entrer dans cette discussion sur, disons la légitimité des demandes d'aide active à mourir, c'est l'ensemble du débat qui constitue un festival de mauvaise foi et d'ignorance, de mensonge et de sottise. On fera bien de s'en souvenir, non pas pour ce sujet, c'est plié, mais pour d'autres débatdesociétés.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Pour solde de tout compte : Clap de fin sur l'euthanasie ? 2023-05-15T17:50:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article156#comment17999 2023-05-15T17:50:12Z <p>Ma plus vieille copine est morte début mars d'une SLA (maladie de Charcot) "bulbaire". Elle n'a jamais demandé à "en finir". Elle s'était résolue en décembre à une gastrotomie, puis, réhospitalisée en urgence en janvier, elle a été placée sous respirateur 24 h sur 24 - les médecins la donnaient pour morte dans les heures à venir et ont supprimé les poches d'aliment et l'hydratation. 48 h plus tard elle écrivait sur son ardoise (elle avait perdu l'usage de la parole, deux ans plus tôt) "Envie d'un chocolat chaud". L'alimentation et l'hydratation ont été rétablies, mais la situation s'est inéluctablement dégradée. Elle n'a pas été prise en charge en soins palliatifs, faute de place, mais remarquablement "écoutée" dans un service de neurologie. Elle est morte doucement, après augmentation progressive de la sédation - à sa demande<br class="autobr" /> ( le respirateur ne suffisait plus à soulager la sensation d'asphyxie). Elle est restée lucide quasiment jusqu'au bout, et l'euthanasie n'a jamais été un sujet. </p> <p>Je reste persuadée que tout ce débat sur "le droit à mourir" ne concerne en rien les personnes qui sont en train de mourir, mais bien celles qui assistent à leur fin - et ne peuvent supporter cette épreuve. </p> <p>Pour ma part, je garde précieusement le souvenir des dernières "conversations" que j'ai pu avoir avec ma copine - où nous nous sommes réjouies ensemble de tous les beaux et bons moments que nous avions vécus ensemble. Et je lui suis infiniment reconnaissante de nous avoir épargné cette séance, toujours présentée sous un jour idyllique, de la famille et des amis réunis autour d'elle pour son dernier souffle. Je préfère continuer de penser que la mort m'a simplement cruellement privée d'elle, et que ni elle, ni son époux, ni ses filles ni moi ne l'ont souhaitée et accueillie béatement. Nous l'avons subie, douloureusement, et tout le reste n'est que blabla : la "précipiter" n'aurait été que vaine présomption de "maîtriser" ce qui nous dépasse. </p> Les pauses respiratoires 2023-03-29T12:03:13Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article77#comment17977 2023-03-29T12:03:13Z <p>Bonjour, Yves, et merci de ce commentaire. Vous n'imaginez pas combien il est précieux.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Le droit au risque chez la personne âgée 2023-03-29T12:02:10Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article63#comment17976 2023-03-29T12:02:10Z <p>Bonjour, Laurence.</p> <p>Je crois que je comprends votre problème ; mais il me semble qu'il se subdivise en trois.</p> <p>1°) : S'agissant du droit de retrait, à mon avis c'est non. Le droit de retrait (<a rel='nofollow'>voyez https://www.inrs.fr/publications/juridique/focus-juridiques/focus-droit-retrait.html</a>) ne concerne que les situations dans lesquelles <i>vous</i> pourriez courir un danger. Ce n'est pas le cas ici, où vous avez affaire à une situation dans laquelle vous pensez que la prise en soins n'est pas adaptée. Tout ce que vous pourriez faire c'est refuser de prendre part à une action que vous considérez comme éthiquement inacceptable ; mais vous encourriez des sanctions contre lesquelles vous devriez saisir les Prudhommes, avec un risque d'échec, mais plus encore la certitude de beaucoup de complications.</p> <p>2°) : S'agissant du soin, je ne peux en juger, puisque je n'ai pas vu la situation ; mais je prends le pari que vous avez raison : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a un autre moyen que l'Hypnovel® pour assurer le soin. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si la toilette est à ce prix, la première chose à faire est d'espacer les toilettes, ou tout au moins de les réduire à l'indispensable. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> S'agissant d'un soin comme la toilette, dont on ne peut pas dire qu'il soit vital, la liberté de la personne, même démente, demande à être considérée. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il est banalissime de voir une équipe en difficulté ses réfugier derrière un artifice technique, au lieu de se poser les bonnes questions.</p> <p>3°) : Mais votre difficulté n'est pas là. Elle est que vous faites partie de cette équipe, que vous devez vivre avec, et que de surcroît que vous avez le grand tort d'avoir raison. Cela ne vous sera pas pardonné. Or que voulez-vous ? Certainement pas être dispensée d'un soin ; ce que vous voulez c'est que la dame ne soit plus sédatée pour sa toilette. Car si tout ce que vous obtenez est d'être dispensée d'un soin qui sera fait par d'autres, la dame n'y aura rien gagné, et vous n'aurez préservé que votre dignité, ce qu'on ne manquera pas de vous faire payer cher.</p> <p>Bref votre tâche n'est pas de vous retirer mais de convaincre. Et c'est une tout autre question. Sur ce que vous me dites, j'ai tendance à penser que votre équipe a tout simplement besoin d'une formation (vous connaissez mon attachement à la formation « <a href="https://www.humanitude.fr/" class="spip_out" rel='nofollow external'>humanitude</a> »), et c'est par ce moyen que vous améliorerez la situation. Vous avez raison mais le pire est que vous avez raison toute seule, et que, tout bien pesé, une équipe qui se trompe est plus efficace qu'une personne seule qui a raison.</p> <p>Je vais vous raconter la pire histoire qui me soit arrivée.</p> <p>C'était une très vieille dame qui est arrivée dans le service ; elle avait un cancer du pancréas, cela devenait difficile à la maison mais, miraculeusement, elle n'avait pas de symptômes pénibles. Je l'ai donc accueillie, en lui présentant le service et le projet de soins palliatifs. Elle m'a coupé la parole : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Mon petit, vous êtes gentil, mais j'ai 95 ans, je suis juive, j'ai fait Auschwitz, alors votre histoire ça ne m'intéresse pas, ce que je veux c'est une piqûre. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Madame, je ne fais pas ça ; mais ce que je peux vous proposer c'est de passer quelques jours avec nous. Et si à un moment vous me dites : « Je veux être endormie », je ne discuterai pas, je vous endormirai. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> D'accord.<br class="autobr" /> Ainsi fut fait, et pendant trois semaines environ tout est allé très bien. Un jour elle m'a dit : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> C'est trop long, endormez-moi. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Bien, Madame. <br class="autobr" /> Mais quand j'ai fait part de cette décision à l'équipe, j'ai eu une levée de boucliers : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Vous n'allez pas faire ça !! elle ne souffre pas. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Mais… c'est sa volonté. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Non ! elle va trop bien.<br class="autobr" /> Je n'ai pas eu gain de cause, mais dans un travail d'équipe on n'a pas le droit d'agir seul contre tous ; car si on le fait on perd toute chance de pouvoir continuer à travailler. Je n'ai donc pas tenu ma promesse, et quinze ans après je n'en suis toujours pas remis.</p> <p>Vous ne pouvez pas vous permettre de lutter toute seule : non seulement vous n'y survivriez pas mais votre sacrifice n'aurait aucune efficacité.</p> <p>Un dernier mot : l'utilisation de l'Hypnovel® dans un tel contexte n'a pas de sens, elle est disproportionnée et inadéquate ; mais je ne la crois pas dangereuse. La principale caractéristique de l'Hypnovel® est son extraordinaire brièveté d'action, et si la dame dort longtemps c'est pour une autre raison, qu'il faudrait regarder. En tout cas je ne crois pas que le risque, notamment nutritionnel, que vous évoquez soit réel.</p> <p>Mais je ne suis pas sur place.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Le droit au risque chez la personne âgée 2023-03-28T15:23:32Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article63#comment17975 2023-03-28T15:23:32Z <p>bonjour,<br class="autobr" /> je voudrais si je peux faire un droit de retrait par rapport à une toilette d'une personne agée sous hypnovel, car cette dame est soit disant agressive et crispée lors de la toilette faite en binome (transmission aux ides)<br class="autobr" /> Plusieurs fois j'ai effectué la toilette au lit à cette dame ( en ayant demandé à l'infirmière de ne pas injecter le produit)<br class="autobr" /> Avec un système d'approche non médicamenteuse (snoezelen, musique douce, approche en douceur, ....) tout s'est très bien passé, s'est même endormie avant la fin de la toilette<br class="autobr" /> les collègues demandent d'augmenter l'injection et que celle-ci soit faite tous les jours !!!<br class="autobr" /> lors des transmissions j'ai refusé que l'injection soit faite et de revoir la façon d'approcher cette dame<br class="autobr" /> Car lorsque l'injection est faite, la résidente reste endormie, ce qui engendre un manque d'hydratation, et alimentaire, puisque cette dame dort<br class="autobr" /> je viens d'avoir quelques de congés, si dans le cas ou l'injection est faite en systématique tous les jours, ai je le droit de refuser d'effectué la toilette de cette dame en faisant prétendre un droit de retrait, je ne veux pas cautionner ce genre de technique<br class="autobr" /> Merci d'avoir pris le temps de me lire, et de me renseigner sur ce droit de retrait<br class="autobr" /> Cordialement<br class="autobr" /> Laurence L.</p> Les pauses respiratoires 2023-03-19T12:40:27Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article77#comment17973 2023-03-19T12:40:27Z <p>Article très précis.</p> <p>Beaucoup d'informations.</p> <p>Merci et bonne journée.</p> Le diabète en fin de vie 2023-03-14T19:00:15Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article79#comment17967 2023-03-14T19:00:15Z <p>Bonsoir, Muriel.</p> <p>Le tableau que vous dressez est assez sinistre, et je crains que vous ne connaissiez déjà la réponse à votre question.</p> <p>Malheureusement il existe des situations de ce type : ce qui est peut-être le plus frappant c'est que non seulement votre frère ne s'occupe pas de lui, mais il ne s'occupe pas davantage de son environnement. J'en ai vu plus d'un, surtout à la campagne (bien souvent c'est le maire du village qui, excédé par les plaintes récurrentes des voisins, prend son téléphone et appelle l'hôpital, sans s'aviser que dans un pays de droit l'hôpital ne peut pas admettre quelqu'un contre son gré). On se demande toujours s'il n'y a pas une pathologie psychiatrique sous-jacente face à un sujet qui perd à ce point le sens des réalités et des convenances sociales ; sans beaucoup de preuves on évoque une démence, mais la démence a bon dos ; dans d'autres cas on parle de syndrome de Diogène (<a rel='nofollow'>voyez par exemple https://www.syndrome-diogene.fr/</a>), mais si j'ai ma propre collection de personnes ayant répondu à cette définition cela ne me proue même pas que cette pathologie existe réellement. Peu importe d'ailleurs : à supposer qu'on arrive à faire un diagnostic on serait bien en peine de proposer un traitement.</p> <p>Donc vous voilà impuissantes, et vous allez le rester. La seule solution serait d'obtenir une mise sous tutelle en urgence. Le plus rapide serait de faire un courrier au Procureur de la République en expliquant la situation. Mais c'est très théorique, et vous imaginez sans peine la réaction de votre frère : il n'y a pas une chance sur mille pour qu'il se trouve soulagé par ce passage en force qui le dédouanerait de toute responsabilité et de tout effort.</p> <p>Mais il y a deux autres points à considérer.</p> <p>Le premier est le pronostic qu'on peut poser. Vous pensez bien que, n'ayant pas vu la situation, je ne vais pas m'aventurer à vous dire des choses catégoriques. Mais avec un diabète aussi déséquilibré, présentant des troubles vasculaires majeurs (ne rêvons pas : si les artères de ses jambes sont bouchées, ses coronaires, ses carotides le sont aussi) et des escarres, même avec les soins les plus attentifs, on n'évitera pas la catastrophe.</p> <p>Le second est qu'il le sait peut-être. Je veux dire que si je me trouvais dans cet état (du moins tel que je m'en fais l'idée) il se pourrait que je décide qu'il faut me considérer comme en soins palliatifs. Ou pour le dire autrement, je serais sans doute tenté d'invoquer l'article L-1110-5-2 du Code de la Santé Publique qui dispose : <i>À la demande du patient d'éviter toute souffrance et de ne pas subir d'obstination déraisonnable, une sédation profonde et continue provoquant une altération de la conscience maintenue jusqu'au décès, associée à une analgésie et à l'arrêt de l'ensemble des traitements de maintien en vie, est mise en œuvre dans les cas suivants : (…) 2° Lorsque la décision du patient atteint d'une affection grave et incurable d'arrêter un traitement engage son pronostic vital à court terme et est susceptible d'entraîner une souffrance insupportable</i>. Il se peut fort bien que votre frère l'ait compris (plus ou moins clairement) et que son refus de soins soit une décision que nous devons respecter.</p> <p>Je dois cependant m'arrêter : pour vous en dire davantage (et même pour vous dire cela), il faudrait que je connaisse la situation ; et il faudrait encore plus que je connaisse votre frère.<br class="autobr" /> Alors je comprends votre inquiétude. Tout ce que je peux dire c'est qu'une fin de vie insupportable n'est pas l'éventualité la plus probable : il y a de fortes chances pour que les choses se terminent (et peut-être très vite) par un coma diabétique, qui présente au moins le mérite d'être paisible : nous le savons parce que, Dieu merci, dans la quasi-totalité des cas un coma diabétique bien traité guérit, ce qui fait que les malades peuvent nous raconter ce qu'ils ont vécu ; et ils ne racontent rien.</p> <p>Ce n'en est pas moins très triste.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Le diabète en fin de vie 2023-03-14T01:46:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article79#comment17966 2023-03-14T01:46:12Z <p>Bonsoir, mon frère a subit une amputation pied gauche, pied droit il s avère qu une amputation jusque la cuisse est envisageable. Mon frère refuse tous soins et l hôpital l a fait rentrer chez lui. Son état se dégrade (4gr/l) escarre pied droit et talon. Les infirmiers ne veulent pas venir pour les soins (logement sale et manque d'hygiène) il ne veut pas de lit médicalisé. Nous sommes impuissantes nous ses soeurs. Que va t il se passer svp. Je me prépare au pire mais lui partir dans de telles conditions..... merci pour votre aide</p> L'agonie 2023-02-25T20:45:18Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17936 2023-02-25T20:45:18Z <p>Bonsoir Michel.</p> <p>Merci pour cette constructive réponse qui m'a éclairée là où je ne pensais pas avoir besoin de l'être. <br class="autobr" /> Sans vouloir davantage puiser de votre temps, permettez-moi d'apporter quelques précisions.</p> <p>« - Je ne crois pas que vous auriez rempli ce rôle aussi parfaitement si vous aviez eu trop de certitudes… »</p> <p>Cette phrase dit tout ce que j'avais à comprendre. Vous avez parfaitement raison. Si l'on m'avait dit « le cerveau de votre maman ne fonctionne plus », je n'aurais pas prononcé les phrases (que j'ai oubliées) lors des adieux dans la chambre d'hôpital, et je n'aurais pas pu jouer ce « rôle » dans cette cérémonie dont vous parlez. Pas de la même manière en tous cas.</p> <p>Je voudrais préciser que je n'ai jamais eu aucun ressenti vis à vis des médecins. Je les remercie pour leur travail et leur bienveillance.</p> <p>« C'est très fréquent en effet ; mais je ne suis pas sûr d'avoir compris pourquoi vous dites ça… »</p> <p>Juste dans le doute où c'est moi seule qui n'aurais pas eu l'information au sujet de la mort encéphalique…</p> <p>Concernant la chatte, oui, j'ai bien conscience de questionner en dehors du sentier, quoi que… si elle a lu Goethe.</p> <p>« Et je sens bien que derrière la question de la chatte il y a celle de savoir si votre mère a pu ressentir quelque chose, et notamment quelque chose de pénible. »</p> <p>Non, aucunement. <br class="autobr" /> Avant que ma mère ne soit dans le comas, je me suis questionnée sur son état réel de souffrance et de conscience. On ne saura jamais ; c'est un mystère que j'ai accepté avec le temps. <br class="autobr" /> Dans son état de mort cérébrale, la tranquillité qu'elle affichait sur son visage était un soulagement qui m'a aussi permis d'accepter son décès relativement facilement, en l'occurrence plus facilement que d'autres personnes qui ne l'ont pas vue agitée après l'accident.</p> <p>« J'ai une petite collection personnelle de faits étranges qui se sont produits à l'occasion de décès, et dont je ne parle à personne, »</p> <p>Alors merci d'en avoir dévoilé un échantillon. <br class="autobr" /> Deux choses retiennent mon attention : le bruit et la coïncidence de l'heure… <br class="autobr" /> D'une part, il m'arrive d'avoir l'impression d'être réveillée par un bruit fracassant (du genre volet qui claque ou voix forte…) et qu'on me dise qu'il n'y a rien eu du genre.<br class="autobr" /> D'autre part, je pense que les coïncidences sont probablement de connivence avec nos intuitions, et tout le mystère de la pensée méandreuse qui va avec.<br class="autobr" /> Mais, comme vous, il m'est arrivé de m'émerveiller devant l'étrangeté de quelque évènement sans que mon esprit rationnel n'en soit toutefois chagriné. <br class="autobr" /> Le mystère des connexions…</p> <p>Bien cordialement,</p> <p>Delphine</p> L'agonie 2023-02-20T21:42:30Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17929 2023-02-20T21:42:30Z <p>Bonsoir, Delphine, et merci de votre message. Merci de votre lucidité, et de la clarté de votre analyse. Oui, il y a des choses auxquelles il nous faut répondre, et d'autres qui, comme vous le soulignez, doivent rester dans le mystère. Je le répète : nous parlons de la mort, et radicalement sur la mort nous ne savons rien, sinon que l'enjeu du trépas est pour nous qui le vivons d'accepter cette séparation, ce que nous ne pouvons faire qu'en acceptant que l'être cher s'en aille sur une voie que nous ne connaissons pas, et à un rythme que nous ignorons ; nous ne savons même pas quand exactement il meurt.</p> <p>Car j'ai tendance à penser, et certes je ne suis pas le seul, à dire que je meurs quand je perds définitivement la possibilité d'interagir avec mon entourage : le ressentir ou lui manifester mon être-là. Mais cette définition pose bien plus de problèmes qu'elle n'en résout : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Définir un état en considérant, comme critère essentiel, ce qui se passe après lui, cela ne vaut pas un clou : on ne peut que constater le décès, et dans l'instant précis où on y assiste on n'a aucun moyen de le savoir ; surtout quand on en a peu vu. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Tout ce que j'ai su faire c'est annoncer assez précisément le moment où la respiration va s'arrêter. Sur le plan que j'ose appeler liturgique, c'est très efficace ; mais cela revient à abandonner le critère de la conscience pour en revenir à l'arrêt cardio-respiratoire, critère auquel presque plus personne ne croit. Or nous savons bien que quand la fonction cardio-respiratoire s'effondre il y a déjà un bon moment que la conscience a disparu. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Une expérience de pensée peut permettre de le comprendre. Supposons un patient qu'on endort pour une intervention chirurgicale. Il perd conscience au début de l'anesthésie. Or la chirurgie se passe mal, et de complication en complication le malade ne se réveille pas. Quand est-il mort ? Et il ne sert à rien de rétorquer que l'expérience de pensée a ses limites et que le malade meurt quand les complications sont devenues irréversibles. Car bien malin qui pourrait préciser laquelle des étapes de l'agonie est absolument irréversible.</p> <p>Non : la seule chose que je sais, c'est que pour la plupart les mourants parcourent un chemin qui, à l'expérience, me semble suffisamment stéréotypé pour que je puisse le décrire, sans jamais perdre de vue que si je le fais ce n'est que de l'extérieur.</p> <p>Et je dis : la plupart. Car l'agonie ne peut se développer que si les circonstances lui en laissent le temps. Le guillotiné n'agonise pas. C'est ce qui pourrait faire, si du moins on consent à ne pas tenir l'histoire pour tout simplement légendaire, que Goethe serait mort en s'écriant : « La lumière ! ».</p> <p>C'est ce qui s'est passé pour votre mère. Elle a été frappée brutalement d'un accident qui, tant qu'il n'est pas survenu, ne donne aucune manifestation. La réanimation a fait son œuvre, et, pris un par un, les troubles dont elle souffrait n'avaient aucune raison d'être irréversibles. Les mesures d'assistance physiologique (respirateur, etc.) auraient très bien pu être efficaces (d'ailleurs si les réanimateurs n'y avaient pas cru ils se seraient, en intervenant, rendus coupables d'acharnement thérapeutique). Le problème est que la réanimation brouille toutes les cartes, et qu'il n'est guère question de décrire une agonie en réanimation ; pas comme je le fais, en tout cas.</p> <p>Ce qui vous a été proposé le jour de son décès était, comme vous l'avez parfaitement compris, un faux-semblant ; une mascarade ? non : une cérémonie. Les soignants ont fait ce qu'ils ont pu pour vous offrir quelque chose dont on pouvait espérer qu'ils pourraient vous tenir lieu d'agonie. Vous n'avez pas été dupe. Il ne faut pas leur en vouloir.</p> <p><i>Nous étions venus dire nos adieux à une personne qui, selon le scientifique, ne nous entendait pas, mais qui, selon l'humain croyant ou feignant de croire (médecin ou proche…) pouvait, qui sait, encore nous entendre (comme on se l'imagine dans le cas d'un comateux)</i>.</p> <p>Ce que je disais le plus souvent était de cet ordre ; mais je me souviens que j'ajoutais : « Vous savez, nous n'avons pas tellement le choix : si nous partons du principe qu'elle n'a aucune conscience de notre présence, qu'est-ce que nous faisons là ? »</p> <p><i>Personnellement, j'aurais préféré avoir une information claire et nette sur l'état cérébral de ma mère avant de la voir, car après coup, j'ai eu un peu l'impression d'avoir été dupée, d'avoir parlé dans le vide, à la différence près que j'ai parlé « à ma mère » pour mes proches. Car mes paroles étaient indirectement mais volontairement adressées à eux en réalité, et non à ma mère inerte</i>.</p> <p>Je crois que je comprends (il y a beau temps que je ne dis plus : « je comprends » ; ou, pire : « je sais ce que vous ressentez ») ce que vous voulez dire. Mais je dirais trois choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On aurait eu du mal à vous donner loyalement « une information claire et nette » : tout de même il y a encore beaucoup d'incertitudes, et si vous avez suivi « l'affaire Vincent Lambert » vous avez noté que malgré tous les efforts des neurobiologistes on a encore un peu de chemin à faire pour y voir clair dans les niveaux de conscience des malades dans le coma. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Vous avez parfaitement senti que vous étiez, pour vos proches, l'officiante d'une cérémonie. C'est exactement ce que je vous disais. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je ne crois pas que vous auriez rempli ce rôle aussi parfaitement si vous aviez eu trop de certitudes…</p> <p><i>Je pense que dans ce contexte, à moins d'y être explicitement invité par les proches, le corps médical doit rester le plus précis et rationnel possible dans sa communication, en ne préjugeant pas de « la pensée magique » propre à chacun</i>.</p> <p>Sauf que : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si je veux être parfaitement précis et rationnel, je ne vais pas avoir grand-chose à dire. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je suis moi aussi dans la cérémonie…</p> <p><i>C'est pourquoi je me demande si l'information n'a pas tout de même été transmise à l'un de mes proches qui ne l'aurait pas « entendue »</i>.</p> <p>C'est très fréquent en effet ; mais je ne suis pas sûr d'avoir compris pourquoi vous dites ça…</p> <p><i>Notre chatte</i></p> <p>Vous avez conscience de me sortir de mon domaine de compétence ?</p> <p><i>est morte d'une insuffisance rénale. La nuit, elle a dormi dans mes bras et à mon réveil j'ai senti des spasmes de plus en plus violents dans ses pattes avant. J'ai regardé ses yeux ; ils étaient grand ouverts. J'ai compris que c'était la fin. Devant cet état comateux (confirmé plus tard par la vétérinaire), nous avons décidé d'appeler la clinique pour amener la chatte dans le but d'abréger son « agonie ». Était-elle vraiment inconsciente ou seulement paralysée ?<br class="autobr" /> Souffrait-elle ? À priori non mais il s'est passé une chose que je n'ai pas lue ici au sujet des agonies humaines.</i></p> <p>Je ne sais absolument pas ce qu'il en est pour les chats ; mais je sais ce qu'il en est pour les humains. Car il ne manque pas de malades en coma urémique qu'une bonne dialyse a sortis de là. Pour autant qu'on puisse faire confiance à cette expérience il semble que parmi les manifestations du coma urémique il y a une agitation, volontiers spectaculaire, qui fait croire à des douleurs ou des inconforts, mais le malade ne les ressent pas.</p> <p><i>J'étais partie de la pièce pour me préparer ; je n'ai pas entendu ce que mon mari, alors un peu plus près, a entendu, à savoir un miaulement qui lui a semblé assez fort et long « comme un enfant qui crierait » a-t-il dit. Nous avons sitôt accouru. La chatte s'est mordu la langue dans un dernier soubresaut qui nous a semblé marquer sa fin. Mon mari disait qu'elle ne respirait plus. Nous avons posé chacun notre tête sur son ventre et entendu un ronronnement, et pour ma part un dernier battement du cœur</i>.</p> <p>Je ne vous en dirai pas grand-chose. Voulez-vous trois hypothèses ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un infarctus massif et brutal venant compliquer une insuffisance rénale terminale chez une patiente semi-comateuse. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Une crise d'épilepsie, banale là aussi dans ce contexte, avec un coma post-critique qui aura suffi à conduire au décès. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Une chatte qui a lu Goethe.</p> <p><i>Donc ma question est au sujet de ce miaulement/cri. Difficile d'en parler précisément car je ne l'ai pas entendu, ce qui me fait penser que mon mari a peut-être amplifié le phénomène dans le ressenti de sa propre émotion.</i></p> <p>Votre mari a très bien pu se laisser déborder par ce qu'il a cru entendre. Mais ce que nous devons tenir ferme c'est qu'au moment de la mort nous ne maîtrisons absolument rien. Ce qui nous impose de faire une place au mystérieux, à l'irrationnel, à l'incroyable. J'ai une petite collection personnelle de faits étranges qui se sont produits à l'occasion de décès, et dont je ne parle à personne, de peur de passer pour encore plus dingo que je ne suis. Comme cette nuit où j'ai été réveillé par un claquement brutal, comme celui d'un volet (mais la maison n'avait pas de volets) à l'exacte minute où à dix kilomètres de là est décédée une patiente que j'avais veillée toute la fin de journée ; les enfants m'ont appelé tout de suite après, c'est comme ça que je connais l'heure du décès. Comme je suis un scientifique, je ne tire aucune conclusion d'un cas isolé.</p> <p><i>Est-ce que cela correspond, comme je le pense, à une dernière manifestation inconsciente du corps (comme le râle ou le réflexe étudié des cuisses de grenouilles…) ou serait-il possible, malgré tout, qu'il y ait eu alors comme une dernière étincelle de conscience faisant de ce cri le témoin d'une douleur ou d'une peur, alors que tout indiquait un état comateux ?</i></p> <p>Joker, Delphine. Et je sens bien que derrière la question de la chatte il y a celle de savoir si votre mère a pu ressentir quelque chose, et notamment quelque chose de pénible. Mais franchement je ne le crois pas : dans ce que nous nous racontons sur l'agonie, je prends le pari que nous surestimons le degré de conscience résiduelle du mourant ; et nous le faisons parce que c'est le seul moyen que nous avons de supporter ce que nous faisons dans sa chambre.</p> <p><i>Je présume que mon doute est accentué par le fait que je n'ai pas eu accès à cette réalité que l'on m'a rapportée. Par conséquent, mon imagination doit pallier ce manque avec une marge de déformation que je ne mesure pas bien</i>.</p> <p>Et… Ça n'a aucune importance. Je vous le redis : l'incertitude, le doute, voilà ce qui vous a permis de tenir, et de tenir aussi bien, votre rôle dans ce qui s'est passé. Et je suis parfaitement conscient de ce que ma réponse a de faible et de frustrant.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> L'agonie 2023-02-18T20:45:00Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17926 2023-02-18T20:45:00Z <p>Bonjour,</p> <p>Après avoir lu une quantité signifiante de commentaires, souvent en commençant par les réponses, je ne peux que remercier les personnes qui vous ont permis, Michel, d'apporter ce supplément de réflexions à l'article, car ces échanges sont tout aussi enrichissants.</p> <p>Je constate l'évolution qu'il y a dans vos propos au fil du temps, la prudence et les nuances qui se sont installées. C'est le paradoxe logique de la connaissance qui nous semble s'amenuiser au fur et à mesure qu'elle grandit en nous.</p> <p>En conséquence, je ne suis pas certaine de ce que j'ai cru apprendre du début de ma lecture au regard des situations personnelles qui m'ont amenée en ce lieu.</p> <p>Cependant, la part entre mes doutes (qui appellent à des réponses possibles) et ce qui est de l'ordre du mystère (et qui doit le rester), se fait plus claire dans ce cheminement de pensée qui est finalement tout ce qui compte.</p> <p>Permettez-moi d'apporter également ma pierre à cet édifice que sont les témoignages, dans l'idée que ces partages nous aident tous à mieux gérer nos expériences passées et à nous préparer à celles à venir.</p> <p>Ma mère a subi une rupture d'anévrisme de l'aorte. Après avoir été ranimée, elle est restée dans un état d'agitation ponctué d'instants où elle s'endormait, ou tombait dans le comas, je ne sais pas… Elle à été transférée dans une autre ville quelques heures après dans la nuit. Le lendemain matin, on nous a appelé pour lui faire nos adieux avant de débrancher les appareils qui la « tenait en vie ». Sauf que pour moi elle était déjà morte.</p> <p>Je m'explique. Lorsque nous sommes entrés dans la chambre, je ne savais pas clairement dans quel état était ma mère en dehors du fait que son cœur et son système respiratoire fonctionnaient grâce aux machines. C'est plus tard, lors de notre prise en charge par le médecin pour répondre à nos questions, que j'ai énoncé le fait qu'elle était en « mort cérébrale ». Le médecin a confirmé que l'activité cérébrale avait cessé de façon irrémédiable. « Donc pour moi elle est morte » ai-je rétorqué de manière aussi à mettre en lumière cet état de fait auprès de mes proches qui n'étaient peut-être pas encore prêts à envisager la situation sous cet angle.</p> <p>Nous étions venus dire nos adieux à une personne qui, selon le scientifique, ne nous entendait pas, mais qui, selon l'humain croyant ou feignant de croire (médecin ou proche…) pouvait, qui sait, encore nous entendre (comme on se l'imagine dans le cas d'un comateux).</p> <p>Personnellement, j'aurais préféré avoir une information claire et nette sur l'état cérébral de ma mère avant de la voir, car après coup, j'ai eu un peu l'impression d'avoir été dupée, d'avoir parlé dans le vide, à la différence près que j'ai parlé « à ma mère » pour mes proches. Car mes paroles étaient indirectement mais volontairement adressées à eux en réalité, et non à ma mère inerte.</p> <p>Je pense que dans ce contexte, à moins d'y être explicitement invité par les proches, le corps médical doit rester le plus précis et rationnel possible dans sa communication, en ne présageant pas de « la pensée magique » propre à chacun. C'est pourquoi je me demande si l'information n'a pas tout de même été transmise à l'un de mes proches qui ne l'aurait pas « entendue ».</p> <p>Quoiqu'il en soit, ce n'est plus tellement la mort de ma mère qui me pose questionnement, mais plutôt celle de mon chat (je sais que le sujet animal a été évoqué plus tôt dans les commentaires).</p> <p>Notre chatte est morte d'une insuffisance rénale. La nuit, elle a dormi dans mes bras et à mon réveil j'ai senti des spasmes de plus en plus violents dans ses pattes avant. J'ai regardé ses yeux ; ils étaient grand ouverts. J'ai compris que c'était la fin. Devant cet état comateux (confirmé plus tard par la vétérinaire), nous avons décidé d'appeler la clinique pour amener la chatte dans le but d'abréger son « agonie ». Était-elle vraiment inconsciente ou seulement paralysée ? Souffrait-elle ? À priori non mais il s'est passé une chose que je n'ai pas lue ici au sujet des agonies humaines.</p> <p>J'étais partie de la pièce pour me préparer ; je n'ai pas entendu ce que mon mari, alors un peu plus près, a entendu , à savoir un miaulement qui lui a semblé assez fort et long « comme un enfant qui crierait » a-il dit. Nous avons sitôt accouru. La chatte s'est mordu la langue dans un dernier soubresaut qui nous a semblé marquer sa fin. Mon mari disait qu'elle ne respirait plus. Nous avons posé chacun notre tête sur son ventre et entendu un ronronnement, et pour ma part un dernier battement du cœur.</p> <p>Donc ma question est au sujet de ce miaulement/cri. Difficile d'en parler précisément car je ne l'ai pas entendu, ce qui me fait penser que mon mari a peut-être amplifié le phénomène dans le ressenti de sa propre émotion.</p> <p>Est-ce que cela correspond, comme je le pense, à une dernière manifestation inconsciente du corps (comme le râle ou le réflexe étudié des cuisses de grenouilles…) ou serait-il possible, malgré tout, qu'il y ait eu alors comme une dernière étincelle de conscience faisant de ce cri le témoin d'une douleur ou d'une peur, alors que tout indiquait un état comateux ?</p> <p>Je présume que mon doute est accentué par le fait que je n'ai pas eu accès à cette réalité que l'on m'a rapportée. Par conséquent, mon imagination doit pallier à ce manque avec une marge de déformation que je ne mesure pas bien.</p> <p>En vous remerciant.</p> Le tutoiement 2023-01-23T05:40:37Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article23#comment17891 2023-01-23T05:40:37Z <p>Bonjour, Tessa, et merci de cette appréciation ; je suis heureux d'avoir pu vous rendre service.</p> <p>J'attire cependant votre attention sur un point : j'ai écrit cet article voici maintenant bien des années. Je parie que si je devais le réécrire je serais beaucoup plus nuancé.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Le tutoiement 2023-01-20T14:59:36Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article23#comment17886 2023-01-20T14:59:36Z <p>Bonjour, je suis étudiante infirmière en 3ème année et je fais mon mémoire sur l'utilisation du tutoiement dans la prise en soins des personnes en situation de handicap dans les MAS. Je viens de lire votre article, il est très intéressant et très sensé. Merci beaucoup de m'avoir permis de lire ceci pour accentuer mes idées !</p> L'agonie 2023-01-15T15:50:57Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17874 2023-01-15T15:50:57Z <p>Bonsoir, Guillaume, et merci de votre message. Je suis fier d'avoir pu vous rendre ce service.</p> <p>Vous avez effectivement vécu une expérience très étrange, et très déstabilisante ; je ne comprends sans peine. J'y ajouterai une particularité : l'évolution de votre père est très inhabituelle, fatale peu de jours après la découverte d'un cancer. Cela se produit : il y a des cancers qui siègent dans des localisations où ils peuvent se développer sans faire parler d'eux, de sorte qu'on ne les découvre qu'à un stade très avancé ; mais il faut aussi envisager l'hypothèse que le décès ait été dû en fait à une complication brutale, cardiaque, embolique, que sais-je. Je vous dis cela parce que quand les évolutions sont foudroyantes, comme c'est le cas ici, l'agonie a rarement le temps de s'installer.</p> <p>Cela complique notre situation. Car votre père était <i>dans un état de coma agonique</i>, Je n'en sais rien, je ne l'ai pas vu. Mais le coma et l'agonie sont deux choses différentes. Un coma est un trouble de la conscience, réversible près d'une fois sur deux, et sur lequel on a fini par apprendre pas mal de choses. L'agonie, par définition est une situation irréversible dans lequel le trouble de la conscience est très progressif et très difficile à quantifier.</p> <p>Mais on voit immédiatement le problème posé par cette définition : une fois que j'ai dit que l'agonie est une situation irréversible, j'ai exclu qu'il puisse y avoir des agonies réversibles… Ce ne sont pas les faits qui me font dire que l'agonie est irréversible, c'est seulement la manière dont je les décris ; pour le dire autrement, ça me fait penser à ce grand pédopsychiatre français qui devant un parterre d'étudiants dont j'étais, exécutait Bettelheim en disant : « Certains auteurs ont prétendu qu'ils avaient guéri des enfants autistes. Mais c'est faux : ces enfants n'étaient pas autistes ; la preuve en est que l'autisme ne se guérit pas ». Je ne crois pas une seconde que Bettelheim ait guéri des autistes, mais il me semble que le raisonnement de ce pédopsychiatre pose question.</p> <p>C'est pourquoi, et sans avoir de réponse, je vais jusqu'à me demander si l'agonie existe en tant que telle, ou si ce ne serait pas plutôt une illusion née de ce que nous observons. Je vais vous donner un autre exemple, sur lequel ma paresse seule m'empêche de travailler.</p> <p>Tout le XIXe siècle a été hanté par la chlorose des jeunes filles. Vous trouvez ça chez Balzac, chez Dumas, chez Zola, partout. Il s'agissait d'une maladie terrible, qui touchait la quasi-totalité des jeunes filles, qui se traduisait par de multiples symptômes provoquant un affaiblissement progressif et aboutissant volontiers à la mort. Je passe sur les détails, ce n'est pas le lieu, je me borne à ajouter que le traitement le plus efficace était le mariage.</p> <p>Que s'est-il passé ? Faute d'avoir étudié cette maladie je n'en sais trop rien. Mais je crois le voir. Des médecins ont observé des troubles (qui correspondaient probablement à des anémies par carence en fer) chez des jeunes filles. Ils se sont aperçus qu'elles présentaient des faiblesses, de la nervosité, de la pâleur, de l'essoufflement. Bien entendu ils n'avaient aucun moyen de doser leur taux de fer, donc de comprendre le mécanisme du trouble. Ils ont donc défini la chlorose comme la maladie qui se manifeste par des faiblesses, de la nervosité, de la pâleur, de l'essoufflement. Puis ils ont vu d'autres jeunes filles par exemple hystériques, qui présentaient des faiblesses, de la nervosité, des rougeurs, de l'essoufflement. Ils ont donc dit que la chlorose se manifeste par des faiblesses, de la nervosité, des pâleurs ou des rougeurs, de l'essoufflement. Mais il y avait aussi des jeunes filles qui présentaient des faiblesses, de l'abattement, des pâleurs ou des rougeurs, de l'essoufflement. La chlorose se manifeste donc par des faiblesses, de la nervosité ou de l'abattement, des pâleurs ou des rougeurs, de l'essoufflement. Etc. De proche en proche toutes les jeunes filles étaient chlorotiques ; et cela a duré jusqu'à ce qu'on sache faire des prises de sang.</p> <p>Ne nous moquons pas : c'est comme cela que depuis toujours nous créons le répertoire des maladies Quand le SIDA est apparu, il s'agissait d'une situation qui associait des cancers de la peau et des infections respiratoires chez des homosexuels. Il a fallu du temps avant de voir le virus derrière. Et cela ne va pas de soi : je peux très bien me demander si le diabète est la même maladie quand le patient a les yeux bleus que quand il a les yeux marrons ; il faut une longue étude pour décider que, visiblement, il n'y a pas de différence, et que par conséquent la couleur des yeux n'est pas un critère pertinent. Et il suffit de réfléchir à la manière dont nous posons le diagnostic de maladie d'Alzheimer pour flairer que nous ne sommes pas au bout de nos surprises.</p> <p>La même question se pose quand il s'agit de décider ce qui est cause et ce qui est conséquence. Les enfants qui sucent leur pouce ont souvent le palais déformé et la mâchoire inférieure en retrait. On ne se demande pas si c'est parce qu'ils sucent leur pouce qu'ils ont le palais déformé et la mâchoire inférieure en retrait, ou si c'est parce qu'ils ont le palais déformé et la mâchoire inférieure en retrait qu'il leur est souvent agréable de sucer leur pouce.</p> <p>Je n'en finirais pas.</p> <p>Ce que je veux vous montrer c'est que nous ne sommes sûrs de rien quand nous parlons de l'agonie. Nous croyons observer une séquence d'événements qui se succèdent dans un ordre relativement constant. Ce que nous observons nous paraît compatible avec ce qui se passerait si les organes vitaux se mettaient à tomber en panne les uns après les autres. N'allons pas trop vite : nous serions bien en peine de dire que tel symptôme correspond à l'arrêt de la fonction rénale, tel autre de la fonction hépatique, etc. Il n'est même pas certain que cette constellation de symptômes corresponde vraiment à une évolution réelle. Tout ce que je peux dire c'est que je l'ai souvent observée, et qu'il me paraît plausible que cela traduise cet état singulier que je nomme agonie.</p> <p>L'enjeu est énorme : car rien n'est plus difficile que de faire la différence entre une vieille personne qui dort et une vieille personne qui meurt. Et je ne compte plus le nombre de fois où je me serai fait piéger, annonçant à contretemps une mort imminente et inversement. Ma seule consolation est d'avoir constaté que les autres font pire. Mais… comment construire une étude scientifique solide sur un tel sujet ?</p> <p>Et je me demande si c'est vraiment le plus important.</p> <p>Car, et notamment à cause de cette incertitude, le moment du trépas est celui de tous les fantasmes, pour l'entourage comme pour les soignants. Je n'en connais pas de preuve plus éclatante que ce détail que tout le monde connaît : il faut quelqu'un pour fermer les yeux du défunt ; et on le sait depuis la nuit des temps. Pour ma part j'ai assisté à un bon millier de décès, et il ne m'est <i>jamais</i> arrivé de fermer les yeux d'un mort ; tous les trépassés que j'ai connus étaient morts les yeux fermés. Pas exactement : il arrive que certains meurent les yeux ouverts ; je n'en connais pas la raison, mais ce que je sais c'est que quand cela se produit <i>il est impossible de les leur fermer</i>, au point qu'on doit recourir à des artifices, comme l'instillation d'eau sucrée qui en séchant va constituer une colle. Bref ce geste sur lequel tout le monde est d'accord est un geste qui n'existe pas. Puissance de l'imaginaire.</p> <p>Or cette incertitude sur ce qui se passe est une donnée anthropologique majeure. Deux points sont à considérer : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Quand je meurs, il se produit deux choses, qui n'ont absolument rien à voir entre elles, sinon qu'elles se produisent en même temps : il y a moi qui perds la vie, et il y a vous qui me perdez. Je veux dire par là que la mort ne peut se penser en dehors d'un phénomène concernant un groupe. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Nous ne savons rien sur la mort. Épicure a raison : tant qu'on est vivant la mort n'est pas là, quand la mort est là on n'est plus vivant, donc la mort n'est rien pour le vivant.<br class="autobr" /> De ces deux points il résulte que ces mille personnes que j'ai vu mourir ne m'ont rien appris sur la mort, et que je n'en saurai jamais rien.</p> <p>Ce que j'ai à faire quand je vois mourir un être cher, c'est de consentir à le laisser partir sur un chemin que je ne connais pas pour se rendre en un lieu dont j'ignore tout. Non seulement c'est inévitable, mais c'est très bien ainsi. Du coup il faut regarder autrement ce que nous faisons : le service nous appelle pour nous dire qu'il faut venir ; et nous croyons que nous y allons pour ne pas laisser celui que nous aimons affronter seul l'épreuve du trépas ; et nous réduisons le problème à la question de savoir s'il nous entend, s'il est sensible à notre présence, s'il reçoit nos paroles. Personnellement j'y crois ; mais je sais que ce n'est pas le problème. D'ailleurs j'ai sans la moindre vergogne expliqué à des familles qui me demandaient si le mourant percevait leur présence que, oui, même dans cet état, quelque chose passait ; et quand l'instant d'après elles me demandaient si, par exemple, le râle agonique le faisait souffrir, j'expliquais à la satisfaction générale que dans l'état où il se trouvait il n'en percevait rien. Et le pire était que je le disais sincèrement. À la réflexion, si je dois choisir, je dirais que le trouble de la conscience est certainement suffisant pour assurer le confort de l'agonisant ; pour ce qui est de sentir la présence de ses proches, c'est nettement plus aléatoire, <i>et ça n'a aucune importance</i> : le trépas est une cérémonie, chacun y a sa place, son rôle, et les zones d'incertitude en sont les fondements.</p> <p>Ce qu'on me demandait, c'était d'endosser un rôle de prêtre ; ou plutôt de chaman. Je prenais soin de montrer que je faisais tout pour garantir le confort de l'agonisant ; je posais même des gestes techniques parfaitement inutiles, comme surveiller le pouls ou la tension, pour mettre en scène que je maîtrisais la situation, que s'il y avait quelque chose à faire je le ferais, et qu'ils pouvaient sas crainte se laisser aller à vivre ce qu'ils vivaient. Mais ce qu'on me demandait, c'était d'interpréter, de donner du sens à ce qui n'en avait peut-être aucun, ou alors un sens que personne ne connaissait. C'est la fonction du chaman : quand le sorcier jette les coquillages de divination, tout le monde sait que les coquillages tombent au hasard ; le chaman est là pour annuler le hasard en lui trouvant un sens.</p> <p>C'est pourquoi les symboles ont au moins autant d'importance que les faits. Nous sommes bien outrecuidants de repousser du pied la pensée magique. Ce que nous pouvons dire c'est que quand il s'agit de construire une fusée il vaut mieux s'en remettre à la pensée scientifique. Mais… que faisons-nous du reste ? On n'échappe pas aux symboles : quand je veux construire une maison, je commence par faire des fondations ; ce n'est pas de la symbolique, c'est de la technologie ; il n'empêche que, faisant des fondations, je manifeste que je ne peux rien élever si je n'ai pas d'abord creusé.</p> <p>Alors, comme ça, vous me trouvez cartésien ?</p> <p>Du point de vue symbolique, l'instant du trépas est un moment sans épaisseur dans lequel le mourant passe de ce monde à un autre (même si cet autre est le néant, c'est malgré tout un autre monde, tré-passer n'est pas autre chose). Il s'ensuit que pour tous les hommes il existe un moment où les cieux sont ouverts, et où le mourant se tient à la porte, en mesure de transmettre des paroles de notre monde à l'autre, et inversement ; un moment où il est chaman, où il est prophète. Nous ne pouvons nous défendre de lui parler comme pour lui donner un viatique, et c'est comme des oracles que nous recevons ses dernières paroles, qui le plus souvent ne viennent pas, ou que nous interprétons ses derniers soubresauts. Cela n'a pas de sens, bien sûr ; c'est totalement irrationnel ; mais c'est ce que nous faisons. Devant la mort il serait irrationnel de chercher à être rationnel. C'est pourquoi j'avais écrit <a href="https://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article52" class="spip_out" rel='nofollow external'>https://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article52</a></p> <p>Je peux maintenant essayer de commenter votre message.</p> <p><i>Nous avons veillé sur lui durant ses dernières 24h où il était dans un état de coma agonique, je n'avais jamais vécu ni même entendu parler de cet état, et j'ai été véritablement dépourvu d'outils logiques pour comprendre ce qu'il se passait</i>.</p> <p>Je comprends. Mais il me semble que c'est précisément cela qui importe : laisser votre père partir impliquait que vous ne compreniez pas. La logique est ici un frein ; ou une illusion ; la mort n'est pas logique.</p> <p><i>En sous-effectif, l'équipe soignante ne nous a donné aucune information (ou n'a voulu nous en donner)</i>,</p> <p>Elle ne vous a pas donné d'information : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Parce qu'elle n'avait pas le temps. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Parce qu'elle n'avait pas de formation. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Parce qu'elle n'en savait pas plus que vous. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Parce que devant cette situation elle n'en menait pas plus large que vous.<br class="autobr" /> Défaillance chronique de notre système de santé. Oui. Mais pas seulement.</p> <p><i>jusqu'à ce qu'une personne des soins palliatifs vienne nous expliquer un peu l'état de mon père que j'avais du mal a comprendre</i>.</p> <p>Oui ; il faut une culture particulière pour pouvoir parler simplement de ces choses.<br class="autobr" /> <i><br class="autobr" /> La question qui me revenait était "où est-il" ?</i></p> <p>Précisément, nous ne le savons pas, et tout l'enjeu est d'accepter, de consentir à cette ignorance.</p> <p><i>Reste la grande question, qu'est ce qui déclenche cet état final...? (Mon père est passé par absolument toutes les étapes décrites partout, le râle gargouillant des dernières 24h était sûrement le plus impressionnant...)</i>.</p> <p>Foncièrement, je n'en sais rien. D'ailleurs je ne sais pas si bien que cela de quoi on meurt quand on meurt d'un cancer. Je le sais quand le cancer érode un vaisseau et crée une hémorragie foudroyante ; je le sais quand les poumons sont tellement envahis qu'on aboutit à une défaillance respiratoire. Mais dans l'immense majorité des cas il n'y a pas d'explication satisfaisante : il vient un moment où l'organisme s'effondre.</p> <p>J'ajouterais seulement que le râle agonique est en effet très impressionnant, mais que sur ce point je peux être catégorique : ce bruit est engendré par quelque chose qui se passe, non dans les poumons mais dans la gorge. Il n'y a donc pas de trouble respiratoire associé. Comment je le sais ? Simplement parce qu'il suffit pour le faire cesser de changer le malade de position, ou de lui administrer des asséchants ; par ailleurs il existe d'autres situations, par exemple au cours d'une anesthésie, ou le patient ne meurt pas et peut raconter ce qu'il a vécu.</p> <p><i>je préfère savoir qu'on ne sait pas grand-chose, mais je m'étonne du peu d'articles scientifiques sur le sujet</i>.</p> <p>Et nous n'en aurons pas.</p> <p>Nous n'en aurons pas parce que l'étude scientifique en serait très difficile.</p> <p>Nous n'en aurons pas parce que personne n'aura jamais le Nobel avec ça.</p> <p>Nous n'en aurons pas parce que les médecins ont fait ce métier pour exorciser leur peur de la mort, pas pour la regarder dans les yeux.</p> <p>Nous n'en aurons pas parce que, du moins on peut l'espérer, ils sentent confusément qu'il vaut mieux que les choses restent comme elles sont…</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> L'agonie 2023-01-11T14:29:03Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17867 2023-01-11T14:29:03Z <p>Bonjour, <br class="autobr" /> Je vous remercie énormément pour votre papier. <br class="autobr" /> J'ai perdu mon père il y a un mois et demi, d'un cancer du poumon, il est parti en 15 jours à l'hôpital dès l'annonce du diagnostic. <br class="autobr" /> Nous avons veillé sur lui durant ses dernières 24h où il était dans un état de coma agonique, je n'avais jamais vécu ni même entendu parler de cet état, et j'ai été véritablement dépourvu d'outils logiques pour comprendre ce qu'il se passait. <br class="autobr" /> En sous effectif, l'équipe soignante ne nous a donné aucune information(ou n'a voulu nous en donner), jusqu'à ce qu'une personne des soins palliatifs viennent nous expliquer un peu l'état de mon père que j'avais du mal a comprendre. <br class="autobr" /> La question qui me revenait était "où est-il" ? <br class="autobr" /> En effet je suis monté le voir suite aux appel de l'équipe soignante qui nous ont dit toujours à demi mot que "ce serait pas mal si vous pouviez venir le voir". (Toulouse-Bourges en urgence)<br class="autobr" /> Il était dans un service de maladies infectieuse, pas en service palliatif ou gériatrique, ainsi je me suis vraiment trouvé démuni fac à cet état, j'essaie aujourd'hui de comprendre un peu mieux ce à quoi j'ai assisté, et comme vous l'expliquez très bien dans votre article, cet état agonique n'est que très peu étudié du point de vue médical, et pour avoir lu quelques papiers décrivant l'état agonique, "les signes du mourir", votre article est le premier qui fait un état des lieux du (si pauvre) savoir académique que nous avons sur cet état, et je vous remercie pour ça.<br class="autobr" /> Reste la grande question, qu'est ce qui déclenche cet état final...? (Mon père est passé par absolument toutes les étapes décrites partout, le râle gargouillant des dernières 24h était sûrement le plus impressionnant...). <br class="autobr" /> La lecture de votre article m'a fait beaucoup de bien, d'un esprit cartésien, je préfère savoir qu'on ne sait pas grand chose, mais je m'étonne du peu d'articles scientifiques sur le sujet. <br class="autobr" /> Ce message n'appelle pas forcement de réponse de votre part, il fait parti de mon processus de deuil. <br class="autobr" /> Je voulais simplement vous remercier pour votre article.</p> Parole d'une aidante 2023-01-02T12:40:43Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article133#comment17848 2023-01-02T12:40:43Z <p>Bonsoir, Valérie, et merci de ce message, qui me semble très important.</p> <p>Bien sûr il y a les aidant(e)s à domicile. Je n'en ai pas parlé parce que, ma carrière de gériatre s'étant déroulée en milieu hospitalier, je ne les ai tout simplement pas côtoyées. Mais il va de soi que ce qui se produit à l'hôpital se produit au moins autant qu'à domicile.</p> <p>Vous abordez deux points ; j'y ajouterai un troisième, même si je sais bien qu'il est largement la conséquence des deux premiers.</p> <p>Premier point : le salaire des aidants. On parle des infirmières, on parle moins des aides-soignantes, et pas du tout des autres professionnels. Et on sait parfaitement que ces salaires sont insuffisants. On sait aussi que ce n'est pas une fatalité : il existe de grandes disparités entre les pays, et il est certainement possible d'améliorer notablement les choses. Je suis frappé de voir que le système de santé français se trouve dans un état aussi inquiétant (je crois qu'il faudrait nuancer, mais peu importe) alors que la France est le second pays européen le plus dépensier en la matière, seulement dépassé par l'Allemagne, voyez <a href="https://www.insee.fr/fr/statistiques/5347718" class="spip_out" rel='nofollow external'>https://www.insee.fr/fr/statistiques/5347718</a> ; on a l'intuition que l'argent pourrait être mieux utilisé (même s'il n'est pas si facile de voir comment). Cependant, et pour aussi bien qu'on fasse, je ne suis pas sûr que les augmentations qu'on pourrait envisager révolutionneraient la situation des soignants considérés. Je sais qu'il ne manque pas de beaux esprits pour dire que les investissements dans le domaine de la santé et du social sont économiquement rentables, mais je suis au regret de dire que ce sont des gens qui se moquent du monde : les dépenses de santé sont des dépenses. Nous sommes donc dans une situation impossible : la manière dont nous rémunérons les professionnels du soin (j'exclus les médecins, dont les revendications dans ce domaine sont tout simplement insupportables) est indécente, mais il n'est pas du tout sûr que nous ayons les moyens de corriger réellement cette indécence. Surtout si on veut, en plus, embaucher. On pourrait dire que cette sous-rémunération des soignants est une situation de maltraitance.</p> <p>Second point : la dureté du travail. Et vous avez raison de souligner combien on la sous-estime. C'est la même chose à l'hôpital, à ceci près qu'en milieu hospitalier on a davantage la ressource de se partager le fardeau. Cependant la liste des cas que vous décrivez énumère des situations différentes : pour le dire très grossièrement les déments posent souvent des problèmes de comportement et d'agressivité, les malades en fin de vie affrontent à des problématiques d'accompagnement qui sont pour le professionnel source de souffrance ; les hémiplégiques y ajoutent des difficultés de manutention, de port de charges (je vous avais prévenue : je fais schématique) ; nous sommes là aussi dans une situation de maltraitance. On sait bien quels moyens doivent être mis en œuvre pour la réduire : par exemple s'agissant des troubles du comportement du dément une bonne formation, un travail en équipe, des débriefings réguliers permettent de les réduire très largement. Le problème est que ces solutions ne peuvent pas souvent être mises en œuvre de manière réaliste, et qu'il ne faudrait pas se figurer que même avec une formation approfondie on puisse désamorcer tous les troubles du comportement.</p> <p>Le point que je voudrais ajouter est précisément celui de la maltraitance. J'ai utilisé ce mot deux fois dans cette réponse, je l'ai fait en hésitant car je ne suis pas sûr que ces termes soient appropriés. Je crois (mais je ne vais pas le détailler ici) que la manière dont on a posé la question de la maltraitance (et la bientraitance n'a rien arrangé) aura été particulièrement toxique en effaçant les frontières entre les concepts, aboutissant à un salmigondis dans lequel personne ne comprend plus rien. Et je sais que je tombe dans le même travers en parlant, par exemple, de maltraitance salariale. Mais j'ai une raison de le faire. C'est que je voudrais qu'une fois de temps en temps on prenne le parti des soignants. Et qu'on le fasse résolument.</p> <p>Car les conditions de travail des soignants sont très dures. J'en sais quelque chose, moi qui ai toujours considéré qu'on ne pouvait pas être médecin, du moins en gériatrie, si on ne pratiquait pas soi-même le soin. C'est au nom de cette expérience que je parle. Et je dis : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Premièrement, que la formation est essentielle : quand un dément vous agresse c'est que vous avez fait une erreur. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Deuxièmement, que les erreurs sont inévitables, et que par conséquent les agressions le sont aussi ; quand le soignant se fait agresser, une bonne formation lui permet d'adopter le comportement adéquat ; s'il ne le fait pas, s'il se laisse aller à une réaction de contre-agressivité, avec par exemple un geste brutal, il commet une faute professionnelle. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Troisièmement, que ça c'est la théorie, et que dans la vraie vie j'aimerais bien vous y voir. Parce qu'on ne compte pas avec la fatigue, la détresse, voire simplement la surprise, ou la violence de l'attaque subie. Oui, quand le soignant maltraite, il commet une faute. Des fautes comme celles-là, j'en ai commis.</p> <p>Il existe des soignants sadiques. Sans doute. Personnellement je n'en ai jamais vu. Ce que j'ai vu ce sont des gens mal formés, mal soutenus, ou qui n'étaient pas faits pour ce métier. Ou tout simplement épuisés. Ici également l'usage inconsidéré du mot de maltraitance a brouillé les repères et n'a pas d'autre effet que de culpabiliser des soignants qui sont bien trop conscients de leurs fragilités pour avoir besoin de l'être. Il en va de même pour les erreurs médicales : il n'y a le plus souvent <i>aucun</i> rapport entre la gravité de l'erreur et la gravité des conséquences. De sorte qu'on ferait mieux d'avoir pitié des médecins.</p> <p>Tout ça pour vous dire que je suis assez pessimiste : nous avons certes une importante marge de progression, tant sur les conditions de travail que de rémunération. Mais je crois que, pour importante qu'elle soit, elle restera toujours insuffisante, et que fondamentalement ces métiers resteront durs et mal considérés, tout simplement parce que nous n'aurons jamais les moyens de faire autrement. C'est pourquoi j'aimerais qu'au moins on fiche la paix aux soignants au lieu des les accabler de simplismes.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Parole d'une aidante 2022-12-27T22:14:20Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article133#comment17842 2022-12-27T22:14:20Z <p>Il y a les auxiliaires de vie qui sont payés au salaire de l'esclavage moderne qui voient tous les jours des "bénéficiaires" de la maladie d'Alzheimer, des personnes atteintes du cancer, des êtres humains hémiplegiques dû à des avc très différents et surtout des démences sénile. Elles tapent, crachent ..... sur des soignants ....c'est quoi le plus dur en 2022 .....<br class="autobr" /> *</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-12-13T09:12:06Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17816 2022-12-13T09:12:06Z <p>Bonjour, Corinne.</p> <p>Je n'ai aucun moyen de savoir ce qui s'est passé. Si on pouvait faire de la médecine sur Internet, c'est qu'il s'agirait d'une discipline bien simple… Or ce n'est pas le cas. Tout ce que je peux faire c'est utiliser les éléments que vous me donnez pour tâcher de me faire une idée de ce qui a pu se passer. Mais : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> M'avez-vous donné tous les éléments ? Tous ceux auxquels vous avez pensé, je n'en doute pas. Mais ceux que vous avez oubliés ? Ceux qu'on ne vous a pas donnés ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Les éléments que vous me fournissez sont-ils exacts ? Que vous ne les ayez pas travestis, c'est évident. Mais vous avez pu mal interpréter certaines données, surtout si on vous les a mal expliquées, ou pas expliquées du tout ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Mon raisonnement sera-t-il exact ? Nous n'en savons rien.<br class="autobr" /> Bref, je ferais sans doute mieux de me taire, ou vous de ne pas me lire. Mais si, consciente des risques de l'entreprise, vous voulez que je vous donne un avis, je vais essayer.</p> <p><i>Mon papa atteint de maladie neurodégénérative depuis 6 ans, faisait des fausses routes</i>.</p> <p>Le terme de <i>maladie neurodégénérative</i> me dérange un peu : il recouvre un ensemble de situations qu'on peut nommer autrement. Par exemple la maladie de Parkinson est une maladie neurodégénérative ; mais dans ce cas on parle de Parkinson ; le fait que vous employez ce terme me fait penser que celui qui vous a donné ce diagnostic ne souhaitait pas vous en dire plus (ou que, comme c'est si fréquent, il vous a précisé les choses sans vérifier que vous compreniez ce qu'il disait, les médecins sont très doués pour ne pas appeler un chat un chat).</p> <p>Mais il faisait des fausses routes. Ici l'oreille se dresse instantanément. Car il peut y avoir de multiples causes de fausses routes, mais les maladies neurodégénératives qui en donnent le plus sont celles, précisément, qui forment le groupe des syndromes parkinsoniens ; il y en a de multiples formes, mais vous me parlez ensuite de troubles moteurs (<i>des troubles de la marche, des gestes pour manger seul</i>) et, plus évocateur encore peut-être, une difficulté à sortir sa voix : <i>et lorsqu'il nous parlait il n'avait plus beaucoup de voix</i>. Tout aussi caractéristique est l'aspect fluctuant des troubles : <i>parfois seulement</i>. Dans ce cadre les fausses routes sont monnaie courante.</p> <p>Ici je vous recommande de lire <a href="https://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128" class="spip_out" rel='nofollow external'>https://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128</a> . Vous y trouverez ce que je pense de cette question. Vous verrez que pour moi les fausses routes sont le plus souvent bénignes, et que les stratégies adoptées à l'hôpital pour y faire face ne me conviennent pas. Mais je dois ajouter que, pour avoir suivi un certain nombre de ces situations, les fausses routes de ces syndromes vont toujours en s'aggravant, et que le plus souvent cela finit mal : car le risque de la fausse route n'est pas l'asphyxie mais l'infection respiratoire, et il vient un moment ou le malade s'infecte, puis se réinfecte, jusqu'à l'infection de trop.</p> <p><i>Mon papa est rentré à l'hôpital pour un COVID avec en plus un Staphylocoque doré transformé en septicémie, la bactérie serait rentrée par une escarre</i>.</p> <p>Cela se peut. Mais… pardonnez-moi : vous me décrivez là une situation très grave. Ce n'est pas tant le Covid, ni même la septicémie, c'est la situation de base : non seulement ce type de malade est très fragile, mais vous me parlez d'une escarre ; et je crois comprendre que cette escarre était présente à domicile. <br class="autobr" /> Je vous renvoie là aussi à <a href="http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article39" class="spip_out" rel='nofollow external'>http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article39</a> : pour que l'escarre se développe le plus efficace est d'associer une dénutrition et une pression mal placée entre la peau et une surface osseuse. Ces deux conditions sont réunies chez ce type de malade : quoi qu'on fasse les fausses routes finissent par perturber l'alimentation et la dénutrition est inéluctable ; quant à la mobilité non seulement ce sont des sujets qui bougent moins mais surtout ils perdent les micro-mouvements inconscients qui nous permettent de ne pas avoir de surpressions durables sur notre peau.</p> <p>Rien de moins étonnant, donc, que cette escarre ; mais voilà : son apparition est un très mauvais signe, qui montre que la situation était bien plus dégradée qu'on ne pouvait le croire et qui, par sa seule présence, va entraîner une accélération de la dénutrition, créant un cercle vicieux dont on ne se sort pas souvent.</p> <p>Votre père est hospitalisé. Où ? ce type de malade est caractéristique de la population gériatrique, et sa place était dans un service de gériatrie, et un service pointu ; je veux dire que si j'avais eu à m'en occuper j'aurais été très inquiet. Mais voilà : y avait-il un service de gériatrie ? Ce service avait-il des lits ? La situation au regard du Covid a-t-elle poussé à l'admettre plutôt en infectiologie ? etc. Je n'examine même pas la question que vous soulevez (et dont je serais bien hypocrite de nier la pertinence) : la compétence était-elle au rendez-vous ?</p> <p><i>Bref, les médecins m'ont dit quelques jours après traitement par intraveineuse d'antibiotiques que mon Papa allait mieux ; il allait pouvoir sortir de l'hôpital</i>.</p> <p>Je crains le malentendu. Si les médecins du service se sont donnés pour mission de juguler l'infection, ils ont eu parfaitement raison : les choses allaient mieux. Mais il y avait tout le reste, et il va de soi que si (l'escarre le montre) la situation à domicile était plus inquiétante que vous ne pensiez, la survenue du Covid, puis la septicémie, l'ont encore aggravée. Pourquoi dès lors proposer la sortie ? Pour deux raisons au moins : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La situation sanitaire locale imposait de réduire les séjours à ce qui était strictement nécessaire. Et de fait les médecins ont fait leur travail ; il restait des soins à faire mais cela ne justifiait pas de rester dans un service de médecine. Il aurait fallu le passer en soins de suite, mais cela supposait de trouver un lit. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Plus probablement, hélas, les médecins ont fait preuve, sans vous le dire, du pessimisme dont j'imagine qu'il aurait été le mien, et ont jugé que le plus sage était de le renvoyer chez lui, rien d'efficace ne pouvant être envisagé pour améliorer la situation de fond ; bref ils ont eu le sentiment que la situation de votre père était palliative. Ce qui a manqué dans ce cas c'est de s'asseoir autour d'une table et de mettre les choses au point. Non seulement ce n'est pas facile à faire mais il arrive souvent que le médecin dise les choses et que sont information ne passe pas.</p> <p><i>Ils lui ont enlevé la perfusion d'hydratation, alors qu'ils lui donnaient très peu à manger et à boire, perte de 5 kilos en 15 jours.</i></p> <p>Ils ont bien fait : la perfusion n'a aucune utilité en termes de nutrition, et si, passé la phase aiguë, l'hydratation tient à la présence d'une perfusion, c'est que les choses sont toujours gravissimes. Votre père mangeait très peu : c'est évident. Non seulement la pitance à l'hôpital est ce qu'elle est, mais les médecins savent parfaitement que faire manger un malade sujet à des fausses routes est un travail terriblement délicat, très chronophage, et pour lequel les soignants sont le plus souvent peu ou mal formés. Conscients de l'impuissance de leur service sur ce point, ils ont agi sagement en cherchant à faire sortir votre père le plus vite possible.</p> <p><i>Les soignants lui faisaient des aspirations sans cesse... Et je pense même de trop.</i>..</p> <p>D'une manière générale, je n'aime pas les aspirations, y compris chez les malades qui font des fausses routes. Je ne les aime pas parce que pour qu'elles soient efficaces il faut que la sonde d'aspiration franchisse le larynx, ce qui demande une expertise technique que les soignants ont très rarement ; l'aspiration n'est donc pas plus efficace que le simple changement de position, et cela reste un geste agressif. Mais il y a des situations où on est bien forcé d'y recourir. C'est particulièrement le cas quand le malade, comme ce fut le cas de votre père, se trouve dans un état trop précaire.</p> <p><i>Mon papa avait des problèmes neurodégénératifs bien sûr ! mais impliquant (pas d'Alzheimer). Il comprenait tout, et reconnaissait très bien son monde</i></p> <p>Je ne comprends pas pourquoi vous dites cela : quel que soit son statut intellectuel cela n'aurait rien changé à la situation, ni aux mesures à prendre. Tout ce que je peux dire c'est que les malades comme votre père présentent souvent des troubles intellectuels, qui sont d'autant plus déroutants qu'en première analyse ils semblent très bien comprendre ce qu'on leur dit, et qu'ils n'ont pas de trouble de la reconnaissance (je passe sur <a href="http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article10" class="spip_out" rel='nofollow external'>http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article10</a>).</p> <p><i>La radio cardiaque était bonne</i>.</p> <p>Certainement : il n'y avait aucune raison pour que le cœur présente un problème.</p> <p><i>Et il devait sortir de l'hôpital. Et là soudainement ils lui ont enlevé la perfusion d'hydratation sous prétexte que tout allait mieux</i>…</p> <p>Je vous le redis : je n'y étais pas, et je ne peux donc pas savoir ce qui s'est passé. Mais pour ma part j'aurais moi aussi enlevé la perfusion : les choses allaient mieux, et avant de décider une sortie j'aurais eu absolument besoin de savoir si la perfusion restait nécessaire. D'ailleurs la présence de la perfusion n'indique absolument pas que votre père était déshydraté : la pose d'une perfusion est un geste quasi-automatique (je le regrette, d'ailleurs), qui sert surtout à administrer des médicaments. C'est la biologie qui dit s'il y a ou non une déshydratation, et sur ce point nous ne savons rien.</p> <p><i>Nous étions habitués aux fausses routes à la Maison, ça finissait toujours bien, puis il n'en faisait pas systématiquement</i>.</p> <p>C'est bien cela qui vous ont trompée : chez ces malades les fausses routes se terminent toujours bien, jusqu'au jour où elles se terminent mal. Pour le dire brutalement c'est pour eux le mode habituel de décès, car en elle-même la maladie neurodégénérative n'a aucune raison de les tuer. Et ça se termine mal le jour où une autre affection (le Covid par exemple) vient déstabiliser une situation déjà fragile. C'est ce cercle vicieux qui a emporté votre père, et c'est un grand classique. Pire : je ne compte plus le nombre de patients qui me sont arrivés dans un état très grave, que j'ai sauvés, et qui ne m'en ont pas moins filé entre les doigts sans que j'y comprenne ni que j'y puisse quoi que ce soit. C'est très douloureux pour tout le monde, y compris pour le médecin.</p> <p><i>Et 3 jours après avoir enlevé la perf mon Papa décédé à l'hôpital... Pourquoi ???</i></p> <p>Je crois que vous n'aurez pas de réponse à cette question, tout simplement parce que personne ne l'a. Comme je viens de vous l'expliquer ces évolutions catastrophiques et incompréhensibles sont loin d'être rares, et quand cela se produit, le médecin, aussi consciencieux et compétent qu'il ait été, a les apparences contre lui. Tout ce que je peux présumer c'est que la situation de votre père était beaucoup plus grave que vous ne l'avez cru, et que, à vous lire, je ne sais pas si je n'aurais pas été tenté de proposer son admission d'emblée en soins palliatifs (à supposer que la structure existât là où j'aurais été) ; qu'on ait pu seulement juguler la septicémie est déjà un exploit, et il est infiniment improbable que l'arrêt de la perfusion ait été pour quoi que ce soit dans ce qui malheureusement a fini par se produire.</p> <p><i>Parce qu'une personne est (un peu) âgée, doit-elle mourir ?</i></p> <p>Dans ce que vous écrivez, rien ne me permet de penser que l'âge de votre père a été pris en considération. L'âge (vous ne me dites pas lequel, d'ailleurs) est un critère ambigu : d'un côté il n'interdit rien et n'explique rien ; de l'autre il constitue tout de même un élément pronostique, car il permet d'envisager raisonnablement l'espérance de vie restante : par exemple si votre père tel que je l'imagine avait 65 ans, je discuterais la pose d'une alimentation artificielle par sonde gastrique transcutanée : il y a des raisons de penser qu'il lui reste quelques années relativement importantes pour lui ; s'il avait 85 ans je le discuterais peut-être mais je serais plus circonspect : il faudrait que par ailleurs il n'ait aucun problème de santé, car sinon le problème de la qualité de vie que je lui offrirais deviendrait majeur ; enfin, je vous dis ça… il faudrait une discussion bien plus approfondie ; disons seulement que pour ma part si, mettons à 85 ans on souhaite me mettre en dialyse rénale je crois que je le refuserai.<br class="autobr" /> <i><br class="autobr" /> Devant les médecins nous sommes si petits, pas le choix que de leur faire confiance</i>…</p> <p>C'est cela qui semble avoir manqué : avez-vous discuté avec les médecins ? Si non, pourquoi ? Pouvez-vous demander à les rencontrer. Beaucoup de médecins, même éventuellement sous leurs grands airs, sont des timides incapables de se débrouiller d'une relation. Mais ils sont prêts en réalité à beaucoup de choses qu'ils n'osent pas proposer et qu'on n'ose pas leur demander.</p> <p><i>Mais pour moi il s'est forcément passé quelque chose…</i></p> <p>C'est bien ce qui vous trompe. Ou plutôt, comme je vous l'ai expliqué, il s'est évidemment passé quelque chose, et personne ne saura quoi. Mais votre besoin de comprendre s'explique aussi (pas seulement) par le deuil ; parmi les mécanismes normaux du deuil il y a ce besoin de comprendre, qui est un des aspects du processus révolte-culpabilité (<a rel='nofollow'>voyez https://fr.wikipedia.org/wiki/Mod%C3%A8le_de_K%C3%BCbler-Ross</a>). Il faut à la fois se laisser porter par ce mécanisme et ne pas en être trop dupe. Songez à ces victimes du Bataclan qui attendaient le procès pour <i>comprendre</i>. Les pauvres… Qu'y avait-il donc à comprendre ? Une bande de tarés a massacré cent cinquante personnes, point final. Et je crains qu'en leur entretenant l'illusion qu'il y avait quelque chose à comprendre et que le procès les y aiderait, on n'ait en réalité prolongé, enkysté leur deuil. Mais je n'en sais rien. Pour ce qui vous concerne : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je ne crois pas que vous aurez une réponse à votre question, parce que personne ne l'a. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Derrière votre question il y a évidemment un soupçon : il s'est forcément passé quelque chose… quelque chose qui n'aurait pas dû se passer, bref un coupable. Je n'ai aucune illusion sur les médecins, mais sur ce coup-là je parie qu'il n'en est rien. Là c'est le deuil qui parle : il est plus facile d'accepter la mort de l'autre si je peux me dire qu'elle était évitable ; d'où la culpabilité si fréquente, je préfère me dire que c'est ma faute plutôt que me dire que personne n'y pouvait rien.</p> <p>Je reste près de vous.</p> <p>M.C.</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-12-12T05:21:19Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17813 2022-12-12T05:21:19Z <p>Je ne comprends pas... Mon papa atteint de Maladie neurodegeratrice depuis 6 ans , faisait des fausses routes. Mais a la maison nous en avions l habitude.<br class="autobr" /> Mon papa est rentré à l hôpital pour un COVID avec en plus un Staphylocoque doré transformé en septicémie, la bactérie serait rentré par une escard.<br class="autobr" /> Bref , les médecins m'ont dit quelques jours après traitement par intraveineuse d anti biotiques que mon Papa allé mieux il allait pouvoir sortir de l hôpital.<br class="autobr" /> Ils lui on enlevé la perfusion d'hydratation, alors qu ils lui donnait très peu a mangé et a boire, perde de 5 kilos en 15 jours.<br class="autobr" /> Les soignants lui faisait des aspirations sans cesse... Et je pense même de trop... Mon papa avait des problème neurodegeratrice bien sûr ! mais impliquant des trouble de la marche, des gestes pour manger seul ( parfois seulement), et lorsqu il nous parlait il ''avait plus beaucoup de voie<br class="autobr" /> (pas d azemer). Il comprenait tout, et reconnaissait très bien son monde<br class="autobr" /> La radio cardiaque était bonne. Et il devait sortir de l hôpital.. et là soudainement ils lui ont enlevé la perfusion d hydratation sous prétexte que tout allé mieux.. Nous étions habitués aux fausse route a la Maison sa finissait toujours bien, puis il en faisait pas systématiquement. Et 3 jours après avoir enlevé la perf mon Papa décédé a l hôpital... Pourquoi ??? <br class="autobr" /> Parce que une personne est<br class="autobr" /> ( un peu âgé ) doit il mourrir ?<br class="autobr" /> Devant les médecins nous sommes si petit, pas le choix que de leur faire confiance.. Mais pour moi il s'est forcément passé quelques chose..<br class="autobr" /> Quelques chose qui m'échappe...😡. Plus jamais je ferais confiance aux Médecins.. 😪</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-12-10T21:04:20Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17809 2022-12-10T21:04:20Z <p>Merci pour cette explication.</p> L'habilitation familiale 2022-11-26T04:41:38Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article129#comment17785 2022-11-26T04:41:38Z <p>Bonjour, Corinne, et merci de ce témoignage.</p> <p>Vous avez raison, car l'habilitation familiale est une mesure simple qui le plus souvent fonctionne très bien ; j'y ai moi-même eu recours dans ma famille, avec un très bon résultat.</p> <p>Mais cela ne change pas les questions que je me pose. Car il en va de l'habilitation familiale comme de tout règlement : tant que tout se passe bien le règlement est une contrainte nuisible qui dérange tout le monde. Le règlement n'a d'intérêt que quand les choses vont mal.</p> <p>Or je me dis ceci : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si cette mesure a été prise, c'est avant tout pour économiser sur le travail des juges. Je ne suis pas contre les économies, et je connais d'autres tâches qui pèsent sur les épaules des magistrats et dont on se demande pourquoi il faut qu'ils les assument. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ce que l'habilitation familiale reconnaît, c'est que les membres de la familles sont largement assez compétents pour gérer les affaires de leurs proches. Et c'est là une bonne chose, qu'on ferait bien d'étendre à d'autres domaines. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Mais il y a là un revirement implicite : vous savez bien tout ce qu'on a raconté sur ces enfants indignes qui mettaient leur mère en maison de retraite pour pouvoir mettre la main sur la maison. Je crois qu'on a beaucoup exagéré ce risque (je crois surtout qu'on méconnaît le rôle symbolique de l'argent dans les processus de deuil ; il faudrait que j'écrive là-dessus, mais je dirais pour faire court qu'il est beaucoup plus confortable pour une famille réunie autour du cercueil de s'écharper sur les petites cuillères en argent que de se confronter à la brutalité de la perte ; ces histoires d'argent, pour sordides qu'elles soient souvent, sont aussi un langage, à décrypter avec soin avant de partir à l'assaut). Des cas de cette nature j'en ai connu, mais pas autant que j'aurais cru. Toujours est-il que ces abus ont longtemps été mis en avant, et que la loi sur les tutelles, par exemple, vise à réduire ce risque. La mesure d'habilitation familiale fait passer du <i>il faut se méfier de l'entourage</i> au <i>il faut faire confiance à l'entourage</i>. Je salue cette évolution, mais je la note. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Et je me demande si nous ne sommes pas tombés dans l'excès inverse : car si on suppose une famille dont les enfants s'organiseraient pour spolier leur ascendant, je ne suis pas sûr que les garde-fous soient bien solides.</p> <p>Mais je ne sais pas ce qu'il en est ; et je ne le saurai sans doute jamais, car je n'ai plus d'activité professionnelle, et je ne suis donc plus très au courant...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> L'habilitation familiale 2022-11-25T16:38:54Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article129#comment17784 2022-11-25T16:38:54Z <p>Nous avons opté pour l'habilitation familiale, mes soeurs, mon frère, décédé depuis, et moi car il y a une bonne entente familiale. Le juge l'a vite constaté et 2 sur 4 ont été habilités, dont moi et avec l'accord des autres.<br class="autobr" /> Depuis je ne fais rien sans concerter les autres, tout est clair.</p> Utilisation de l'oxygène en maison de retraite 2022-11-10T07:13:38Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article96#comment17766 2022-11-10T07:13:38Z <p>Bonjour, Brigitte.</p> <p>Je manque malheureusement de beaucoup d'éléments pour pouvoir me risquer à vous donner un avis. Par exemple je ne sais rien de l'état de santé de votre mère. Toutefois il me semble que vous vous trompez de problème.</p> <p>Je crois comprendre que vous vous demandez si votre mère a vraiment besoin d'oxygène. Je dirais que la réponse est sans doute oui. Car la saturation normale, la vôtre, la mienne, est à 100%. Si vous étiez à 94% vous vous sentiriez très mal. Ou pour le dire autrement, un sujet qui a une saturation à 50% ne respire pas deux fois moins bien qu'un sujet normal : il est simplement en train de mourir.</p> <p>Cette remarque faite je ne change pas un mot de ce que j'écrivais voici maintenant bien des années : si on décide de mettre une personne sous oxygène, c'est qu'on la considère comme en grand danger. Un tel geste n'a de sens que dans l'attente d'une intervention médicale d'urgence. Dire que votre mère « désature » est tout ce qu'on veut sauf un diagnostic. Or ce qui me trouble c'est que le médecin du SAMU n'a pas proposé d'intervention médicale. On se serait attendu qu'il réponde : « mettez-la sous oxygène, on arrive ». Je dois donc me demander quelles étaient ses raisons pour ne pas le faire. Tout comme je dois me demander pourquoi aucun médecin (généraliste, coordinateur de l'EHPAD, etc.) n'est intervenu depuis un mois.</p> <p>C'est là que je suis en difficulté.</p> <p>L'âge n'est pas en soi une raison pour ne rien faire. Ne nous mentons pas : il existe des gens, et des médecins, qui considèrent qu'il faut limiter les soins aux vieilles personnes pour des raisons financières. C'est un scandale, mais pas seulement : dans mes directives anticipées personnelles j'ai tenu à préciser que je voulais qu'avant de me donner des soins on se pose aussi la question de leur coût. Il existe également des médecins pour qui la vieillesse est un temps où les défaillances physiques sont inéluctables. C'est faux, mais dans mes directives anticipées personnelles j'ai écrit que je voulais qu'avant de me donner des soins on se demande quelle espérance de vie (et quelle qualité de vie) on comptait me donner en le faisant.</p> <p>Mais il se peut aussi que le médecin du SAMU ait eu des raisons plus précises de penser que le mieux était de ne rien faire ; et c'est une décision que j'aurais pu prendre. C'est là qu'il me faudrait davantage d'informations. Par exemple l'âge n'est pas une raison de ne pas agir, mais on s'attend qu'une dame de 91 ans soit en plus mauvais état qu'une de 20 ; et parmi les raisons qui ont conduit votre mère en EHPAD, il y a sans doute des raisons de santé. Bref que le tableau ait été si sombre qu'il ait conclu que le risque était trop grand d'infliger à votre mère des examens et des soins qui n'auraient mené à rien de réaliste.</p> <p>Le problème, mais il n'y pouvait rien, est que la suite semble lui avoir donné tort. Dans ces conditions : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je dois vous conseiller de demander un nouvel examen médical ; à défaut, qu'on vous explique pourquoi on ne le fait pas, il pourrait y avoir des raisons pertinentes. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si on donne de l'oxygène, c'est pour une raison de confort. Je vous le redis : il faut le faire. Du moins dans ce contexte : vous avez lu que pour moi le bon traitement serait la morphine. Le problème est que le maniement de la morphine dans cette indication est particulièrement délicat, et qu'il requiert, sous peine d'être un exercice dangereux, une parfaite connaissance du produit, une longue pratique, et une équipe soignante particulièrement aguerrie. Ce n'est pas le cas ici, il n'y a donc rien d'autre à faire que maintenir l'oxygène en attendant de décider ce qu'on veut faire.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Utilisation de l'oxygène en maison de retraite 2022-11-08T17:56:39Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article96#comment17761 2022-11-08T17:56:39Z <p>Bonjour, voilà ma mère à 91 ans, elle est en Ehpad. Depuis le 6 octobre elle a été placée sous oxygène et pratiquement toute la journée. Quand je leur pose la question en a-t-elle vraiment besoin, on me répond votre mère elle désature. Hier, pendant plus de 30 minutes, je l'ai débranché en surveillant sont taux de saturation qui a oscillé entre 94 et 97.<br class="autobr" /> Cette mise sous oxygène a été ordonné par le Samu par téléphone le 6 octobre, suite à un malaise dans la nuit et depuis aucun contrôle n'a été effectué. Voilà je souhaiterai avoir votre avis. Merci</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-26T17:45:01Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17703 2022-09-26T17:45:01Z <p>Bonsoir, Dom, et merci de ce message.</p> <p><i>Peut-être qu'en vieillissant aussi, on s'abstrait de plus en plus souvent d'un monde perçu comme hostile, et on redoute et on a honte de ne plus être aussi "capable" que n'importe qui</i>.</p> <p>C'est très possible, en effet. Allons plus loin : c'est probablement un mécanisme très fréquent. Et je répugne à parler de démence au très grand âge parce que je crois que souvent il s'agit simplement de gens qui en ont marre de penser.</p> <p>Mais ce que j'explore dans cet échange, ce sont ces petites pannes qui m'arrivent, et qui font que je ne me sens plus tant que ça en sécurité dans mon cerveau. Je crois que ces micro-pannes sont identiques dans leur structure et dans leur forme à ce qui arrive chez le dément. Et d'ailleurs rien ne prouve que je ne suis pas tout simplement en train d'y passer. Je me dis que si on s'observait un tant soit peu, on en trouverait peut-être souvent. En psychiatrie cela s'appelle la dépersonnalisation, cette impression d'être étrange/étranger à soi-même et au monde. Tiens, deux exemples récents, ça date de cet après-midi : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Revoir une scène dont réflexion faite je crois qu'elle s'est passée dans un rêve que j'avais fait voici quelque temps ; ne plus très bien savoir ce qui était rêve et réalité. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Être forcé de recalculer mon âge ; plus surprenant encore : ne pas être totalement convaincu du résultat, que j'ai pris comme une information qu'on m'aurait donnée et non comme une partie de moi.<br class="autobr" /> Quand ça m'est arrivé j'étais en train de transpirer sur une fugue de Bach (BWV 578, si vous voulez tout savoir). Trop de concentration ? Manque de sommeil ? Sans doute un peu des deux. Mais ce qui me frappe c'est la porosité entre un état normal et un état de démence.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-21T11:28:11Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17698 2022-09-21T11:28:11Z <p><i>Par exemple le jour où je me suis fait klaxonner parce que j'attendais que le stop passe au vert.</i></p> <p>J'aime cette anecdote. Parce que je l'ai vécue aussi, et qu'elle me vaut toujours un certain succès comique lorsque je la raconte. Sauf, bien sûr, que j'avais dans les 25 ans, et que c'était la cause d'un énième échec au permis de conduire, pas les premiers signes de dégradation mentale due à l'âge.</p> <p>Distraction liée au stress ? "Déconnexion" temporaire d'un monde extérieur perçu comme hostile ? En tout cas, si je me souviens bien, honte et terreur de rater à nouveau un truc qui semblait à la portée de n'importe qui sauf moi - au point que mon permis de conduire reste probablement le "diplôme" dont je suis la plus fière, même après des dizaines, peut-être des centaines de milliers de kms...</p> <p>Peut-être qu'en vieillissant aussi, on s'abstrait de plus en plus souvent d'un monde perçu comme hostile, et on redoute et on a honte de ne plus être aussi "capable" que n'importe qui.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-20T20:35:15Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17697 2022-09-20T20:35:15Z <p>Bonsoir, Unautre.</p> <p>Nous verrons quand nous y serons, mais je ne crois pas que vos approches soient les bonnes.</p> <p><i>on sait qu'on sait des choses mais on n'y accède pas</i></p> <p>Peut-être, comme ces noms propres que je n'arrive pas à me rappeler. Mais ce n'est sans doute qu'une faible partie de ce qui se passe. On sait surtout qu'on devrait savoir, et c'est encore plus angoissant. D'où les tentatives désespérées pour donner le change.</p> <p><i>on n'essaie même pas, comme une paresse extrême qui s'imposerait</i></p> <p>Oh, si, on essaie, et longtemps, même si on finit par abandonner.</p> <p><i>incapacité à faire quoi que ce soit des informations environnantes (on peut observer intensément et longuement un phénomène sans rien en tirer, ni avis ni déduction ni décision : on observe des phénomènes habituels sans les mettre en rapport avec quoi que ce soit et sans rien en penser).</i></p> <p>Oui, mais il s'agit là de l'apraxie, phénomène dont l'analyse nous mènerait très loin. Par exemple il faudrait que j'explique en quoi, dans l'histoire du tire-bouchon, le trouble de l'attention aboutit, par le biais d'une panne de la mémoire procédurale, à une sorte d'apraxie temporaire. Je préférerais ne pas m'y aventurer...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-20T07:13:45Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17695 2022-09-20T07:13:45Z <p>Je corrige mon commentaire précédent : "5 à 7 items dont la mémoire à court-terme est capable".</p> <p>Pour ma part, lorsque j'ai tenté d'imaginer ce qu'était un état de démence, j'ai cru identifier deux aspects : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> incapacité à mobiliser ses souvenirs (on sait qu'on sait des choses mais on n'y accède pas, on n'essaie même pas, comme une paresse extrême qui s'imposerait). <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> incapacité à faire quoi que ce soit des informations environnantes (on peut observer intensément et longuement un phénomène sans rien en tirer, ni avis ni déduction ni décision : on observe des phénomènes habituels sans les mettre en rapport avec quoi que ce soit et sans rien en penser).</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-19T15:46:52Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17693 2022-09-19T15:46:52Z <p>Oui, en fait nous ne parlons pas des mêmes choses, et nous mettons sous le vocable de mémoire des notions qui n'ont guère à voir. La quasi totalité des troubles dont on se plaint ne sont pas des troubles de la mémoire mais de l'attention-concentration.</p> <p>Ce que j'ai voulu souligner c'est qu'il est des situations fort banales où on peut avoir un aperçu de ce que cela pourrait donner si on était dément. Quand j'étais en activité et que je rentrais de congés, je passais toujours la première matinée à essayer désespérément de cacher que je ne savais plus comment on examine un malade ; heureusement les automatismes sont toujours revenus en quelques heures. Ce qui est comparable à l'état de démence c'est le sentiment que j'éprouvais alors d'être dans un monde totalement étranger ; j'ai écrit quelque part que le regard du dément n'est pas un regard <i>hébété</i>, mais un regard <i>étonné</i>.</p> <p>La mémoire impliquée dans le respect d'un stop ou dans le maniement d'un tire-bouchon est la mémoire procédurale, qui relève largement du cerveau reptilien, le plus primitif. Elle est bien plus solide que la mémoire telle que nous l'entendons couramment, même si elle finit par elle aussi tomber en panne. Ce qui se passe c'est que tout compte fait mon néocortex ne me sert pas beaucoup dans la vie courante, et que je mène la plupart de mes actions en pilotage automatique. Et quand ce pilote automatique a des ratés, c'est très vite terrifiant. D'où les peurs de beaucoup de gens. Mais je n'avais jamais pensé que même ce pilote automatique requérait pour se mettre en marche un minimum d'attention-concentration.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-15T17:14:43Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17683 2022-09-15T17:14:43Z <p>Je comprends, et j'essaie de développer.<br class="autobr" /> En effet, un fonctionnement normal est assez miraculeux et fragile.<br class="autobr" /> Mais il m'arrive souvent d'entendre des personnes craindre des troubles de la mémoire qui me semblent absolument normaux dans la mesure où il n'y a aucune raison de mémoriser certaines informations ou de continuer à les mémoriser de la même manière que 20 ou 30 ans auparavant, alors que les centres d'intérêt et le mode de vie étaient radicalement différents.<br class="autobr" /> Il y a un équilibre à trouver entre tout mémoriser et ne rien mémoriser, deux enfers opposés. L'équilibre est à doser en fonction des préoccupations du moment et des tâches à exécuter. Par exemple, les tâches au cours desquelles nous risquons d'être interrompus se multiplient (comme par exemple le retour à la page internet dont on a interrompu la lecture pour en consulter une autre, mais là on a la chance de disposer d'une touche retour arrière) . La mémorisation du ou des contextes précédant l'interruption est bien plus exigeante que la mémorisation des 5 à 7 dont la mémoire à court terme est capable. Les automatismes ne peuvent plus fonctionner. On ne peut pas passer d'une activité à l'autre, d'un contexte à l'autre, et conserver une cohérence de fonctionnement. Le coup du feu vert et du tire-bouchon en relevaient peut-être, ou pas...</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-15T15:35:53Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17682 2022-09-15T15:35:53Z <p>Ne vous méprenez pas : je ne vous conteste pas ce que vous dites.</p> <p>Simplement, ce que j'ai appris à Orléans ce jour là c'est que certaines opérations mentales, que je croyais automatiques, ne le sont pas tant que ça. J'ai eu, à tort ou a raison, une idée de ce que pourrait être <i>perdre la tête</i>.</p> <p>J'ai eu depuis d'autres expériences, dont je ne sais pas si elles sont de même nature, et qui concernent la mémoire dite procédurale. Par exemple le jour où je me suis fait klaxonner parce que j'attendais que le stop passe au vert. Trouble de l'attention, certes ; mais n'est-ce pas un peu court ? Ou le jour où j'ai constaté avec dépit que j'avais beau taper sur le bord droit de la page de mon livre il n'affichait pas la page suivante. Ou, plus inquiétant peut-être, ce temps que j'ai passé, tire-bouchon en main, parce que je ne savais plus dans quel sens on le tourne.</p> <p>Toutes ces micro-pannes du cerveau, plus fréquentes qu'on ne pense, ont quelque chose de terrifiant en ce qu'elles disent que, réflexion faite, on n'est pas totalement en sécurité dans son cerveau. C'est seulement cela que je voulais pointer.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-15T09:00:14Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17680 2022-09-15T09:00:14Z <p>Alors, évidemment cela ne suffit pas et n'écarte pas les troubles liés à une pathologie.<br class="autobr" /> Il y a effectivement des lésions de la mémoire et de l'attention. Je n'en suis pas spécialiste.</p> <p>Mais il peut être interessant de s'interroger sur un fonctionnement normal ou que l'on croit normal, et sur les améliorations possibles. Il y a aussi notre capacité à nous auto-évaluer : malgré les troubles parasites positifs, malgré la quantité de préoccupations qui polluent nos capacités d'attention.</p> <p>En 2 mots : il est sans doute plus automatique de prendre garde à l'endroit où l'on stationne lorsque l'on n'est pas préoccupé par autre chose (ou par l'obsession de ne pas oublier sa liste de courses).</p> <p>Les troubles apparents sont-ils davantage liés à un déficit de mémoire, de capacité d'attention, ou du choix délibéré de l'objet d'attention ?</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-15T07:32:54Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17679 2022-09-15T07:32:54Z <p>Bonjour, Unautre, et merci de cette réponse.</p> <p>Je crois que ces troubles sont effectivement liés à une difficulté de l'attention-concentration.</p> <p>Mais je me demande si cela suffit, au moins en pratique. Je veux dire que les troubles de l'attention-concentration liés à l'âge sont tels qu'ils deviennent pathologiques en eux-mêmes, et invalidants.. Vous indiquez (je vous résume scandaleusement) qu'il faut travailler sur les encodages, mais... c'est un peu supposer le problème résolu. Je veux dire que l'attention n'est pas quelque chose qui se déclenche automatiquement, et qu'il y a des pannes de l'attention.</p> <p>Je me souviens de ce matin où, ayant passé la nuit à Orléans et allant rechercher ma voiture, je me suis aperçu que j'avais oublié de prendre garde à l'endroit où je la stationnais. Non que je fusse perdu : je connais bien la ville. Mais j'avais oublié de stocker l'information. Pas tant que ça, bien sûr, et je l'ai vite retrouvée ; mais tout de même.</p> <p>Et des incidents de cette nature, j'en vis de plus en plus. Si je suis sur mes gardes, tout va bien. Mais quand je n'y suis pas...</p> <p>Il faudrait aussi se demander ce qu'il en est des troubles parasites positifs, je veux dire de ces opérations de l'esprit qui <i>agissent</i> pour perturber la mémoire. Je pense à cet intellectuel musulman dont je n'arrive jamais à retenir le nom ; je doute que ce soit étranger au fait que le personnage m'agace profondément. Il y a une force qui me pousse à <i>ne pas me souvenir</i>.</p> <p>Ajoutons pour finir que je connais, très rarement, des situations qui réalisent une véritable <i>éclipse de l'attention</i> ; ou des pannes de la mémoire fraîche, si vous aimez mieux, comme quand je peine à me souvenir de ce que j'ai fait le matin même. Ces éclipses sont banales, tout le monde les connaît. Mais je me demande si ce n'est pas la situation mentale la plus proche de la démence.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-09-15T07:16:55Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17678 2022-09-15T07:16:55Z <p>Bonjour, Juliette.</p> <p>Globalement nous sommes d'accord. Mais... je crois que vous vous méprenez sur ce que j'ai essayé de faire.</p> <p>Je ne me suis nullement mêlé de faire un exposé sur les fausses routes, leur diagnostic et leur prise en charge : je n'en ai pas les moyens. J'ai écrit dans un tout autre projet : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> M'adresser aux soignants que j'ai connus, ce qui renvoie à plus de quinze ans maintenant, à une époque où j'animais un petit hôpital dépourvu de moyens. Dans votre énumération des lieux d'intervention vous ne parlez pas des EHPAD, et je vois bien pourquoi. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Essayer de les faire réfléchir. La fausse route déclenche des réactions totalement irrationnelles, des peurs paralysantes, des décisions hâtives, alors qu'on n'a pas pris garde que c'est là une situation qui s'explore, se réfléchit, se prévient.</p> <p>C'est mon seul but : remplacer la pensée magique (que je ne dédaigne nullement par ailleurs) qui a cours chez les soignants par une attitude professionnelle. Mais j'ai bien compris que c'est là que les difficultés commencent.</p> <p>Je ne veux pas que la première chose qu'on entende dès que la dame a toussé une fois en mangeant soit : <i>faudrait la passer en mixé</i> (quand ce n'est pas : <i>pour elle j'ai demandé du mixé</i>). D'abord parce que mon obsession à moi c'est la dénutrition, ensuite parce que je n'ai jamais compris pourquoi on se figure que le changement de texture va nécessairement améliorer la situation.</p> <p>Je veux qu'on commence par regarder comment on a assis le patient, et comment on s'est assis soi-même.</p> <p>Je veux qu'on comprenne : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Que dans la quasi totalité des cas les fausses routes ne résistent pas à des mesures simples. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Que s'il faut venir à bout des fausses routes en dénutrissant le malade, je ne vois pas l'intérêt. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Que quand on ne se sort pas des fausses routes par ces moyens simples, alors cela devient très compliqué, et qu'il ne faut pas hésiter à, plutôt que de se désoler, demander toutes les aides que vous préconisez, enfin vous avez oublié l'ORL et le neuro.</p> <p>Je ne vais pas plus loin. Si j'y étais allé je n'aurais pas manqué de faire référence aux professionnels dont vous parlez. Mais dans ma pratique je n'en ai jamais bénéficié, et je crois qu'il existe beaucoup de lieux où on est encore dans cette misère... C'est à eux que je pense.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-09-14T13:08:49Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17677 2022-09-14T13:08:49Z <p>Bonjour,</p> <p>Cette vision globale est vraiment intéressante mais je trouve vraiment dommageable que vous ne distinguiez que le binôme infirmier/corps médical. <br class="autobr" /> Il y a des professionnels de la déglutition qui sont les orthophonistes ainsi que les kinésithérapeutes, ces deux corps de métiers ayant un champ de compétence commun autour de la gestion des troubles de déglutition. <br class="autobr" /> Il y a de plus en plus d'orthophonistes dans les services de gériatrie, en court séjour, SSR et USLD. Le diagnostic de dysphagie oropharyngée relève de leur champ de compétence, et quoi qu'on en dise, les médecins n'ont ni le temps ni les connaissances pour effectuer des préconisations concernant les adaptations de texture (qui ne sont qu'un pan de la prise en soins des troubles de la déglutition). <br class="autobr" /> Cette division des textures (comme des possibilités d'hydratation en eau plate/pétillante/gélifiée...) fait penser aux soignants comme aux médecins qu'il y aurait une possibilité d'éviter tout risque une fois que le "changement de texture" est effectif. <br class="autobr" /> Au même titre que ce qui entraîne une dysphagie est multifactoriel, il y a de nombreux domaines à vérifier et adapter pour optimiser les prises alimentaires : il y a au centre l'hygiène buccale (car ce n'est pas pareil d'inhaler de l'eau propre que de l'eau passée dans une bouche dont on n'a pas brossé les dents ni nettoyé la langue depuis 2 mois), assurer l'hydratation des muqueuses pour limiter les risques d'installation de candidoses buccales et éviter une gêne lors du temps oral que la sécheresse buccale isolée suffit à entraîner, l'installation du patient (au fauteuil comme au lit), la gestion comportementale du patient en cas de troubles cognitifs (patient qui mange trop vite donc n'attend pas d'avoir avalé entre deux bouchées...), la façon d'accompagner le repas (positionnement de l'accompagnant, rythme des bouchées, sitmulations verbales fournies...)</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-10T09:05:26Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17667 2022-09-10T09:05:26Z <p>Bonjour Maurice, bonjour Michel,<br class="autobr" /> Je dirais qu'il y a la mémoire à long terme (souvenirs de trajet), la mémoire de travail (les informations que nous avons à l'esprit à un instant donné, par exemple une liste de courses), mais aussi la capacité à expliciter les éléments plus ou moins conscients qui nous traversent l'esprit à tout moment (par exemple, où je pose mes clés sans y penser en arrivant chez moi). Les deux derniers points sont très affectés par la quantité d'éléments simultanément présents en mémoire et par les perturbations extérieures, et je crois qu'une parade est justement d'expliciter ces éléments pour activer des indexations/moyens d'accès conscients.<br class="autobr" /> Et je me demande si les capacités d'apprentissage intellectuel des jeunes individus ne sont pas liées au fait qu'ils sont normalement déchargés de toutes les tâches annexes qu'un adulte ne peut, lui, mettre de côté.<br class="autobr" /> Bien à vous,</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-09T15:12:54Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17666 2022-09-09T15:12:54Z <p>Bonjour, Maurice, et merci de ce témoignage.</p> <p>Je le trouve très intéressant, surtout en ce qu'il fait une description multidimensionnelle du malaise que vous ressentez. J'ajouterai tout de suite que vous postez sur le forum d'un article consacré aux troubles psychiatriques du sujet âgé, j'espère bien que vous n'en pensez pas un mot : votre situation est tout ce qu'il y a de plus normale.</p> <p><i>Mes souvenirs de trajets se sont restreints,selon l'habitude des itinéraires que je dois emprunter</i></p> <p>Certainement. Les souvenirs ne s'usent que si on ne s'en sert pas, et cela n'est que très moyennement lié à l'âge. J'ai été surpris, lorsque j'ai abandonné la médecine de campagne, de voir avec quelle rapidité j'oubliais le nom de mes patients ; ou la géographie d'un département que j'avais pourtant sillonné pendant vingt ans. Le cerveau semble avoir besoin de place, et pour stocker de nouveaux souvenirs il tend à en supprimer (enfin, il ne supprime pas réellement) d'autres qui ne servent plus. Maintenant il y a aussi autre chose : il nous est de plus en plus difficile de mémoriser, et il nous arrive (je dis : nous parce que même si je n'ai pas 85 ans je vois bien que ce type d'ennui commence à me concerner) de ressentir, sur certains parcours que pourtant nous devrions très bien connaître, une impression d'étrangeté.</p> <p><i>Ma mémoire immédiate... Je ne peux lui faire confiance,mais il suffit d'en être conscient et d'insister : Lorsque je dépose un objet A sur un objet B... je pose ma main sur l'objet et je tache d'associer le lieu B à une phrase que j'invente,ou une blague associée à B.</i></p> <p>Ce dont vous parlez là n'est pas vraiment un problème de mémoire immédiate. La mémoire immédiate, c'est simplement ce qui me permet de me souvenir à très court terme de certaines données ; par exemple un numéro de téléphone que je lis sur un carnet et que je compose aussitôt. Cette mémoire immédiate fléchit avec l'âge, mais pas beaucoup. Ce que vous décrivez, c'est la manière dont vous objectivez le processus, largement inconscient, de mémorisation. Si nous pouvons retrouver nos souvenirs c'est largement parce qu'ils sont indexés à l'aide d'informations annexes. Par exemple je sais ce que j'ai fait le 21 juillet 1969. Je le sais parce que c'est le jour où les Américains ont débarqué sur la Lune, et que je ne l'ai pas vu parce que j'étais dans le train, en route pour retrouver… mais peu importe. Cette indexation de nos souvenirs est calquée sur celle d'un livre dans une bibliothèque : tel livre est 134 : je le trouverai dans la première pièce, troisième couloir, quatrième étagère. C'est à peu près ce que vous faites. Ajoutons que le dément ne perd pas tellement les souvenirs : ce qu'il perd c'est le chemin qui y conduit ; il a toujours le livre mais il ne sait plus où il l'a mis ; d'où les stupéfiantes réminiscences qu'il peut présenter quand, passant par hasard devant le livre, il le reconnaît.</p> <p><i>Le plus difficile : M'adapter à une société qui, généralement,est beaucoup moins exigeante ou cultivée (sauf les personnes très instruites). En outre les comportements et l'éducation (pas l'instruction) sont généralement très insuffisants… J'aimerais que l'on soumette les sujets des Bacc des années 1950 à nos bacheliers actuels… et qu'ils apprennent à dire bonjour</i>...</p> <p>Nous parlons ici de notre difficulté à nous adapter à un monde qui change. Cela aussi est normal. D'un côté il y a des reculs objectifs de civilisation et de culture ; tout ce que je dirais c'est que plutôt que de m'en prendre aux élèves (et donc aux maîtres) je m'en prendrais aux personnages de radio ou de télévision, qu'il s'agisse des journalistes ou de ceux qu'ils rencontrent ; on voit vite que, y compris sur les chaînes qui se prétendent culturelles, le niveau de français, ou celui des connaissances scientifiques pourtant élémentaires, est proprement catastrophique, aboutissant à proférer avec assurance des âneries retentissantes ; ces gens-là devraient avoir conscience de la mission qu'ils ont à remplir. Quant à nos bacheliers, ils sont certes moins compétents en matières fondamentales que je ne l'étais à l'époque, mais : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il faut dire à leur décharge que les temps qui courent leur imposent d'acquérir des savoir-faire dont je n'avais nul besoin, et qui ne m'encombraient pas l'esprit. Ils font donc de moins bons bacheliers, mais je n'irais pas trop vite à dire qu'ils font des humains moins complets ; ou moins sages. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Quand je pense à ce qu'il reste de mon latin, je me demande pourquoi j'y ai passé six ans de ma vie...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-09-04T11:12:22Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17655 2022-09-04T11:12:22Z <p>J'ai 85 ans .<br class="autobr" /> Mes souvenirs de trajets se sont restreints,selon l'habitude des itinéraires que je dois emprunter<br class="autobr" /> Ma mémoire immédiate ..Je ne peux lui faire confiance,mais il suffit d'en etre conscient et d'insister : Lorsque je dépose un objet A sur un objet B..Je pose ma main sur l'objet et je tache d'associer le lieu B à une phrase que j'invente,ou une blague associée à B.<br class="autobr" /> Le plus difficile : M'adapter à une société qui ,généralement,est beaucoup moins éxigeante ou cultivée (sauf les personnes très instruites).En outre les comportements et l'éducation (pas l'instruction) sont généralement très insuffisants...J'aimerais que l'on soumette les sujets des Bacc des années 1950 à nos bacheliers actuels..et qu'ils apprennent à dire bonjour ...<br class="autobr" /> Certes, je suis dans la catégorie des vieux cons ("autrefois ..c'était mieux"),et je regrette le service militaire obligatoire de mon époque:il permettait un brassage de populations,de religions et d'instruction,qui permettait une tolérance ..qui n'éxiste plus.<br class="autobr" /> Maurice</p> La déshydratation en gériatrie 2022-08-29T13:53:41Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article22#comment17634 2022-08-29T13:53:41Z <p>Bonjour, Roselyta.</p> <p>Tout n'est pas clair dans votre message, et je ne suis pas sûr de bien comprendre votre situation : que voulez-vous dire par <i>à distance</i> ? S'agit-il d'une personne qui demeure loin de vous ? Et si oui, quels sont vos liens ? Comment avez-vous évalué le risque ? Quel est l'état de la personne ?</p> <p>Je vous demande tout ça parce que sinon je suis forcé de vous répondre dans l'absolu, et cette réponse, je le crains, ne vous servira pas à grand-chose. Notamment, si vous êtes loin de cette personne je serais tenté de vous dire que vous ne pouvez tout simplement rien faire:on a déjà toutes les peines du monde à faire boire une vieille personne quand on est près d'elle, mais si on ne l'a pas sous la main on est totalement démuni. On ne voit pas, bien entendu, comment vous pourriez la faire hospitaliser à distance et contre sa volonté… Surtout pour un <i>risque</i> de déshydratation.</p> <p>Il faut donc, si nous voulons dire quelque chose d'utile, avoir une description de la situation.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> La déshydratation en gériatrie 2022-08-27T10:08:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article22#comment17629 2022-08-27T10:08:12Z <p>Bjr Que devons nous faire quand nous sommes à distance d'une personne qui est en danger de déshydratation et que nous n'avons aucune autorité sur cette même personne ?</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-07-02T06:44:34Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17540 2022-07-02T06:44:34Z <p>Bonjour, Maillrd.</p> <p>C'est avec beaucoup de retard que je découvre votre message. J'espère que vous ne m'en voudrez pas.</p> <p>Ce qui me gêne encore plus est que je suis un peu démuni : comment vous donner un avis sur une situation dont je ne sais pratiquement rien ?</p> <p>Je dois donc raisonner avec les indices que vous me donnez. Et ce que vous décrivez, ce sont des hallucinations, avec cette particularité que vous n'en êtes pas dupe : vous savez qu'il n'y a pas de réalité derrière ce que vous entendez. Il me semble que dans ces conditions on peut éliminer un trouble psychiatrique.</p> <p>Mais vous parlez d'une lésion au cerveau. Il faudrait bien sûr savoir de quoi on parle. Mais il est facile d'imaginer qu'un dégât cérébral provoque des crises d'épilepsie ; et parmi les crises d'épilepsie il y a des formes qui peuvent se manifester par des hallucinations auditives.</p> <p>Vous parlez aussi d'un traitement par tramadol. Le tramadol est un excellent médicament, qu'on critique souvent à tort ; mais il peut arriver qu'il donne des troubles, et notamment des hallucinations.</p> <p>Mais… je vous en dis plus que je n'ai le droit, car il serait infiniment plus sage que vous retourniez en parler à votre médecin.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> La bandelette urinaire 2022-07-02T06:43:46Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article72#comment17539 2022-07-02T06:43:46Z <p>Bonjour, Mélissa.</p> <p>C'est avec beaucoup de retard que je découvre votre message. J'espère que vous ne m'en voudrez pas.</p> <p>Il faut d'abord que je vous rappelle que vous postez sur un site dédié aux vieilles personnes et aux malades en fin de vie. Je n'ai pas l'impression que vous entrez dans une de ces deux catégories. Je vous dis cela parce que, n'étant pas urologue, je n'ai pas de compétence particulière pour vous répondre.</p> <p>Mais je dirais tout de même ceci : manifestement, vous allez bien, et c'est la seule chose qui compte. Le reste n'a pas beaucoup d'intérêt.</p> <p>La biologie, que ce soit celle du laboratoire ou celle des bandelettes, ne sert qu'à dire pourquoi on est malade. On n'est pas malade d'une bandelette, on est malade d'une infection urinaire. Allons plus loin : la bandelette est un examen de dépistage, ce qui signifie qu'elle n'a de valeur informative que <i>quand elle est normale</i> : si ma bandelette est normale, cela signifie que je n'ai certainement pas d'infection ; si elle est anormale cela ne me renseigne pas, ce n'est qu'une incitation à surveiller, éventuellement à faire un examen en laboratoire. Et encore ! Le résultat du laboratoire sera ce qu'il sera, si je n'ai pas de symptômes ce résultat ne m'intéresse pas.</p> <p>Je vais vous donner un exemple : à chaque prise de sang le laboratoire me téléphone parce qu'il me trouve un trouble hépatique colossal. J'ai fait des explorations qui n'ont jamais rien rapporté, c'est comme ça depuis trente ans, et je ne m'en occupe plus. Et je vais très bien.</p> <p>La seule question que je me poserais serait de savoir si votre hyperactivité vésicale pourrait s'expliquer par une infection. Si c'était le cas il faudrait alors se souvenir de trois choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La présence de nitrites évoque surtout une infection par colibacille. Elle ne renseigne pas sur les autres infections. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La présence de leucocytes peut être causée par une infection. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il existe des germes qui passent inaperçus parce qu'ils ne poussent que sur des milieux de culture spéciaux.</p> <p>Mais je me doute bien que votre médecin y a pensé.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-05-26T06:53:40Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17483 2022-05-26T06:53:40Z <p>j ai 75ans j ai une lésion au cerveau je suis soigné avec tramadole et laroxile ils m arrive assez souvent d entendre soit un bébé pleurer (comme ce matin !) ou d autre vois qui me semble erte dans ma chambre !!si une personne à les mèmes symptomes !!</p> La bandelette urinaire 2022-04-01T07:37:26Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article72#comment17408 2022-04-01T07:37:26Z <p>Bonjour,</p> <p>Je n'ai aucun autre symptôme, sauf une vessie hyperactive qui va mieux aujourd'hui après avoir pris un traitement de 2 mois.<br class="autobr" /> Mais je m'inquiète en ayant fait un ecbu, mes leucocytes sont à 13 000 au lieu de 12 000 maximum.<br class="autobr" /> De plus, lorsque je fais un test de bandelettes urinaires, les leucocytes sont positifs car la couleur des leucocytes est violet. Les nitrites sont constamment négatif.<br class="autobr" /> Que dois je en penser sil vous plait et que faire ? Mon médecin ne sait pas trop et me dit que cest inutile de faire un autre ecbu, que ca bouge trop...<br class="autobr" /> Je vous remercie de votre retour<br class="autobr" /> Bien cordialement</p> Le sondage urinaire en fin de vie 2022-03-28T13:03:11Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article82#comment17403 2022-03-28T13:03:11Z <p>Bonjour, Moi.</p> <p>Que cherchez-vous à comprendre ?</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-03-28T13:01:57Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17402 2022-03-28T13:01:57Z <p>Bonjour, Patricia, et merci de ce message, auquel je suis confus de répondre si tard.</p> <p>J'espère vous avoir aidée. Si des points restent à éclaircir, je suis à votre disposition.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Le sondage urinaire en fin de vie 2022-03-28T11:23:13Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article82#comment17401 2022-03-28T11:23:13Z <p>J'ai rien compris</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-03-17T16:33:06Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17389 2022-03-17T16:33:06Z <p>Merci pour cet article clair et intelligent. Je me sens moins seule , après l'avoir lu, face à un très proche dont je m'occupe actuellement , qui a 81 ans et souffre de fausses routes . Merci pour les conseils et merci d'avoir pris le temps d'écrire sur ce sujet !</p> <p>_</p> Les pauses respiratoires 2022-03-03T10:07:00Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article77#comment17358 2022-03-03T10:07:00Z <p>Grand merci pour cet encouragement. Vous devez bien penser que quand on écrit dans ces conditions on n'en mène pas toujours large...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les pauses respiratoires 2022-03-01T13:27:12Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article77#comment17356 2022-03-01T13:27:12Z <p>bravo pour cet article, concis, précis et surtout plein de bon sens (confraternellement)</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-02-28T09:42:49Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17353 2022-02-28T09:42:49Z <p>Bonjour, Danielle, et merci de ce message.</p> <p>Mais... comment voudriez-vous que je puisse vous aider ? La personne dont vous parlez n'est ni un sujet âgé ni un malade en fin de vie. Et je me garderais bien de revendiquer un savoir psychiatrique que je n'ai pas. Si encore j'avais vu cette personne ! Mais ce n'est pas le cas, et ce ne le sera pas...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles psychiatriques du sujet âgé 2022-02-28T08:30:07Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article66#comment17352 2022-02-28T08:30:07Z <p>Article intéressant qu'en est-il d'une personne qui croit en permanence qu'on la vole ?? Elle n'est pas âgée et voit des voleurs partout...la collègue, la femme de ménage, la commercante qui lui aurait volé sa bague..etc..</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-02-22T12:56:02Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17344 2022-02-22T12:56:02Z <p>Bonjour, Marie.</p> <p>Je vais essayer de comprendre ce qui a pu se passer. Cela comporte évidemment une grande part d'incertitude, car je n'ai pas vu la situation. Je vais, et pour cause, m'en tenir à ce que vous avez écrit.</p> <p><i>Le 14 août 2020 elle a fait une fausse route dans sa maison de retraite. Elle a avalé un morceau de biscotte de travers</i>.</p> <p>C'est déjà une question redoutable : présentant les choses comme vous le faites, vous induisez le sentiment qu'il s'est agi d'une fausse route comme il nous en arrive à tous. Et c'est fort possible, en effet ; mais ne méconnaissons pas que c'est là un point crucial : s'est-il agi d'une fausse route accidentelle (la fausse route du fou-rire, en somme) ou bien avons-nous affaire au contraire à une dame qui faisait souvent des fausses routes minimes, si minimes qu'on ne s'en apercevait pas ou qu'on n'y prêtait pas attention, et qui, cette fois-là, a développé une manifestation plus spectaculaire parce que le corps étranger était un peu trop gros ?</p> <p><i>Elle m'a appelée à plusieurs reprises ce jour là et les suivants. Elle avait beaucoup de mal à parler car elle respirait très mal. Elle crachait et toussait beaucoup</i></p> <p>C'est très habituel, et c'est l'un des dangers essentiels des fausses routes : le corps étranger induit des spasmes, voire des réactions allergiques ; et surtout il tend à s'infecter, donnant des pneumonies d'inhalations qui peuvent être redoutables. À première vue elle y a échappé, mais c'est toujours la crainte.</p> <p><i>car elle ne parvenait pas à avaler sa salive. Nous avions l'impression qu'elle salivait beaucoup</i></p> <p>Le plus probable est qu'elle n'avalait pas sa salive parce qu'elle redoutait ce qui risquait de se passer si elle le faisait ; quand un patient est sujet aux fausses routes, l'essentiel de ce que le soignant observe résulte du fait que le malade a peur d'avaler.</p> <p><i>J'ai appelé plusieurs fois la maison de retraite pour connaitre les examens effectués et les solutions apportées à ce problème de fausse route. Malheureusement j'ai du me rendre à l'évidence, rien ne serait fait.</i></p> <p>Distinguons deux choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ce qui doit être fait pour lutter contre les conséquences de la fausse route. Tout ce que je sais c'est qu'il faut les prendre au sérieux ; cela a-t-il été fait ? En tout cas la suite a montré que les conséquences n'ont pas été importantes. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ce qui doit être fait pour lutter contre la répétition des fausses routes. L'article que vous avez lu a dû vous montrer que c'est tout sauf simple, et rarement à la portée d'une maison de retraite. C'est même la raison pour laquelle je l'ai écrit : on ne fera aucun progrès dans ce domaine tant qu'on n'aura pas mis en place une stratégie nationale complète de formation. On en est loin, et la prise en charge des fausses routes repose essentiellement sur la pensée magique.</p> <p><i>Le 31 août mon frère et moi décidons de ramener notre mère chez elle. Elle avait perdu beaucoup de poids et ne s'alimentait toujours pas. <br class="autobr" /> Après un passage de quelques jours à l'hôpital qui nous a conseillé de lui donner de la nourriture mixée et de l'eau pétillante, nous avons ramené notre maman à la maison où nous avons suivi les conseils des médecins.</i></p> <p>C'est une excellente solution, du moins si elle ne vous use pas trop.</p> <p><i>Notre mère a repris progressivement des forces mais a gardé des mois les problèmes de déglutition.</i></p> <p>D'où ma question initiale : cela ne se serait pas produit si la fausse route avait été isolée. Elle a donc probablement un trouble de déglutition plus ancien dont le morceau de biscotte (je n'ai jamais compris pourquoi quand vous êtes vieux on vous donne des biscottes) n'aura été que le révélateur.</p> <p>L'origine de ce trouble ? Vous m'en demandez beaucoup. Pour l'heure je me bornerai à suggérer que des accidents vasculaires cérébraux minimes, passés inaperçus, sont d'excellents coupables.</p> <p><i>Cependant le 5 décembre soit trois mois après elle a fait un AVC qui lui a enlevé une partie de sa mémoire et beaucoup de son expression orale.</i></p> <p>Pardonnez-moi, mais je vais vous compliquer la vie. Car (mais peut-être avez-vous la réponse) cela me pose immédiatement une question : comment sait-on qu'elle a fait un accident vasculaire cérébral ? Les apparences en effet peuvent être trompeuses. Idéalement il me faut : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un accident brutal. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Des signes probants. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Une imagerie attestant une lésion cérébrale récente. <br class="autobr" /> Et encore, cela ne prouve jamais formellement que ces trois points sont liés.</p> <p>Or il arrive trop souvent (mais comment faire autrement ?) que la conviction du médecin se fonde sur une probabilité : elle a dû faire un accident vasculaire cérébral. Et certes souvent on n'a pas tort. Ici, ce qui est inhabituel (mais ce n'est qu'inhabituel), c'est que les symptômes se réduisent à un trouble du langage et un trouble de mémoire. Mais alors il faut détailler.</p> <p>Le trouble du langage : de quoi parle-t-on ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a les dysarthries : la conception des mots n'est pas altérée, mais les nerfs commandant la langue et/ou le larynx sont atteints, de sorte que le malade ne sait plus prononcer. Bien entendu c'est là qu'on verra se produire des fausses routes, car il s'agit des mêmes nerfs. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a les dysphasies et aphasies : ce sont les zones responsables de la conception des mots qui sont lésées : le malade ne sait plus parler.</p> <p>Ces atteintes peuvent fort bien être isolées ; tout de même il est plus usuel que s'y associent diverses paralysies.</p> <p>Le trouble de mémoire : ils sont très fréquents dans tous les accidents vasculaires cérébraux, et d'ordinaire ils régressent, au moins partiellement. Mais rien n'interdit de concevoir une atteinte isolée du circuit de la mémoire. Mon problème est qu'il faudrait alors imaginer une atteinte très localisée de ce circuit, associé à une atteinte, également très localisée, de la commande des nerfs de la phonation (ou de la zone de conception du langage). C'est toujours possible, mais statistiquement rare. D'autre part ces atteintes sont tellement ponctuelles que l'imagerie ne montre rien, rendant difficile d'être formel sur le diagnostic. Je le redis : pour être catégorique il faut une imagerie montrant des lésions, et des lésions <i>récentes</i>. Cela peut être le cas ; mais je dois bien envisager l'hypothèse d'une dame qui n'a pas eu de scanner, ou dont le scanner a montré des séquelles d'accidents anciens, rendant le diagnostic plausible mais nullement certain. En tout cas un AVC qui lui a enlevé une partie de sa mémoire et beaucoup de son expression orale et rien d'autre est une rareté.</p> <p>D'où une autre hypothèse (mais je dis bien : une hypothèse) : votre mère a des problèmes de circulation cérébrale, mais elle les a depuis longtemps, et fait des micro-accidents à bas bruit, qui sont passés inaperçus jusqu'au jour ou un accident de trop révèle l'ampleur de la dégradation. Ce schéma classique est celui de la démence vasculaire, dans laquelle les fonctions intellectuelles, notamment de compréhension, sont souvent très peu atteintes, surtout à un âge avancé. En tout cas c'est celui qui explique le mieux ce que vous voyez.</p> <p>Je peux donc maintenant répondre à vos deux questions :</p> <p><i>Les conséquences d'une fausse peuvent elles durer plusieurs mois ?</i></p> <p>Pas vraiment. La conséquence immédiate est respiratoire, et les choses s'arrangent (ou s'aggravent) très vite. Par contre il y a une conséquence psychologique qui est que le patient doit retrouver confiance en sa déglutition.</p> <p><i>Cet AVC peut il être une conséquence de sa fausse route ?</i></p> <p>La seule manière serait que la fausse route (ou d'innombrables répliques de celle-ci, mais j'ai du mal à penser qu'on ne les aurait pas vues) engendre un trouble respiratoire tel que le cerveau ne serait plus suffisamment oxygéné. C'est bien fantaisiste, surtout qu'on attendrait alors des dégâts plus étendus, et non très localisés comme ceux qu'on suppose ici.</p> <p>Mais encore une fois, je parle ici d'une situation dont je ne sais rien…</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Prise en charge des fausses routes en gériatrie 2022-02-21T16:58:18Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article128#comment17343 2022-02-21T16:58:18Z <p>Bonjour,<br class="autobr" /> Ma maman va avoir 92 ans le 4 mars.<br class="autobr" /> Le 14 août 2020 elle a fait une fausse route dans sa maison de retraite. Elle a avalé un morceau de biscotte de travers. <br class="autobr" /> Elle m'a appelée à plusieurs reprises ce jour là et les suivants. Elle avait beaucoup de mal à parler car elle respirait très mal. Elle crachait et toussait beaucoup car elle ne parvenait pas à avaler sa salive. Nous avions l'impression qu'elle salivait beaucoup.<br class="autobr" /> J'ai appelé plusieurs fois la maison de retraite pour connaitre les examens effectués et les solutions apportées à ce problème de fausse route. Malheureusement j'ai du me rendre à l'évidence, rien ne serait fait.<br class="autobr" /> Le 31 août mon frère et moi décidons de ramener notre mère chez elle. Elle avait perdu beaucoup de poids et ne s'alimentait toujours pas. <br class="autobr" /> Après un passage de quelques jours à l'hôpital qui nous a conseillé de lui donner de la nourriture mixée et de l'eau pétillante, nous avons ramené notre maman à la maison où nous avons suivi les conseils des médecins. <br class="autobr" /> Notre mère a repris progressivement des forces mais a gardé des mois les problèmes de déglutitions.<br class="autobr" /> Cependant le 5 décembre soit trois mois après elle a fait un AVC qui lui a enlevé une partie de sa mémoire et beaucoup de son expression orale.<br class="autobr" /> Les conséquences d'une fausse peuvent elles durer plusieurs mois ?<br class="autobr" /> Cet AVC peut il être une conséquence de sa fausse route ?<br class="autobr" /> Merci pour votre réponse.<br class="autobr" /> Cordialement</p> La personne âgée opposante 2022-02-03T20:40:55Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article110#comment17311 2022-02-03T20:40:55Z <p>Bonsoir Marina.</p> <p>Je suis soulagé de voir que les choses s'arrangent. Il semblerait que la crise que vous venez de vivre soit liée pour l'essentiel au contrecoup de l'hospitalisation. C'est une hypothèse que nous avions envisagée.</p> <p>Reste le problème de fond. Votre mère présente un trouble psychiatrique ancien et chronique. Vous en saurez bientôt davantage, je ne vais donc pas prendre de risques, tout juste faire un pari : je trouve ces délires assez peu élaborés pour une personnalité paranoïaque. Mais outre que je n'en sais rien, je n'ai pas de diagnostic précis à vous proposer, surtout pour une histoire qui apparaît très ancienne. Au fait, vous ne m'avez pas dit quel est son âge. Ce qui par contre me rend un peu pessimiste c'est que ces troubles, installés progressivement dans un huis clos avec une sœur malade, puis dans une solitude délibérément organisée, ont toute chance d'être complètement fixés, et au-delà de toute ressource thérapeutique ; naturellement le fait qu'il s'agisse d'une personne âgée rend les choses encore plus difficiles.</p> <p>Par contre, il y a une autre question à se poser : comment supporte-t-elle son délire ?</p> <p>Délirer, c'est décider, ne pouvant pas supporter la réalité telle qu'elle est, de construire une autre réalité. C'est plus ou moins compliqué, plus ou moins confortable, mais à ce prix le malade arrive à vivre ; et il n'est pas forcément sans danger de faire crouler inconsidérément cette construction. Il se peut fort bien que votre mère ait trouvé là une forme d'équilibre auquel je ne serais pas forcément tenté de toucher.</p> <p>Quant à savoir pourquoi <i>elle n'arrive plus à réfléchir, elle ne trouve plus ses mots, elle oublie tout</i>… », il y a plusieurs hypothèses. Mais les deux qui me viennent à l'esprit sont : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Hypothèse pessimiste : une évolution démentielle. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Hypothèse optimiste : les traitements qu'on lui donne, tout simplement.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> La personne âgée opposante 2022-02-03T14:28:06Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article110#comment17309 2022-02-03T14:28:06Z <p>Cher Docteur,</p> <p>Je vous remercie de votre aimable réponse très détaillée.</p> <p>Je réponds à vos questions.</p> <p>Il serait très important d'en savoir plus : quel était ce trouble ? <br class="autobr" /> Ma mère me disait que son son frère la volait, puis son locataire, ses femmes de ménage. Elle a accusé son ami de gratter les murs pour les faire tomber, et de lui voler ses robes. L'entreprise qui tondait les fossés lui cassait le grillage de sa clôture. La personne qui lui a refait son matelas de laine lui a volé de la laine… Et c'était impossible de lui parler raisonnablement.</p> <p>Est-il vraiment apparu brutalement ? À quelle occasion ? <br class="autobr" /> Elle a toujours été très introvertie et peu sociable. Ce comportement a empiré avec le temps.</p> <p>Vivait-elle seule parce que votre père était décédé ?<br class="autobr" /> Elle vivait avec sa sœur qui était soignée pour schizophrénie. Puis sa sœur est décédée il y a 30 ans et elle a vécu seule à la campagne dans une maison sans confort.</p> <p>Ajoutons une remarque : vous me parlez d'un anxiolytique.<br class="autobr" /> Oui, effectivement, je me suis trompée. C'est du Risperdal qu'on lui donne tous les jours.<br class="autobr" /> Et à ceci s'ajoute du Seresta si elle crie et tape les aides soignantes.</p> <p>Mais si elle a un déambulateur, c'est qu'elle présente un trouble de la marche plus ancien. C'est une histoire que j'aimerais que vous me racontiez.
Oui, effectivement, elle a des difficultés pour marcher depuis au mois 15 ans. Quand elle était chez elle, elle marchait avec des cannes et elle avait toujours peur de tomber. Elle avait eu des vertiges de Ménière et elle craignait de se casser un os en tombant. <br class="autobr" /> Et, en arrivant à la maison de retraite, elle s'est mise à utiliser le déambulateur.</p> <p>Et vous avez totalement raison de penser qu'il faut la stimuler. <br class="autobr" /> Les aides soignantes l'ont encouragée à marcher et elle a repris la marche. Elle marche au restaurant en s'appuyant sur son fauteuil roulant.</p> <p>Êtes-vous fille unique ?<br class="autobr" /> Oui, je suis fille unique.</p> <p>C'est cette situation qu'il faudrait débloquer.<br class="autobr" /> Il semble que les choses se passent mieux avec les aides soignantes. Ma mère remarche, elle accepte les soins d'hygiène. Par contre, elle me dit qu'elle n'arrive plus à réfléchir, elle ne trouve plus ses mots, elle oublie tout… Je me demande quelle pathologie cela peut être.</p> <p>Mais pour la question de l'opposition, c'est aplani pour l'instant.<br class="autobr" /> J'ai pris contact avec un pôle psychiatrique de la personne âgée avec qui je peux parler. Et si de nouvelles questions surgissent, je prendrai RV avec la cadre de santé.</p> <p>Je vous remercie beaucoup pour votre soutien.<br class="autobr" /> Marina</p> La personne âgée opposante 2022-01-26T11:47:29Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article110#comment17300 2022-01-26T11:47:29Z <p>Bonsoir, Marina.</p> <p>Je vais commencer par vous dire ce que, par précaution, je ne me lasse jamais de répéter : je vais vous parler d'une malade que je n'ai pas vue, ce qui est la dernière chose à faire : si la médecine pouvait se faire par correspondance, ça se saurait. Il vous faut donc n'accorder à ce que je vais vous dire qu'un crédit limité ; ou plutôt le prendre pour ce que c'est : une simple réflexion théorique, basée sur ce que vous écrivez, alors que je n'ai notamment aucun moyen de savoir si votre vision de la situation est réaliste, exacte, lucide. Et même si c'est le cas, il reste que je vais donner un avis sur une problématique dont j'ignore tout. Mais si vous êtes prête à accepter ce risque, alors allons-y.</p> <p>Nous avons donc affaire à une très vieille dame qui présente un trouble du comportement. Mais vous apportez d'emblée un élément important : en fait ce comportement est problématique depuis trente ans. Il serait très important d'en savoir plus : quel était ce trouble ? Est-il vraiment apparu brutalement ? À quelle occasion ? Vivait-elle seule parce que votre père était décédé ? Etc.</p> <p>C'est une question très importante parce qu'on vous a parlé de psychose paranoïaque. Je veux bien savoir qui a posé ce diagnostic, et d'ailleurs je reviendrai sur ce point. Mais ce qui est indiscutable c'est qu'on ne déclenche pas une psychose paranoïaque à quatre vingt quinze ans. La psychose naît sur une personnalité pathologique, et on doit pouvoir repérer des traits paranoïdes bien plus précocement dans la vie de votre mère. D'autre part si on peut découvrir qu'il s'est passé quelque chose voici trente ans, cela peut fournir une explication qui serait à considérer.</p> <p>Vous décrivez un état délirant à type d'accusations de vol. J'en dirai quatre choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Les aides à domicile indélicates, cela existe. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Tout peut se voir, mais les délires paranoïaques sont souvent assez élaborés. Ici vous décrivez plutôt un délire de préjudice, qui peut procéder d'autres mécanismes, et qui sont assez fréquents en gériatrie. Notons aussi que d'autres mécanismes pourraient être évoqués, comme une dépression délirante. Je suis également frappé par votre insistance à parler de son anxiété, qui n'est guère au premier plan chez le paranoïaque. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> À cet âge la première cause de délire est la démence, notamment de type Alzheimer. J'ai bien noté que les accusations de vol sont très anciennes, mais je suis sûr que si vous affinez votre chronologie vous allez vous apercevoir que les choses sont plus complexes ; en outre il est tout à fait possible que plusieurs troubles différents se soient succédé. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Une autre raison de ces accusations de vol est bien plus fréquente encore : votre mère n'acceptait pas les aides à domicile. Elle ne les acceptait pas parce qu'elle avait de solides raisons de penser que ces aides à domicile allaient s'apercevoir de défaillances qu'elle voulait cacher à tout prix. Mais aussi elle ne les acceptait pas parce qu'elle tenait à conserver le contrôle de la situation : votre aide, oui, parce qu'elle pouvait vous solliciter à sa guise ; l'aide à domicile, c'était plus difficile à maîtriser. Notez qu'elle reconnaissait avoir besoin d'aide ; ce n'est pas si fréquent, et cela nous explique pourquoi elle n'a pas trop regimbé quand il lui a fallu entrer en institution.</p> <p>Bref, elle se trouve en maison de retraite, avec un diagnostic de psychose paranoïaque. Je vous ai dit mes doutes à ce sujet. Mais plus simplement (plus humblement) je vous dirais que la gérontopsychiatrie est une discipline très difficile, et que je ne me risquerais pas trop sur ce sujet. Ceci répond à l'une de vos questions : faut-il mettre un gérontopsychiatre dans le circuit ? Oui, sans hésitation. Ajoutons une remarque : vous me parlez d'un anxiolytique. Je pense que vous vous trompez, car l'anxiolytique n'est pas le traitement adéquat pour une psychose ; je présume qu'il s'agit d'un neuroleptique mais : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ce n'est pas de gaieté de cœur qu'on prescrit un neuroleptique à cet âge ; il y faut beaucoup de doigté, d'expérience, de sagacité, de prudence. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si c'est réellement un anxiolytique, il est possible que le médecin qui l'a prescrit ait cru bien faire, mais que cela montre qu'il ne connaît pas la psychiatrie du sujet âgé ; il est possible aussi qu'il le sache fort bien, mais qu'il se soit résigné à cette solution comme à un moindre mal.</p> <p>Passons. Elle a été hospitalisée récemment pour une embolie pulmonaire. Je passe sur le fait, car je suppose que cela a été étudié par les médecins de l'hôpital, qu'une embolie pulmonaire peut avoir une cause ; autrement dit que sous l'embolie il peut y avoir une autre maladie, de sorte que si elle est guérie de cette embolie elle ne l'est pas de la maladie causale. Mais les médecins vous diront ce qu'il en est, et s'ils ont trouvé quelque chose.</p> <p>Elle est rentrée. Je vous fais observer que cela fait cinq jours, et qu'il est bien trop tôt pour s'alarmer. Ce qui est en train de se passer, c'est d'abord et avant tout que vous payez les conséquences de l'hospitalisation. Cette hospitalisation était inévitable, ce n'est pas le sujet. Mais il faut toujours redouter les hospitalisations à cet âge, car quand vous mettez une vieille personne dans un lit rien ne vous permet de dire si vous allez pouvoir la relever. Tout de même, je note un détail : vous me dites que vous l'avez fait marcher avec son déambulateur. Mais si elle a un déambulateur, c'est qu'elle présente un trouble de la marche plus ancien. C'est une histoire que j'aimerais que vous me racontiez.</p> <p>Bref elle ne veut plus se lever, et la raison essentielle est qu'au cours de son hospitalisation elle s'est désadaptée à la marche. Tout comme elle a perdu sa continence. Cela peut se récupérer, mais ce n'est ni facile ni certain.</p> <p>Une autre explication peut être qu'elle ne souhaite plus continuer à vivre. Je vous dis cela parce qu'il faut bien y penser. Soit que cette hospitalisation lui ait fait peur et qu'elle surestime la gravité de son état ; soit que, mystérieusement, elle sente que (comme je vous l'ai laissé entendre) sous cette embolie il y a autre chose ; en somme elle pourrait être plus réaliste que vous. Mais il se peut aussi que votre mère ait décidé qu'à quatre vingt quinze ans il est temps que sa vie se termine. Je vous le redis : j'en parle parce qu'il faut l'envisager, et parce que si c'est le cas, alors non seulement ce désir mérite d'être respecté mais encore vous aurez beau faire, elle parviendra à ses fins.</p> <p>Mais je ne vais pas insister sur ce point : je n'en sais rien, c'est très délicat, il y a d'autres hypothèses à soulever avant, et surtout elle montre des signes qu'elle n'en est pas là. Notamment vous conservez une influence sur elle, comme le montre l'épisode de la marche. Et vous avez totalement raison de penser qu'il faut la stimuler. Quelle que soit l'idée qu'on peut se faire de son refus de se lever : je peux comprendre ce refus, je peux le respecter, mais je n'ai pas à l'approuver ; si je me contentais de ne pas insister, de ne pas m'occuper du problème, je ne ferais que dire à ma mère : « ça m'est égal » ; ce serait un abandon.</p> <p>Mais il y a la réalité, et la réalité est que vous ne pouvez pas passer votre vie dans la maison de retraite. Le pourriez-vous, d'ailleurs, qu'il ne le faudrait pas. Ce que vous décrivez c'est une situation où votre mère se raccroche à vous, qu'elle attend tout de vous, et ce n'est sain ni pour elle ni pour vous. En somme ce qu'elle reconstitue c'est le schéma qu'elle avait mis en place à son domicile : aucun aidant extérieur, la seule référence est vous (par parenthèse, êtes vous fille unique ?).</p> <p>Alors il y a les aides-soignantes. Je comprends qu'elles soient désemparées. D'ailleurs votre mère fait ce qu'il faut pour ça.</p> <p>Il faudrait d'abord se demander quels sont les faits. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a des soignants maltraitants, c'est-à-dire des gens qui profitent de leur situation pour se procurer des plaisirs plus ou moins sadiques. Ne l'oublions pas trop vite. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a, en bien plus grand nombre, des soignants qui sont mal formés, et qui utilisent la violence comme un moyen parce qu'ils n'en connaissent pas d'autre. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il y a aussi des soignants qui perdent leur calme parce que le patient s'ingénie à le leur faire perdre. Ce sont des fautes professionnelles, mais c'est parfois très difficile, et j'ai la liste de mes propres manquements dans ce domaine. Il faut avoir pitié des soignants, ce qui ne signifie nullement qu'on passe leurs défaillances par pertes et profits ;</p> <p>Et puis il y a des conflits plus ou moins « inventés » par le patient, qui par là ne fait que manifester son angoisse.</p> <p>Ce qui est certain c'est que vous ne passerez pas en force.</p> <p>Que peut-on dire du comportement des aides-soignantes ?</p> <p><i>Il me semble que les aides soignantes « en ont marre »</i>.</p> <p>Oui, et il y a de quoi. Elles se retrouvent avec le mauvais rôle, et votre mère leur donne celui de bourreau sadique ; autrement dit elle les touche au plus sensible, car l'aide-soignante a besoin d'être une bonne soignante, maternelle, douce, et reconnue comme telle. Elles souffrent d'être déniées dans ce statut, et le fait que, parfois, sans doute, elles s'énervent leur est une souffrance supplémentaire, car elles savent bien de quoi elles ont pu se rendre coupables, de quoi elles n'ont pas lieu d'être fières.</p> <p><i>Elles me posent la question : « Comment faire avec votre mère ? On ne peut pas la laisser sans manger. »</i></p> <p>Oui et non. Je veux dire qu'il y a une limite, c'est qu'elles ne vont pas manger à sa place. Si une vieille personne refuse de manger, c'est effectivement une alerte rouge, car elle se met en grand danger ; mais si elle est résolue rien n'y fera, et je m'opposerais à une alimentation artificielle.</p> <p>Seulement elles sont dans une contradiction :</p> <p><i>Si ma mère ne va pas au restaurant, les aides soignantes craignent un phénomène de glissement.</i></p> <p>Là aussi elles ont raison et tort : ce n'est pas si elle ne va pas au restaurant qu'elle se met en danger, c'est si elle ne mange pas. Et la formulation est intéressante : <i>un phénomène de glissement</i>. Elles font bien de le craindre, même si je dois passer sur le fait que le syndrome de glissement est une entité spécifiquement française, par laquelle on décrit ces patients qui, sans qu'on sache très bien pourquoi, se laissent glisser vers une mort de manière souvent inéluctable. Mais il faut être sensible à l'ambiguïté du propos ; car elles parlent aussi d'un autre glissement, celui qui risque de se produire si elle ne va pas au restaurant : la pente glissante, qui va faire que si elles acceptent qu'elle mange dans sa chambre elles seront vite confrontées à d'autres exigences, sans parler du fait qu'elles craignent d'avoir à gérer la contagion de cette revendication à d'autres résidents. D'un côté elles exagèrent ce risque, de l'autre elles sont tenues de le prendre en compte.</p> <p><i>Elles ne veulent pas lui amener un plateau dans sa chambre car c'est un travail en plus, alors qu'il y a le Covid à gérer.</i></p> <p>Bien sûr. Mais elles ne sauraient mieux montrer leur ambivalence : elles sont prêtes à tout sauf à prendre cette mesure simple, et qui pourrait être efficace.</p> <p>Cette situation est classique : on a créé un affrontement, dans lequel personne ne peut céder sans perdre la face. Cette erreur, je l'ai commise un nombre incalculable de fois ; ajoutons que j'ai toujours perdu. Ce qu'il y a derrière, c'est le soupçon, dont elles ont bien raison, sauf que ça ne sert à rien, de l'avoir que votre mère leur fait un caprice. L'aide-soignante a besoin d'assumer un rôle de mère, mais cela inclut à ses yeux le pouvoir de punir.</p> <p>C'est cette situation qu'il faudrait débloquer. Je ne sais pas si les équipes de cette maison de retraite bénéficient d'un groupe de parole. En tout cas c'est une raison de plus pour introduire un gérontopsychiatre dans le circuit. Quant à en trouver un c'est une autre affaire.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> La personne âgée opposante 2022-01-25T08:07:15Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article110#comment17298 2022-01-25T08:07:15Z <p>Bonjour cher Docteur,</p> <p>Et merci pour cet article extrêmement utile ! <br class="autobr" /> Je l'ai trouvé en tapant "personne âgée opposante".</p> <p>Ma mère est dans une maison de retraite depuis 2 ans.<br class="autobr" /> Auparavant, elle vivait seule depuis 30 ans dans une maison en pleine campagne, sans confort et sans hygiène.</p> <p>Toutes les aides de vie qui sont passées chez elles ont été traitées de voleuses et licenciées.</p> <p>Elle a toujours pensé qu'on la volait, ce qui était faux. Elle était très anxieuse, elle voulais être aidée, et il fallait que je l'appelle tous les jours.</p> <p>Puis, elle est devenue de plus en plus anxieuse et elle a appelé le Samu pour une arthrose au genou, s'est retrouvée 3 semaines à l'hôpital pour cette anxiété.</p> <p>L'hôpital lui a proposé d'aller dans la maison de retraite à côté et elle a accepté. Comme c'était à 700 km de chez moi, je lui ai proposé de venir à la maison de retraite près de chez moi, et elle a accepté.</p> <p>À la maison de retraite, ils ont diagnostiqué une psychose paranoïaque et elle prend un anxiolytique.</p> <p>Elle a toujours été assez rebelle aux contraintes de l'Ehpad.</p> <p>Le 2 janvier 2022, elle a eu un embolie pulmonaire et elle a du séjourner à l'hôpital pendant 10 jours. Dieu merci, elle a guéri et elle est rentrée dans sa maison de retraite.</p> <p>À son retour, j'ai constaté que ma mère ne voulait plus se lever et qu'elle n'allait pas aux toilettes sans aide. À l'hôpital, elle restait avec des protections et j'ai constaté une allergie aux cuisses due, je pense, à la macération de l'urine.</p> <p>Je lui ai proposé de marcher jusqu'au restaurant de l'Ehpad avec son déambulateur, en la tenant par le bras pour lui donner de l'assurance. Et elle a bien marché.</p> <p>En discutant avec l'infirmière, nous sommes donc tombées d'accord sur le fait qu'il serait bon de la stimuler pour qu'elle conserve ses capacités de marche.</p> <p>Le hic, c'est qu'un jour, en allant la voir, elle s'est plainte du fait que l'aide soignante l'avait forcée à se lever et à aller au restaurant alors qu'elle ne voulait pas.</p> <p>Et depuis, elle refuse les soins d'hygiène et ne veut plus qu'on la pousse à aller au restaurant, même en fauteuil roulant. Elle dit qu'on veut la forcer et que les "femmes" sont méchantes.</p> <p>À tel point qu'elle crie lorsque les aides soignantes viennent la chercher pour aller au restaurant. Et les aides soignantes disent qu'elles "en ont marre et qu'elles ne savent plus quoi faire".</p> <p>Elle mets des excréments sur ses draps car elle a du mal à se nettoyer seule, et elle refuse de changer de vêtements (ce n'est pas nouveau).</p> <p>En discutant avec ma mère, elle m'a expliqué qu'elle était tombée à l'hôpital et qu'elle a peur de se casser quelque chose (comme sa soeur qui s'est cassé le col du fémur).</p> <p>Cette aide soignante l'aurait forcée à sortir de son lit, sans douceur, et elle a eu peur de tomber, donc elle s'est mise à crier.</p> <p>Et maintenant elle refuse toutes leurs interventions.</p> <p>Elle m'a appelée un soir et dit qu'elle a peur, qu'on veut la tuer, qu'on essaye de rentrer dans sa chambre, ou bien que son téléphone ne fonctionne pas… Je dois alors la tranquilliser en parlant.</p> <p>Elles me posent la question : "Comment faire avec votre mère ? On ne peut pas la laisser sans manger."</p> <p>Mais je suis complètement démunie et bien incapable de leur répondre.</p> <p>Si ma mère ne va pas au restaurant, les aides soignantes craignent un phénomène de glissement.</p> <p>Il me semble que les aides soignantes "en ont marre" : elles ne veulent pas lui amener un plateau dans sa chambre car c'est un travail en plus, alors qu'il y a le Covid à gérer.</p> <p>Je pense qu'un plateau, ce n'est pas la mort. Ma mère a 95 ans et elle rentre de l'hôpital. Un peu de souplesse ne ferait pas de mal.</p> <p>Faut-il que je trouve un gériatre ou un gérontopsychiatre ?</p> <p>Comment faire ?</p> <p>Merci de votre attention, Docteur,<br class="autobr" /> Belle journée à vous,<br class="autobr" /> Marina</p> Définir les soins palliatifs 2021-11-29T20:10:24Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17215 2021-11-29T20:10:24Z <p>Bonsoir, David.</p> <p>Je crois qu'il ne faut pas que j'insiste : je ne saurai pas pourquoi vous êtes dans cette situation : une discopathie n'est pas une raison pour avoir une rétention chronique incurable à votre âge. Mais cette explication, soit vous la connaissez et ne souhaitez pas me la donner, soit vous ne la connaissez pas. Dans les deux cas il ne sert à rien de maintenir ma question.</p> <p>Je reste donc à votre écoute, espérant vous être utile.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-11-28T11:33:50Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17213 2021-11-28T11:33:50Z <p>Oui soutien psyckiatrie et psycologue et hypnose et sophrologie<br class="autobr" /> Suivi centre de la douleurs chronique pour mon dos Lombalgie aiguë et Chronique avec discophatie l5 et s1 <br class="autobr" /> Lombalgie et globe vésicale et conspation et mécanique <br class="autobr" /> Maintenant ide libérale et centre de soins sont interdites intervenir chez moi demandé urologie sur sondage a demeure trop conflictuel <br class="autobr" /> Je suis actuellement stable mantal et psychologique j'ai juste vécu des tromatisme psychique et psychologique important que le psychiatre interdite aborder <br class="autobr" /> Oui je suis actuellement autosondage avec des infections urinaires bactérienne positif du globe vésicale et conspation <br class="autobr" /> Pour le moment compliqué de faire poser la sondage a demeure <br class="autobr" /> Désolée pour écriture et faut orthographe on comprend mon histoire je galère depuis 1 ans niveau domicile</p> Deuils et pertes chez le sujet âgé 2021-11-26T17:12:05Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article21#comment17212 2021-11-26T17:12:05Z <p>Bonjour, Johann.</p> <p>Je ne suis pas sûr d'en savoir beaucoup plus que vous sur cette question… à vrai dire plus je vais et plus je pense que les directives anticipées sont une fausse bonne idée.</p> <p>Oh, dans le principe, qui ne souscrirait ? Disposer d'un texte indiquant les volontés de la personne en cas de situation un peu cornélienne, c'est un soulagement : combien de fois ne me suis-je pas trouvé à devoir faire des choix sans aucun repère sur la volonté de la personne ! on serait tout de même bien plus à l'aise si on avait un guide.</p> <p>Sauf que tout se complique très vite.</p> <p>D'abord, il faut savoir quoi mettre. Je veux dire que j'ai lu un bon nombre de directives anticipées où le signataire indiquait clairement qu'il ne voulait pas d'acharnement thérapeutique, et qu'il ne voulait pas souffrir. On va loin avec ça… J'ai écrit mes propres directives anticipées, je sais combien de temps j'y ai passé pour essayer d'écrire des choses qui aient une chance d'éclairer le médecin qui s'occupera de moi (je crois que la syntaxe de cette phrase est un peu problématique). Et je ne suis pas loin de croire qu'il y a deux situations : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Celle des gens qui sont capables d'écrire des directives anticipées qui tiennent la route. Je prends le pari qu'ils se trouvent dans un contexte où ils n'ont aucun besoin de les écrire parce que leur entourage sait parfaitement ce qu'il en est. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ceux qui ne sont pas en état de les écrire, et qui ne peuvent mettre sur le papier que des généralités qui n'aident en rien la décision.</p> <p>J'ai écrit les miennes, en me disant que cela pouvait servir en cas de conflit entre les proches et le médecin. Mais outre qu'il ne faut pas s'illusionner sur la valeur juridique des directives anticipées, notamment parce que (et je tiens que c'est une <i>bonne chose</i>) c'est le médecin qui décide en dernier ressort, j'ai tendance à penser que si un conflit surgit ma prise en soins sera de toute manière déplorable. En somme mes directives anticipées n'auront guère d'autre utilité que de déculpabiliser un médecin un peu trop torturé.</p> <p>Il y a de toute manière une limite infranchissable : se projeter sur sa fin de vie, c'est parler de quelque chose qu'on n'a jamais vécu, dont on n'a aucune expérience, c'est nécessairement parler en l'air. Les directives anticipées ne sont rien d'autre qu'une fiction commode qui, quand de toute manière la messe sera dite, permettra aux décideurs de se cacher derrière cette fiction. Ma conviction est que dans cette circonstance il n'y a rien de mieux à faire que de s'en remettre à la sagesse collective de la communauté qui se réunira autour de moi pour décider à ma place parce que de toute façon c'est cela qui se passera. Même si j'ai écrit quelque chose. Car ce quelque chose, il faudra de toute manière l'interpréter, le mettre en perspective ; et on tombera nécessairement sur le théorème de Wittgenstein : <i>quels que soient les principes qu'on se donne et quelle que soit l'action qu'on mène il y a toujours un moyen de démontrer que l'action est conforme aux principes</i>. Le seul intérêt de mes directives anticipées sera de montrer que j'ai à un moment de ma vie, porté sur mon mourir un regard serein, ce qui devrait aider à apaiser les angoisses de mon médecin.</p> <p>Bref, à votre place je ne me désolerais pas outre mesure. La vérité est que la question : que voudrait le malade dans cette situation ? n'a en fait guère de sens, et qu'entre gens de bonne volonté il est tout de même assez rare qu'on ne trouve pas une solution raisonnable, sachant que de toute manière si le médecin n'est pas raisonnable tous les papiers du monde ne l'empêcheront pas de faire n'importe quoi.</p> <p>Mais vous vous désolez parce que vous n'arrivez pas à aborder le sujet avec vos résidents. Cela ne me surprend pas, et j'ajoute qu'il y a là un problème difficile.</p> <p>J'ai pour ma part fait rédiger un nombre non négligeable de directives anticipées. Mais c'était toujours dans les mêmes circonstances : un malade arrivait en soins palliatifs avec une demande d'euthanasie. Je répondais que je ne pouvais ni ne voulais accepter cette demande, mais que je pouvais établir avec lui une sorte de contrat, définissant ce que nous ferions et ne ferions pas, ajoutant que pour ma part ce contrat serait ma loi. Cela éteignait immédiatement la demande d'euthanasie. Mais : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Nous étions dans un contexte explicite de fin de vie. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Nous étions en mesure de dire quels étaient les risques les plus probables, et donc d'écrire des choses précises. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je me suis toujours demandé s'il s'agissait de directives anticipées au sens où on l'entend habituellement, ou si ce n'était pas plutôt un contrat passé entre la personne et moi, contrat qui ne pouvait être considéré comme opposable à un autre médecin. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Psychologiquement ce n'était nullement neutre, et il y aurait sans doute eu à dire. Tout ce que je sais c'est que ça avait l'air de fonctionner ; mais vous savez bien qu'on est toujours très content de ce qu'on fait. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Je me suis fait remballer en groupe de réflexion éthique parce que des membres du groupe considéraient qu'en évoquant au malade la possibilité de directives anticipées j'induisais une réponse, perdant ainsi ma neutralité. Mais d'autres membres ont fait remarquer que si le malade ne sait pas qu'il peut en écrire, il ne peut exercer sa liberté de le faire. Toujours est-il que ce problème de l'induction est à considérer. Après tout il en va de même pour la sédation : soit le malade ignore qu'il peut en bénéficier, soit il le sait ; mais dès lors qu'il le sait on doit s'attendre qu'il la réclame, même s'il ne se trouve pas dans une situation catastrophique ; et je ne parle même pas de l'entourage, qui supporte la souffrance du malade encore plus mal que le malade lui-même.</p> <p>Bref, je n'en ferais pas une affaire.</p> <p>Ce que vous pourriez tenter, c'est de proposer une sorte de causerie. Je ne sais pas si cela se pratique chez vous, mais vous pourriez trouver un intervenant qui aborderait le sujet d'un point de vue général et présenterait la possibilité d'écrire des directives. Ce serait moins agressant que des entretiens en tête à tête. Il faudrait aussi voir si vous êtes le bon interlocuteur : que se passerait-il si les médecins de l'établissement s'y essayaient ?</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Deuils et pertes chez le sujet âgé 2021-11-26T10:59:19Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article21#comment17210 2021-11-26T10:59:19Z <p>Bonjour Dr. Cavey,</p> <p>Tout d'abord merci pour cet article et ces pensées. En effet Kubler Ross a la mérite d'avoir posé un cadre mais vous faites justement remarquer qu'en sciences de l'humain rien n'est figé et aussi simple et il faut savoir sortir des schémas afin de rester accompagnant.</p> <p>En stage de direction dans un établissement pour personnes âgées dépendantes breton, je peine à aborder la sujet des directives anticipées (un document de la loi française qui permet d'écrire ses volontés pour la fin de vie) dans mon établissement.<br class="autobr" /> La quasi-totalité de mes résidents clairs d'esprits sont opposants dès que le sujet est abordé. Soit c'est un refus de communication soit un détournement de conversation qui s'en suit.<br class="autobr" /> Hors une fois la fin de vie arrivée les proches et les professionnels se retrouvent démunis face à un résident qui ne peut plus s'exprimer.</p> <p>Je me permets de vous solliciter face à l'impuissance de mon équipe de moi-même face à cette situation, qui, à notre époque, de devrait plus exister. Si vous avez des pistes d'approches ou des media d'entrée en communication je vous en saurais gré.</p> <p>Bien cordialement, <br class="autobr" /> Johann Voltzenlogel</p> L'agonie 2021-11-25T20:44:09Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17207 2021-11-25T20:44:09Z <p>Bonsoir, Janine.</p> <p>Je vais essayer de vous expliquer cela. Gardez tout de même en mémoire que je serais plus à l'aise si j'avais vu votre mari : ne l'ayant pas connu je risque fort de vous raconter n'importe quoi.</p> <p>Ce qu'il faut comprendre, c'est que le langage est produit par plusieurs systèmes cérébraux qui ont leur autonomie, et surtout leurs automatismes. Nous le savons tous : il y a des phrases pour lesquelles je vais devoir travailler, choisir mes mots ; je vais hésiter sur un accord de participe ; ou encore, comme je tiens à échapper au ridicule de l'écriture inclusive, je vais m'acharner à concevoir une phrase où il n'y ait pas de masculin qui l'emporte sur le féminin ; etc. Bref je vais penser ma phrase.</p> <p>Mais nous savons bien qu'heureusement nous n'avons pas à faire un tel travail pour toutes les phrases. Nous avons tout un répertoire de langage beaucoup plus automatique, comme les formules de salutation, bien sûr, ou les jurons qui nous échappent littéralement ; il y a les tics de langage, il y a tout ce que nous récitons, souvenirs, poèmes, etc.</p> <p>Il y a aussi un langage réflexe. Par exemple beaucoup de gens, quand ils ont peur, disent ainsi des mots qu'ils ne contrôlent pas.</p> <p>Ces différents types de langage sont mis en œuvre par des parties différentes du cerveau.</p> <p>Il faut distinguer deux choses : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La dysarthrie, qui est une incapacité mécanique à former les lettres et les mots. Il y a des paralysies qui peuvent compromettre le fonctionnement de la langue, ou du larynx. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> L'aphasie, qui est une incapacité à concevoir, ou à mettre en forme, les mots, avant de transmettre les ordres nécessaires au larynx, à la langue, aux lèvres.</p> <p>Votre mari a eu une aphasie dite de type Broca, dans laquelle le malade perd la capacité à faire des phrases ; le langage se réduit à quelques mots, même pas forcément adaptés. Mais cela c'est le langage volontaire. Ce que vous avez constaté, c'est simplement que le langage automatique, lui, était largement préservé. C'est que les phrases qui lui échappaient, notamment dans son sommeil, passaient par ce circuit du langage automatique.</p> <p>C'est très déroutant, et je sais bien que c'est là une source importante de souffrance. Je regrette que vous n'ayez pas rencontré d'interlocuteur qui vous l'explique.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> L'agonie 2021-11-24T23:43:02Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17205 2021-11-24T23:43:02Z <p>Je n'arrive pas à comprendre que mon époux ne parlant plus à part "oui et non", 3 jours avant un ultime AVC qui l'a définitivement empêché de prendre nourriture et boissons, a pu, les nuits, se mettre à parler très fort avec des phrases entières ressemblant à des ordres et rappelant son métier de principal de collèges ; du genre :" qu'allez-vous faire de ces gamins ?"..."Rendez -moi rapidement ces rapports"<br class="autobr" /> Comment est-ce possible ?</p> L'agonie 2021-11-14T12:54:25Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17182 2021-11-14T12:54:25Z <p>Bonjour, Caroline, et merci de votre message.</p> <p>Il me semble effectivement difficile de déclencher l'intérêt des chercheurs sur des sujets délaissés.</p> <p>Mais la question posée sur ce point par l'agonie s'explique aisément : les médecins ne s'en occupent pas parce que (sans méconnaître que c'est aussi un sujet qui leur fait peur) cette question se situe à la frontière de ce qu'ils pensent être leur domaine d'activité : ils estiment, même s'ils ont tort, qu'il n'y aurait aucune conséquence pratique à en tirer ; l'agonie ne concerne que les quelques personnes qui s'en occupent réellement. Notez qu'on a fait la même erreur en ce qui concerne la fin de vie, d'où le retard à l'émergence du concept de soins palliatifs.</p> <p>Pour ce dont vous parlez, la situation est totalement différente, et à part procéder comme vous le faites, c'est-à-dire essayer de faire bouger les lignes par une publication, je ne vois pas ce qu'on peut faire. À moins de convaincre un endocrinologue.</p> <p>C'est un sujet que je ne connais pas. Mais ce qui pourrait faire progresser votre propos serait d'expliquer, au moins en partie, le mécanisme de l'effet que vous décrivez. Il me vient en effet une question de béotien : d'ordinaire on tend à expliquer les fringales par une <i>hypo</i>glycémie. Dans ces conditions comment se fait-il que des médicaments dont le but est de faire <i>baisser </i> la glycémie agissent contre ces fringales ? Je crois que si vous pouvez expliquer cela un grand pas sera fait.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> L'agonie 2021-11-13T01:03:49Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article40#comment17176 2021-11-13T01:03:49Z <p>Merci pour ce texte très éclairant et les questions fondamentales qu'il pose. Cela fait un bien fou de savoir qu'il existe des médecins curieux et impliqués comme vous. Certaines lignes sont très difficiles à déplacer... On peut dire que l'agonie de certains concepts est fastidieuse.</p> <p>J'écris actuellement un livre afin de sensibiliser les chercheurs à investiguer sur les troubles de la metabolisation des glucides chez les non-diabétiques atteints de tca d'intensité variable, allant de la simple fringale à l'hyperphagie sévère. Je fais l'hypothese qu'une médication antidiabetique peut leur apporter une reponse decisive tout en reduisant drastiquement la survenance ulterieure d'un diabete de type 2 (qui serait donc previsible bien avant un fatidique test matinal a plus de 122). Cela bousculerait la thérapeutique en place pour les tca importants, ainsi que la place du facteur psychologique dans ces etats de compulsion, ceux-ci étant (selon cette hypothese) associés en premier lieu à la gestion deviante d'une variation glycémique suite à une émotion (ou un état) hyperglycemiant(e) (ex : fatigue, colère, stress...), et non à la seule gestion "intellectuelle" de cette émotion (ou de cet état).</p> <p>Ces recherches sont cruciales pour les patients, mais comment les proposer ? A fortiori lorsque l'on n'est pas soi-meme medecin (mais qu'on a decouvert par hasard le moyen de programmer et deprogrammer sur commande des crises de boulimie compulsives de grande intensité à l'aide d'un simple lecteur de glycémie) ? Les recherches que vous appelez de vos voeux rencontrent la meme problématique : que faire pour lutter contre l'inertie ?</p> <p>Merci pour vos eclairages et toutes mes félicitations pour votre travail, votre bienveillance et cet état d'esprit indépendant en quête d'intérêt général qui transparait dans vos écrits.</p> Définir les soins palliatifs 2021-10-31T13:31:26Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17160 2021-10-31T13:31:26Z <p>Bonjour, David.</p> <p>Pardonnez-moi, mais plus je vais moins je comprends vos messages. Vous utilisez un langage trop déstructuré pour que j'en puisse suivre le fil, et surtout je ne vois absolument pas quelle question vous me posez.</p> <p>Mais peut-être ai-je tort. Il se peut que vous n'ayez pas de question, juste envie de me donner de vos nouvelles. Si c'est le cas, croyez que je suis très sensible à la confiance que vous me faites ainsi. Peut-être devrais-je aussi essayer de comprendre que la manière dont vous vous exprimez est précisément à l'image de votre désarroi intérieur.</p> <p>Avez-vous un soutien psychologique ?</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-10-31T10:47:14Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17159 2021-10-31T10:47:14Z <p>Clud centre anti douleurs et urologie et autres médecins ou trouver je souffre douleurs chronique au dos et vessie neurologie et neurologie et jambes de tromatisme psychologique de ide domicile libérale et centre de soins comfituel niveau sondage urinaire et autres <br class="autobr" /> La vessie retour autosondage et étuis penien <br class="autobr" /> Douleurs chronique parle alliance thérapeutique mettre en place ? <br class="autobr" /> Et ide libérale et domicile centre de soins comflituel peux être obligé faire intervenir hôpital</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-10-08T06:50:15Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17116 2021-10-08T06:50:15Z <p>Bonsoir, Claire.</p> <p>Vous postez ce message à la suite de l'article : « Plaidoyer pour les EHPAD ». J'ai l'impression que vous trouvez que les choses, en somme, ne vont pas si mal que ça. Et c'est bien mon sentiment à moi aussi.</p> <p>Ce qu'il y a de bien avec la prise en charge du grand âge, c'est qu'on n'en fera jamais assez pour, j'allais dire : nos aînés, oubliant un peu vite que mon tour arrive. On peut donc se plaindre à l'infini, on aura toujours raison.</p> <p>Mais ceux qui, comme moi, ont vécu la situation de la fin du XXe siècle (et je ne parle pas de ces « asiles de vieillards » que j'ai connus au cours de mes jobs d'été dans les années 1965-70), ceux-là mesurent le chemin parcouru.</p> <p>Il y a des progrès à faire ? Sans doute. Mais peut-être pas comme on le pense. J'ai bien lu ce qu'on écrit : créer des postes, créer des emplois, c'est créer de la richesse, car c'est créer des salaires, de la consommation, des économies sur le chômage, de nouvelles cotisations sociales, etc. Je sais cela. Mais je sais aussi que c'est d'abord créer de la dépense, c'est créer de la richesse en monnaie de singe, que c'est pas avec ça qu'on va rééquilibrer notre balance commerciale avec la Chine et que l'argent qu'on met là on ne le met pas ailleurs, notamment pas sur les jeunes. Les progrès sont à faire sur la quantité, il y en a aussi à faire sur la qualité.</p> <p>Et il y a des progrès à faire sur la conception même de la prise en charge des vieilles personnes.</p> <p>Je n'oublie pas que la génération de résidents qui arrive n'est plus celle que j'ai connue. Moi j'ai pris en charge de vieux paysans nés dans la première moitié du XXe siècle, ce n'étaient pas les mêmes. Mais je garde en mémoire deux histoires : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Voici vingt ans à peu près je discutais avec une copine qui dirigeait une maison de retraite publique près de chez moi. Je lui faisais remarquer que tout de même elle n'avait pas grand-chose pour mettre un peu de vie dans ses services. Elle m'a répondu : « Parce que tu crois que si elles étaient toutes seule chez elles devant leur télé elles en auraient davantage ? ». <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un peu plus tard, discutant avec le grand Lucien Mias, qui après avoir illuminé le rugby français dans les années 1950, nous a tout appris sur la prise en charge des vieilles personnes, je l'entendais pester contre la manie de convoquer ce qu'il appelait « la cohorte des peutes et des logues », et plaider contre une certaine rusticité de cette prise en charge.<br class="autobr" /> Je ne sais pas où est le vrai dans tout cela. Mais je me demande si nous prenons le bon chemin. Les maisons de retraite dont nous rêvons, ce sont des maisons idéales, faites pour des vieux fantasmés. Il faudrait expliquer cela, mais ce serait terriblement long. Je me bornerai ici à illustrer mon propos en remarquant ce point sur lequel tout le monde est d'accord : il faut que le résident ait sa chambre à lui, personnelle ; oubliant un peu vite que quand on prend la peine de les interroger les vieilles personnes son plus nombreuses qu'on ne pense à préférer une chambre à deux. Où à rappeler les batailles qu'il m'avait fallu mener contre le prestataire repas de ma boîte, qui tenait à me concocter des repas diététiquement parfaites alors que mon problème à moi c'était la dénutrition et que mes vieux ne voulaient pas du maïs et du soja mais du cochon et des patates. Et du pinard. L'animation des maisons de retraite, ça peut être aussi l'affaire de la communauté humaine.</p> <p>Bref, et sans pour autant verser dans le misérabilisme, je crois qu'il faut réfléchir à ce que nous devons apporter d'essentiel. D'autant qu'il y a de la marge, et vous notez que dans cette maison de retraite pas très bien équipée le service est nettement meilleur que dans d'autres. Un poste d'aide soignante, c'est 2,5 agents, un agent (mal payé) c'est € 30 000 avec les charges, cet qui fait qu'un poste c'est € 75 000. Le reste c'est du baratin. Alors je sais : il suffit de sabrer dans les dividendes boursiers. Comme si l'essentiel de ces dividendes n'allait pas, non point dans la poche des milliardaires, mais dans les caisses qui me paient ma retraite.</p> <p>Voilà. J'ai déversé ma bile. J'en reviens à la suite de votre propos, l'adaptation de votre mère ne se passe pas très bien.</p> <p>Difficile de vous répondre : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il faudrait savoir dans quelle mesure elle accepte réellement sa situation. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il n'y a sans doute guère de rapport entre cette décompensation psychiatrique et la qualité de la prise en charge. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Il faudrait connaître son histoire précise. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Mais surtout il faut prendre en compte ce paradoxe : le délire est pour le malade mental un moyen d'adapter la réalité. La réalité du monde, il n'est pas en état de l'assumer ; quand cela se produit il s'en fabrique une autre, dans laquelle il est moins mal. Pour cette raison il ne faut pas toujours se presser de lutter contre le délire, qui est un moyen d'adaptation : on pourrait arriver à une situation pire.<br class="autobr" /> C'est pourquoi je ne me presserais pas de dire ce qui au fil du temps va se passer. C'est tout de même plus confortable pour une patiente de se dire que si elle est en maison de retraite c'est par votre faute que d'admettre que c'est parce qu'elle ne peut plus vivre chez elle…</p> <p>Pour vous, bien sûr, c'est un autre problème. Mais nous pouvons continuer d'en parler.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-10-05T10:30:08Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17110 2021-10-05T10:30:08Z <p>Je viens de vivre une situation similaire, bien qu'il se soit agi de faire passer ma mère d'une prise ne charge 24h/24 à domicile, à un EPHAD. Je lui en ai fait visiter plusieurs, qui nous ont semblé à toutes deux rebutants. Puis un qui présentait très bien (même si le taux d'encadrement n'était pas meilleur, voire pire que dans les précédents). Et là, un peu aidée par les circonstances -retard de réponse de l'établissement-, je le lui ai fait convoiter, en lui expliquant qu'il n'était pas sûr qu'il veuille d'elle. Pour finir elle y est allée presque contente. Ce qui n'a pas empêché quelques jours après son entrée l'aggravation de ses idées délirantes, sur un mode paranoïaque...</p> Définir les soins palliatifs 2021-09-19T20:03:42Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17091 2021-09-19T20:03:42Z <p>Bonsoir, David.</p> <p>Je ne comprends pas toujours ce que vous voulez me dire : je n'ai pas l'habitude des phrases que vous écrivez. Je préfère donc vérifier.</p> <p><i>Apparemment dos et vessie neurologie séparation pas lier</i></p> <p>Voulez-vous dire par là qu'en fait ce ne sont pas vos problèmes de dos qui expliquent vos troubles vésicaux ? Si c'est le cas, alors nous en venons à ce que je vous dis depuis le début : on n'a jamais vu une sciatique donner de tels troubles. Mais du coup on ne sait toujours pas de quoi il s'agit.</p> <p><i>Comme le psychiatre ou psychologique</i></p> <p>Je suppose que vous indiquez là ce que le psychiatre vous a dit : pour lui le problème serait plutôt de nature psychologique. C'est possible, mais il me semble qu'une telle hypothèse demande à être vérifiée avec soin. Ou alors je n'ai pas compris ce que vous vouliez dire.</p> <p><i>Et fibromyalgie</i></p> <p>Voulez-vous dire que la fibromyalgie est l'hypothèse du psychiatre ?</p> <p><i>Et réponse spondylarthrite</i></p> <p>Je n'ai pas le souvenir que vous m'ayez parlé de spondylarthrite. Qui a posé ce diagnostic ?</p> <p><i>Réponse du centre de la douleur j'ai pas de fibromyalgie</i></p> <p>Je ne suis pas surpris : je vous en avais déjà parlé.</p> <p><i>Ou spondylarthrite je suis actuellement stable mental et psychologique et stress aussi</i></p> <p>Je pense depuis longtemps que vous tireriez bénéfice d'une aide psychologique. Le problème est qu'il n'est pas facile de faire la part des choses, et qu'il peut y avoir une difficulté psychologique et un trouble physique.</p> <p><i>C'est plus compliqué que ça j'ai de arthrose bas du dos et</i></p> <p>Je vous ferais la même remarque que précédemment : je serais très surpris que l'arthrose explique quoi que ce soit. Ceci d'autant plus que vous me semblez jeune et qu'on a du mal à imaginer qu'une arthrose chez un sujet jeune donne des troubles urinaires.</p> <p><i>Miction urinaires urgent proximité de WC</i></p> <p>Mais… Vous me parlez là d'urgences mictionnelles, pas de rétention. Et on ne pose pas de sonde urinaire pour cela.</p> <p><i>Pas expliquer et douleur induit au soins pose sonde urinaire</i></p> <p>Là, je ne comprends pas ce que vous voulez dire.</p> <p><i>ide apparaître elle va essayer de expliquer pourquoi elle mes ses traitements pour la douleurs et gère mes douleurs et gère mes médicaments contre la douleurs</i></p> <p>Si je comprends bien, l'infirmière est devenue votre interlocutrice principale.</p> <p><i>Apparemment il y une loi de 2002 sur les douleurs</i></p> <p>Je crois que ce n'est pas le problème. Il y a une loi du 4 mars 2002 qui parle de ces questions, mais en ce qui vous concerne le problème n'est pas un problème de loi mais de technique. Les médecins recherchent la meilleure solution pour vous, et pour cela il faut comprendre la situation.</p> <p><i>Niveau soins domicile niveau had et équipe mobile de soins et SSIAD hôpital</i>.</p> <p>Que voulez-vous dire ?</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-09-19T09:34:16Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17090 2021-09-19T09:34:16Z <p>Apparemment dos et vessie neurologie séparation pas lier comme le psychiatre ou psychologique et fibromyalgie et réponse spondylarthrite réponse du centre de la douleurs j'ai pas de fibromyalgie Ou spondylarthrite je suis actuellement stable mantal et psychologique et stress aussi c'est plus compliqué que ça j'ai de arthrose bas du dos et miction urinaires urgent proximité de WC pas expliquer et douleur induit au soins pose sonde urinaire ide apparaître elle va essayer de expliquer pourquoi elle mes ses traitements pour la douleurs et gère mes douleurs et gère mes médicaments contre la douleurs apparemment il y une loi de 2002 sur les douleurs niveau soins domicile niveau had et équipe mobile de soins et SSIAD hôpital.</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-09-14T15:02:47Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17081 2021-09-14T15:02:47Z <p>Courage !</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-09-13T14:46:02Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17079 2021-09-13T14:46:02Z <p>Bonjour Michel,</p> <p>Merci beaucoup de votre message qui, comme toujours, dit l'essentiel. La difficulté pour moi n'est pas tant de faire entrer ma mère en Ehpad que de la faire passer d'un premier établissement, où elle est déjà, à un second. Mais comme vous le dites, je n'ai pas d'autre choix que la fermeté : si ce n'est pas ce second Ehpad, ce sera le retour au premier…</p> <p>Bien cordialement,</p> <p>Aurélie</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-09-08T20:09:10Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17067 2021-09-08T20:09:10Z <p>Bonjour, Aurélie.</p> <p>Cette situation, hélas, est très classique, et vous vous trouvez dans une impasse réglementaire dont vous savez combien elle m'agace.</p> <p>Relevons les points essentiels.</p> <p>Votre mère présente une altération de ses fonctions cognitives. Dans ces conditions elle n'est plus en état de concevoir un projet de vie réaliste. Le problème est que si cela vous permettrait (nécessiterait, même) une mise sous tutelle, la loi dispose que même dans ce cas c'est la personne protégée qui choisit son lieu de vie. Alors que si elle en était capable elle n'aurait aucun besoin de tutelle. La bonne conscience ne coûte décidément pas cher.</p> <p>Cependant c'est ainsi, et même si je plaide pour une disposition de bon sens qui voudrait qu'on puisse demander à un juge de décider du lieu de résidence d'une vieille personne, vous disposez de trois moyens : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La première est la curatelle : car le <a href="https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000006428039/" class="spip_out" rel='nofollow external'>Code Civil 459-2</a> dit tout de même que <i>La personne protégée choisit le lieu de sa résidence. Elle entretient librement des relations personnelles avec tout tiers, parent ou non. Elle a le droit d'être visitée et, le cas échéant, hébergée par ceux-ci. En cas de difficulté, le juge ou le conseil de famille s'il a été constitué statue.</i> La personne est libre sauf quand elle ne l'est pas. Hypocrisie, mais qui vous permet de demander au Juge (le fera-t-il ?) de trancher. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La seconde, qui va avec la première, est de faire remarquer que si votre mère est libre de ses choix c'est vous qui gérez les comptes, et que vous n'avez plus les moyens de financer le domicile. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> La troisième est de faire comme d'habitude, de s'asseoir sur la loi et de décider vous-même.</p> <p><i>Elle semble à la fois se laisser aller aux soins comme un enfant et les refuser, disant que les soignants la battent, qu'on la persécute et qu'elle veut rentrer chez elle</i>.</p> <p>Il y a deux erreurs à ne pas commettre : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Attacher de l'importance à ce type de propos. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ne pas attacher d'importance à ce type de propos.</p> <p>Ce qui semble évident, c'est que les conditions d'un maintien à domicile ne sont plus réunies. Et je sais bien que tout le monde vante les mérites des alternatives à la maison de retraite, mais, et c'est bien cela que vous touchez du doigt, je ne comprends toujours pas comment on les finance.</p> <p>En outre vous ne voulez plus assumer cette prise en charge <i>et vous avez bien raison</i>. Car si vous avez un devoir d'assistance envers votre mère ce devoir en percute d'autres, qui sont tout aussi incontournables : devoirs envers votre mari, devoirs envers votre enfant, devoirs envers vous-même. Il n'est jamais permis de se sacrifier, votre obligation n'est pas de prendre votre mère en charge, elle est de créer les conditions pour qu'elle le soit.</p> <p>Dans ces conditions, le problème est résolu : votre mère va en maison de retraite ; tout simplement parce qu'il n'y a pas d'autre choix.</p> <p>Mais alors, que va-t-il se passer ?</p> <p>Le fait que votre mère soit démente ne l'empêche pas d'avoir une vision des choses. Non seulement parce que devenir dément n'est pas devenir idiot, mais ici parce que la démence vasculaire permet souvent de conserver un certain sens des réalités.</p> <p>Mais… vous ne voudriez tout de même pas qu'elle renonce à toucher les cordes sensibles, n'est-ce pas ? Vous ne voudriez tout de même pas qu'elle accepte de gaieté de cœur de quitter son appartement ? Pourquoi pas, tant que vous y êtes, vouloir qu'elle renonce au petit plaisir de vous reprocher une décision qu'elle sait inéluctable ?</p> <p>Car les choses se passent ainsi : la vieille personne se bat contre l'évidence. Vient le jour où elle entre en institution, parce que c'est devenu indispensable. Et comme les choses sont bien faites, elle se trouve très bien en institution. Elle s'y trouve d'autant mieux qu'elle peut continuer à clamer que si elle est là ce n'est pas parce qu'elle vieillit mais parce qu'elle a des enfants indignes.</p> <p>Je ne peux pas vous dire précisément comment il vous faut vous y prendre, car il faudrait pour cela que je connaisse votre mère. Mais il me semble que le mieux est de vous comporter normalement. Vous n'avez pas lieu de lui ressasser qu'elle ne rentrera plus chez elle, mais vous avez tout à perdre à lui mentir sur ce point. Quoi qu'il arrive, quel que soit son état, la seule chose que vous devez préserver c'est la confiance dans votre parole. Elle en dira ce qu'elle en dira, et vous pensez bien qu'elle va jouer avec. Mais il est impératif qu'elle sache que vous ne lui mentez jamais.</p> <p>Devez-vous lui dire que vous louez l'appartement ? La question se pose, après tout. Je ne suis pas si certain que ce soit nécessaire ; mais je ne suis pas davantage certain qu'il soit utile de lui cacher. Ce qui me semble indispensable c'est que vous vous fassiez confiance, et que vous commenciez à faire montre de fermeté. Votre décision est la bonne, et votre devoir est de l'appliquer.</p> <p>Et si votre mère ne supporte pas l'institutionnalisation ?</p> <p>N'oublions pas que dans l'immense majorité des cas tout se passe bien ; soit que la personne finisse plus ou moins vite par convenir qu'en effet c'était la bonne solution, soit qu'elle montre tous les signes d'une parfaite adaptation tout en continuant, on a sa fierté, à prétendre qu'il n'en est rien.</p> <p>Mais il se produit parfois que la personne ne s'adapte pas. Je le comprends. Dans mes directives anticipées j'ai pris soin d'écrire que si mon état de santé devait faire que mon maintien à domicile impose une charge déraisonnable à mon entourage il faudrait m'institutionnaliser. Mais comme je prévois que la suite ne va pas m'intéresser beaucoup j'ai ajouté que si cela devait arriver il faudrait me considérer comme en soins palliatifs et s'abstenir de tout ce qui pourrait prolonger ma vie.</p> <p>Je vais donc être très dur : oui, il y a des gens qui ne s'adaptent pas, et chez qui la maison de retraite est une catastrophe. Mais cela ne change rien aux faits : il n'y a pas d'autre solution. Il faut donc considérer ce refus de l'institution pour ce qu'il est : un refus de vivre la suite. Je ne le souhaite pas, et j'ai toujours fait tout ce que je pouvais (sans grand succès) pour persuader les personnes de changer leur regard. Cependant il ne faut pas conclure trop vite à une dépression, ou à un comportement suicidaire : si je dois arriver à un âge où je considérerai que ma vie n'a plus d'intérêt, j'espère bien qu'on saura m'écouter et me laisser libre de mon choix de ne pas m'attarder sur cette planète.</p> <p>Mais je vous le redis : dans l'immense majorité des cas les choses sont infiniment plus simples, et je persiste à croire que la bonne solution pour vous est de ne pas voua en laisser conter. Le pire qui puisse vous arriver est que votre mère vous en veuille. Ou plutôt qu'elle le dise, car on n'est jamais dupe très longtemps. Si c'est le service que vous devez lui rendre…</p> <p>Mais nous pouvons en reparler, bien sûr.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> EHPAD ET "CONSENTEMENT" 2021-09-07T11:39:54Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article135#comment17064 2021-09-07T11:39:54Z <p>Bonjour,</p> <p>Nous avions échangé en 2018 sur le cas de ma mère dont la démence<br class="autobr" /> vasculaire commençait, sur mon désarroi de l'époque et sur la curatelle<br class="autobr" /> que j'avais obtenue au bout d'un an. Vos conseils et votre expérience<br class="autobr" /> m'avaient beaucoup soutenue, et je reviens vers votre site par le biais de<br class="autobr" /> cette rubrique pour vous demander, ainsi qu'aux autres visiteurs, un avis<br class="autobr" /> sur la situation présente.</p> <p>Ma mère est restée chez elle depuis 2018 avec des infirmières le matin.<br class="autobr" /> Elle a fait plusieurs chutes lors de l'hiver 2019, dont une<br class="autobr" /> particulièrement grave en février 2020 (fracture de vertèbres). Après<br class="autobr" /> un mois d'hôpital en plein COVID et une cimentoplastie, j'ai suivi les<br class="autobr" /> conseils d'une assistante sociale de la clinique où elle était et essayé de la<br class="autobr" /> faire entrer en soins de suite, mais elle a été refusée partout. Par contre, elle a bénéficié d'un dispositif de l'ARS pour une<br class="autobr" /> place temporaire d'un mois en Ehpad. Comme rien d'autre ne<br class="autobr" /> se présentait, elle y est restée depuis mars. Ce n'est pas merveilleux,<br class="autobr" /> mais c'est au moins un lieu de sécurité. Depuis, elle ne se remet pas<br class="autobr" /> bien de sa chute, marche très peu, est très dépressive. Elle semble à<br class="autobr" /> la fois se laisser aller aux soins comme un enfant et les refuser, disant<br class="autobr" /> que les soignants la battent, qu'on la persécute et qu'elle veut rentrer<br class="autobr" /> chez elle.</p> <p>Avec l'aide d'une autre assistante sociale de son arrondissement, j'ai<br class="autobr" /> finalement obtenu la promesse d'une place, qui devrait se libérer<br class="autobr" /> bientôt. Nous l'avons visité,<br class="autobr" /> il me semble mieux que l'autre Ehpad, avec un personnel plus à l'écoute.</p> <p>J'ai réfléchi tout l'été : je ne peux ni ne veux ramener ma mère chez<br class="autobr" /> elle, au 2e étage sans ascenseur. La surveillance constante que cela<br class="autobr" /> demanderait est financièrement impossible et elle déteste<br class="autobr" /> particulièrement toute intrusion. J'ai entrevu dans cette solution qu'elle<br class="autobr" /> demande un esclavage pour moi, qui suis fille unique et vais avoir un<br class="autobr" /> enfant dans quelques mois. Je me prépare donc à vider et louer son<br class="autobr" /> appartement pour financer le séjour en Ehpad à venir. Mais je crains<br class="autobr" /> beaucoup, au moment où on nous appellera pour son transfert, un refus de<br class="autobr" /> sa part (la responsable des admissions m'a demandé de "travailler sur le<br class="autobr" /> consentement" et je ne sais pas comment faire). Qu'en pensez-vous ? Nous<br class="autobr" /> risquons une situation bloquée avec son retour au premier Ehpad, plus<br class="autobr" /> éloigné et très cher, si elle ne veut pas entrer plus définitivement dans le second.</p> <p>D'autre part, je ne sais pas si je dois lui dire que je m'apprête à louer<br class="autobr" /> son appartement. Cela risque d'aggraver les choses. Merci beaucoup de votre<br class="autobr" /> avis.</p> <p>Bien cordialement,</p> <p>Aurélie</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-22T12:33:30Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17033 2021-08-22T12:33:30Z <p>Bonjour, David, et merci de ces nouvelles.</p> <p>Malheureusement ce que vous me rapportez ne me permet toujours pas de comprendre une situation qui reste pour moi totalement énigmatique. Je m'explique.</p> <p>Je n'ai <i>jamais</i> vu une lombasciatalgie donner de tels troubles urinaires, surtout chez quelqu'un qui me semble (mais après tout je n'en sais rien) plutôt jeune. En théorie cela pourrait se produire, mais en pratique cela ne se rencontre pas. Mais je dois vous rappeler que nous discutons sur un site qui est consacré aux problèmes du grand âge et à ceux de la fin de vie ; là se limitent mes compétences ; or vous n'êtes ni une vieille personne ni un malade à toute extrémité.</p> <p>Si les choses sont comme vous dites, je ne comprendrais pas que vous n'ayez jamais vu de chirurgien. Que s'est-il passé ? Avez-vous été opéré ? Sinon, pourquoi ? Si oui, quelles ont été les suites, et pourquoi cela ne vous a-t-il pas amélioré ? On a bien dû vous en dire quelque chose.</p> <p>Je comprends encore moins le rapport entre cette pathologie lombaire somme toute assez fréquente (même si les conséquences que vous rapportez sont bien peu banales) et le traumatisme que vous évoquiez récemment.</p> <p>Quant à la fibromyalgie, cela pose au moins autant de problèmes. Dans une lombosciatique on n'a pas besoin de cette hypothèse pour expliquer les douleurs ; quant au trouble vésical, je ne crois pas que la fibromyalgie puisse servir d'intermédiaire entre une rétention chronique et une lombosciatique (mais je vous redis que je n'en suis nullement un spécialiste).</p> <p>Votre situation garde donc pour moi tout son mystère.</p> <p>Quoi qu'il en soit vous me semblez vous orienter vers une prise en charge d'un handicap définitif. Soit : peut-être n'y a-t-il pas d'autre solution. Je vois qu'une équipe de soins palliatifs va intervenir, c'est une très bonne chose pour vous. Il me semble que le mieux est de les laisser faire, et de voir, après leurs préconisations, ce qui pourra être arrangé et ce qui ne le pourra pas. Il sera très intéressant de voir ce qu'ils vont vous dire.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-22T10:43:41Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17032 2021-08-22T10:43:41Z <p>Je vais vous dire grand merci pour votre site et vous j'ai eu enfin diagnostic pose c'est fibromyalgie du au dos et vessie et jambes mes fourmillements dans les pieds et crampes dernière les jambe et dans les mains et bas douleurs lombaires et lombociatagie et discopathie l5 et s1<br class="autobr" /> Et vessie neurologie en retention urinaires avec sondage a demeure et autosondage <br class="autobr" /> Et sa va évoluer a domicile équipe mobile de soins palliatifs vont intervenir voir SSIAD des aides soignantes de hôpital et had les infirmières de hôpital<br class="autobr" /> Aménager mon appartement changer la baignoire et douche et lavabo et WC <br class="autobr" /> Certificat médical pour le sport le badminton <br class="autobr" /> Je peux continuer mon travail la maladie gère mes douleurs boulot super il faut pas arrêté de travailler la maladie sera difficile à gérer</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-12T19:13:55Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17019 2021-08-12T19:13:55Z <p>Ce que vous écrivez me permet de comprendre un peu mieux, peut-être, pourquoi il vous est si difficile d'en parler, mais ne me renseigne guère sur les raisons qui font que votre situation semble au-delà de toute ressource curative. Tout ce que vous m'avez dit c'est que votre rétention d'urine a à voir avec une lombosciatique. Je veux bien, mais je n'ai jamais vu ni entendu parler d'une telle situation. Je suis donc contraint de présumer qu'il y a autre chose, et c'est cet autre chose qui me manque pour reconstituer ce qui se passe réellement. Je serais surpris que la fibromyalgie, qui peut effectivement donner des symptômes urinaires, suffise à tout expliquer.</p> <p>C'est donc toute l'histoire qu'il me faudrait connaître. Encore faudrait-il que vous acceptiez de la raconter, et je ne suis pas sûr qu'il soit judicieux de le faire sur un forum public...</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-12T14:54:17Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17018 2021-08-12T14:54:17Z <p>C'est un abus sexuels a enfances qui a déclenché problème de dos de vessie neurologie en retention urinaires et c'est compliqué psychologie voilà fibromyalgie</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-12T13:31:53Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17017 2021-08-12T13:31:53Z <p>C'est très possible en effet. Mais vous n'avez jamais voulu me dire comment vous en êtes arrivé là. Je ne peux donc pas me faire une idée de votre situation...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-12T12:00:37Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17015 2021-08-12T12:00:37Z <p>C'est pas une question de sondage a demeure le problème pour soins palliatifs j'ai aussi douleurs neuropathies et chronique et invisible traitement compliqué gère maladie la maladie est pas soignable peut se dégrade progressif j'ai une fibromyalgie du a la vessie et dos problème du enfances. C'est c'est handicape et invisible</p> Les troubles du transit en gériatrie 2021-08-12T07:04:27Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article58#comment17011 2021-08-12T07:04:27Z <p>Bonjour, Catherine.</p> <p>Je crois important de vous répondre vite. Pardonnez le caractère un peu désordonné de ce message.</p> <p>Vous écrivez :</p> <p><i>Ma mère est en USLD après un séjour en EHPAD à 10 km de Tulle parce que j'ai demandé qu'elle soit admise dans l'établissement le plus proche de moi</i></p> <p>Ce que je vous demandais c'était pourquoi elle est en USLD et non en EHPAD. La différence entre les deux est qu'on entre en USLD quand on est atteint d'une pathologie nécessitant des soins médicaux constants. Pour vous schématiser les choses, dans le système français : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un sujet qui va mal et qu'on espère sauver, ou qui peut rapidement guérir, a sa place en médecine. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un sujet qui va mal, mais qui n'est pas en danger de mort rapide et qu'on peut améliorer a sa place en soins de suite. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Un sujet qui va mal et qu'on ne peut pas améliorer a sa place en USLD. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Tous les autres relèvent du domicile, que ce soit en ville ou en EHPAD.<br class="autobr" /> Si donc votre mère est en USLD, je suis fondé à penser qu'elle est dans un état de santé extrêmement précaire, qui ne permet pas son retour à domicile ou son entrée en EHPAD ; je le crois d'autant plus que, la stratégie gouvernementale ayant été, depuis fort longtemps, de réduire l'offre de soins en USLD (on va clamant que la France a perdu 100 000 lits d'hospitalisation ; on oublie de préciser que plus de la moitié de ces lits étaient des lits d'USLD et non des lits de court séjour), les conditions d'entrée en USLD ont été considérablement durcies.</p> <p>Or il m'importerait au plus haut point, pour me faire une idée de l'état de votre mère, de connaître les raisons médicales de son entrée en USLD.</p> <p><i>Je dois m'expliquer sur la démence</i>.</p> <p>Ma mère n'est pas démente.</p> <p>Pour ma part j'utilise très souvent ce terme. Je le fais en étant conscient de ce qu'il a de choquant, mais j'y tiens. Vous savez, j'ai passé de longues années en leur compagnie. Ce sont des gens que j'ai appris à respecter, à aimer, à <i>admirer</i>. Ils m'ont énormément appris, et je peux dire que pour une bonne part je leur dois une bonne part de mes conceptions sur la vie, et plus encore sur la dignité. J'ai bien compris que le monde dans lequel nous vivons est fait de mots autant que de choses, et que la façon dont nous nommons une chose fait une part de cette chose elle-même. Mais je peste contre cette tendance que nous avons à changer les mots en nous figurant que ça change les choses. L'IVG c'est tout de même plus sexy que l'avortement, n'est-ce pas ? Mais pour ma part, et même si je suis de (très) longue date un militant du droit (?) à l'avortement, je tiens à appeler les choses par leur nom, manière de rappeler que si l'avortement est une triste nécessité le problème éthique qu'il pose n'est pas si bien résolu que ça. Tout comme je ne supporte pas que le mariage des homosexuels (j'ai toujours été pour) se retrouve requalifié en « mariage pour tous », essayez donc d'épouser votre fils. Bref je veux qu'au lieu de changer la façon dont on appelle les déments nous changions le regard que nous portons sur eux, je ne crois pas que les aveugles voient beaucoup mieux depuis qu'ils sont devenus non-voyants. Le dément n'est pas un fou furieux qui casse tout et agresse tout le monde, oh, lisez <a href="https://www.babelio.com/livres/Bobin-La-presence-pure-et-autres-textes/99998" class="spip_out" rel='nofollow external'><i>La présence pure</i></a>.</p> <p><i>Juste avant qu'elle perde la parole je faisais avec elle des mots fléchés et elle était performante</i>.</p> <p>Et cela ne me surprend pas : la démence n'est pas un processus uniforme ; pendant longtemps certaines aptitudes peuvent se maintenir, incroyablement intactes, et c'est bien là ce qui nous égare, voyez <a href="http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article10" class="spip_out" rel='nofollow external'><i>La démence ou l'art du camouflage</i></a>. Je me souviens de ce patient qui ne savait plus rien faire. Nous lui faisions sa toilette, nous lui changions ses couches, nous le faisions manger. Mais à la belote…</p> <p><i>Elle n'a jamais montré des signes de démence à ma connaissance et le médecin n'a jamais utilisé ce terme</i>.</p> <p>Je n'en doute pas.</p> <p><i>On m'a parlé de perte cognitive</i></p> <p>Nous y voici. Votre médecin a simplement fait preuve d'une délicatesse que je n'ai pas parce que je la désapprouve. Mais j'ai tort : c'est un combat perdu.</p> <p><i>J'ai toutefois oublié de mentionner que depuis 3 ans au moins son bras gauche s'est tout recroquevillé comme paralysé (…) et tout récemment d'un AVC</i>.</p> <p>Je suppose que je dirais la même chose. Mais après tout ce temps il serait illusoire de chercher à reconstituer les faits : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Par exemple on pourrait faire un scanner. Cela permettrait de retrouver les traces d'un accident vasculaire cérébral. Mais non seulement cela ne nous avancerait guère, mais en outre on aurait du mal à faire un lien entre ces traces radiologiques et la paralysie (si c'en est une) que vous observez. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ou encore il existe des démences vasculaires, quand l'accident a touché une zone impliquée dans la cognition. On y pense d'autant plus ici que cette présentation de la démence « par plaques », si j'ose dire, avec des fonctions très atteintes et d'autres intactes, est très évocatrice de démence vasculaire. Mais là non plus cela ne nous donne aucun moyen d'action. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Et si les médecins ont tendance à étiqueter « vasculaire » toute démence survenant dans un contexte d'accident vasculaire cérébral, c'est qu'ils oublient un peu vite que, même chez le vasculaire, la démence la plus fréquente est la démence de type Alzheimer.</p> <p>Mais passons : les choses sont comme elles sont. Ce que j'en dis, ce n'est pas pour vous harceler d'un terme qui vous blesse, c'est simplement pour essayer de me faire une idée de la situation, car cela a d'évidentes implications sur la manière dont votre mère les ressent.</p> <p><i>De jour en jour la situation alterne en somnolence apaisée mais plus souvent en demi-somnolence avec des grimaces et des regards implorants. Elle repousse les aides-soignantes de son bras droit qui montre une force et une énergie surprenante</i>.</p> <p>Toujours sous les pommiers, comment puis-je réfléchir ?</p> <p>Les grimaces, le geste par lequel le malade repousse la main qui se tend vers lui, tout cela est compatible avec une douleur. Nous en reparlerons très vite. Mais cela est compatible aussi avec une autre idée, et j'y reviendrai aussi.</p> <p><i>L'équipe soignante a mis en place une échelle de douleur selon les formats standardisés</i></p> <p>Voici qui me rassure grandement. Car ces échelles d'évaluation de la douleur chez le malade non communiquant sont très peu utilisées, et le fait qu'on les emploie ici montre que nous avons affaire à une équipe avertie, et particulièrement désireuse de bien faire. Gardons seulement en mémoire que l'emploi de ces échelles est ardu, et qu'il demande une grande pratique.</p> <p><i>Il me semble que tant qu'on n'intervient pas par lavement et autre technique intrusive sa douleur physique est atténuée. Aussi grâce sans doute au Matrifen limité à 12 microg en raison d'une incompatibilité avec les problèmes intestinaux</i>.</p> <p>Je vous l'ai dit : je ne sais pas ce que je ferais. Le risque à procéder ainsi est que l'effet antalgique ne soit pas suffisant. Le risque à utiliser « lavement et autre technique intrusive » est d'échouer, ce qui conduirait à ajouter inutilement à la souffrance. Cela ne peut être décidé que sur place, et je comprends la stratégie adoptée, d'autant que la solution alternative demande une grande pratique de ces situations.</p> <p><i>Mais quid de la douleur psychique ?? Ses regards disent trop pour moi son angoisse et son désespoir de se voir dans cet état alors que tout montre qu'elle ne veut plus continuer </i></p> <p>Voilà : ce que vous me décrivez est aussi compatible avec l'idée que votre mère ne veut plus de cette situation.</p> <p>Or je crois fermement que, et <i>jusqu'à la fin</i>, les déments sont parfaitement capables d'envisager, même si c'est sur un mode qui nous échappe, les grandes questions, notamment celles relatives à la vie et à la mort. Et je ne serais nullement surpris si votre mère indiquait par là sa volonté que les choses se terminent.</p> <p>Ajoutons que, même si je persiste à clamer que nous avons parfaitement les moyens de grandement limiter la casse (ce qui fait de l'euthanasie une idée totalement <i>ringarde</i>, je ne crois pas une seconde que le trépas soit un bon moment.</p> <p><i>Faudrait-il augmenter son antidépresseur pour qu'elle vive plus "sereinement" le lent délabrement de son corps ?</i></p> <p>Non : l'antidépresseur serait impuissant dans un tel contexte, et d'ailleurs il faudrait plusieurs semaines avant qu'il produise ses effets. Je ne crois pas que nous les ayons. Par contre la souffrance psychique est une souffrance comme les autres, et si elle semble trop intense la sédation pourrait être légitimement envisagée. Mais elle se paie d'une perte de la relation.</p> <p><i>Autant vous dire ni elle ni moi n'avons jamais évoqué ce scénario comme une mort "digne" et je dirais plutôt une mort humaine en milieu socialisé</i>.</p> <p>Et c'est la seule question qui vaille.</p> <p><i>Le seul médecin du service est un jeune médecin qui est arrivé en mai. Pas de gériatre expérimenté en vue</i>.</p> <p><i>Quant aux soins palliatifs lorsque j'ose poser la question la réponse est plus que floue pour ne pas dire qu'elle n'en relève pas En plus en plein mois d'août la question est osée !!</i></p> <p><i>J'ai plutôt l'impression que mes questions embarrassent surtout quand on me demande comment je vais avec un air concerné comme pour me faire comprendre que c'est moi qui ai besoin d'aide pour affronter la lente agonie de ma mère !!</i></p> <p>Oui, Catherine. Vous avez affaire à une équipe qui souffre, qui donne tout ce qu'elle a, et qui se sent cruellement blessée quand vous lui dites qu'il y aurait mieux à faire. Je vous le disais l'autre jour : on n'est pas là pour soigner les soignants, mais c'est une communauté qui est au chevet de votre mère, et c'est cette communauté qui est efficace. Il faut être très prudent car une équipe déstabilisée perdrait cette efficacité. J'ai de cuisants souvenirs de situations où j'avais raison mais où je n'ai pas pu persuader l'équipe de la justesse de mes vues. Il m'a fallu me soumettre et appliquer des stratégies que je désapprouvais : une équipe qui se trompe est plus efficace qu'un médecin qui voit juste.</p> <p>La mort est un mystère insondable mais tant qu'on n'est pas mort on fait partie du monde des vivants et de mon point de vue on est en droit d'attendre l'aide de ses semblables quels qu'ils soient parents et soignants.</p> <p>Quant à dire que vous avez besoin d'aide, c'est évident. Il se peut même que l'équipe ait raison de dire que vous surestimez la souffrance de votre mère. Mais ce peut être aussi une réaction défensive de sa part. Que puis-je en savoir ?</p> <p>Je comprends bien que la période rend plus difficile l'intervention d'une équipe de soins palliatifs. Mais il ne s'agirait pas ici de lui faire prendre la situation en charge, juste de donner un avis, de porter un regard. Est-ce impossible ?</p> <p><i>J'ai lu et je relirai "la règle du double effet" pour mieux comprendre l'approche bénéfice/risque en la circonstance hors norme de la fin de vie dans une vision éthique</i>.</p> <p><i>Ces notions sont-elles enseignées aux jeunes médecins ou les protocoles formatés règnent-ils en maîtres ?</i></p> <p>Ce n'est guère enseigné. De surcroît c'est une règle très difficile à comprendre, au point que la loi Claeys-Léonetti, que décidément je déteste, commet d'immenses bévues à ce sujet.</p> <p>J'ajouterais qu'à mon sens un protocole formaté n'est pas un <a href="http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article119" class="spip_out" rel='nofollow external'>protocole</a>.</p> <p><i>Réfléchir m'apaise comme si en soit c'était déjà une action</i>.</p> <p><i>C'est</i> une action. Bien sûr il vaut mieux que nos actions soient adéquates. Mais… on n'est pas des bœufs, et ce qu'en toutes circonstances nous devons au malade, c'est d'agir avec une intention droite.</p> <p><i>Mais en vérité il n'en est rien Je vois ma mère démunie devant le pouvoir de l'institution qui s'exerce sans "charité" traitant des numéros et pas des personnes singulières dans leur dernier instant d'humanité avec pour ultime objectif de me faire accepter son inhumanité - le comble !</i></p> <p>Non, je ne crois pas. Je vous le redis : l'équipe donne tout ce qu'elle a. il en va de cette situation comme de ces autres, que j'ai bien connues, où l'entourage demande des choses qui ne sont pas dans l'intérêt du malade. Il faut savoir plier parce que si l'entourage souffre trop le malade le paiera aussi.</p> <p><i>Voilà où nous en sommes. Merci de votre regard expérimenté sur une situation -somme toute assez banale vu le nombre de personnes âgées transfusées et mourantes dans les chambres voisines- jusqu'à ce que mort s'ensuive</i>.</p> <p><i>Dans le cas de ma mère elle me semble lucide et dans un état de souffrance qui n'est pas reconnu. Je sais qu'elle est courageuse mais il y a des limites à ce qui me semble non-assistance à personne vulnérable et en danger</i>.</p> <p>Qu'ajouter, Catherine, à ce que je vous ai dit ? Ceci, peut-être : que le point crucial est que vous êtes là. Ce qui est en train de se vivre, c'est la présence d'une fille près de sa mère qui s'en va. C'est cela qui justifie tout. Et cela n'implique même pas que vous passiez de très longs temps près d'elle (surtout, protégez-vous, vous avez aussi le devoir de vivre votre vie) ; il suffit qu'elle sache que vous viendrez.Pour le reste… je préférerais être à vos côtés.</p> <p>Quant au médecin... Ne manquez pas une occasion de lui manifester votre confiance. Ce n'est pas lui qui est en cause, c'est le désarroi de notre temps face à la mort. Les médecins ne font pas ce métier pour l'accueillir mais pour la combattre. De sorte que là où il leur faudrait la regarder en face leur peur fait qu'ils lui tournent le dos. C'est ainsi. Je ne crois pas avoir été un bon médecin, mais regarder la mort j'ai appris à le faire.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-11T06:40:13Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17006 2021-08-11T06:40:13Z <p>Bonjour, David.</p> <p>Je comprends votre sentiment. Mais je ne le partage pas.</p> <p>Bien sûr, j'en sais trop peu sur votre état pour pouvoir être formel. Mais si j'en juge par ce que vous avez consenti à me dire il me semble aller de soi que la charge en soins qu'il induit ne justifie nullement une hospitalisation à domicile ; pour ce qui est du service de soins à domicile c'est un peu plus compliqué à évaluer mais là non plus je ne crois pas à la pertinence de son intervention. Toujours sous réserves, car il se peut que je me fasse une idée trop optimiste de votre situation, les soins nécessaires, dès lors qu'ils se limitent à la gestion d'une sonde urinaire, sont parfaitement de la compétence d'une infirmière libérale.</p> <p>Dans votre cas, donc, on ne peut pas dire que les lois soient mal faites, car aucune autre structure n'apporterait un service supérieur à celui dont vous disposez.</p> <p>De la même façon, votre situation n'a rien à voir avec un problème de soins palliatifs. Par contre il est probable qu'un médecin de soins palliatifs accepterait de vous donner quelques conseils, de manière certes totalement officieuse, mais en tout cas efficace.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles du transit en gériatrie 2021-08-10T13:37:14Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article58#comment17005 2021-08-10T13:37:14Z <p>Bonjour Docteur,</p> <p>Merci pour votre réponse qui m'aide à "réféchir" sur la situation de ma mère face à sa mort prochaine -mais dans quelles conditions ? - et ma manière de ne pas complètement l'abandonner et de faire mon boulot de fille la seule qu'elle a et sur qui elle compte</p> <p>Tout d'abord deux précisions : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ma mère est en USLD après un séjour en EHPAD à 10 km de Tulle parce que j'ai demandé qu'elle soit admise dans l'établissement le plus proche de moi Et je m'en suis félicitée lorsque en 2018 je me suis cassée un poignet et n'ai pas pu conduire pdt 3 mois <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Ma mère n'est pas démente Juste avant qu'elle perde la parole je faisais avec elle des mots fléchés et elle était performante Elle n'a jamais montré des signes de démence à ma connaissance et le médecin n'a jamais uitilisé ce terme. J'ai toutefois oublié de mentionner que depuis 3 ans au moins son bras gauche s'est tout recroquevillé comme paralysé .On m'a parlé de perte cognitive et tout récemment d'un AVC</p> <p>De jour en jour la situation alterne en somnolence apaisée mais plus souvent en demi-somnolence avec des grimaces et des regards implorants. Elle repousse les aides-soignantes de son bras droit qui montre une force et une énergie surprenante <br class="autobr" /> J'ai essayé de réfléchir sur l'observatoin de sa douleur L'équipe soignante a mis en place une échelle de douleur selon les formats standadisés et fait des efforts pour l'installer le plus confortablement possible entourée de divers coussins Il me semble que tant qu'on n'intervient pas par lavement et autre technique intrusive sa douleur physique est atténuée Aussi grâce sans doute au Matrifen limité à 12microg en raison d'un incompatibilté avec les problèmes intestinaux</p> <p>Mais quid de la douleur psychique ?? Ses regards disent trop pour moi son angoisse et son désespoir de se voir dans cet état alors que tout montre qu'elle ne veut plus continuer <br class="autobr" /> Faudrait-il augmenter son antidépresseur pour qu'elle vive plus "sereinement" le lent délabrement de son corps ?<br class="autobr" /> Autant vous dire ni elle ni moi n'avons jamais évoqué ce scénario comme une mort "digne" et je dirais plutôt une mort humaine en milieu socialisé</p> <p>Le seul médecin du service est un jeune médecin qui est arrivé en mai. Pas de gériatre expérimenté en vue <br class="autobr" /> Quand aux soins palliatifs lorsque j'ose poser la question la réponse est plus que floue pour ne pas dire qu'elle n'en relève pas En plus en plein mois d'août la question est osée !!<br class="autobr" /> J'ai plutôt l'impression que mes questions embarrassent surtout quand on me demande comment je vais avec un air concerné comme pour me faire comprendre que c'est moi qui ai besoin d'aide pour affronter la lente agonie de ma mère !!</p> <p>La mort est un mystère insondable mais tant qu'on n'est pas mort on fait partie du monde des vivants et de mon point de vue on est en droit d'attendre l'aide de ses semblables quels qu'ils soient parents et soignants</p> <p>J'ai lu et je relierai "la règle du double effet" pour mieux comprendre l'approche bénéfice/risque en la circonstance hors norme de la fin de vie dans une vision éthique <br class="autobr" /> Ces notions sont-elles enseignées aux jeunes médecins ou les protocoles formatés reignent-ils en maître ?</p> <p>Réfléchir m'apaise comme si en soit c'était déjà une action Mais en vérité il n'en est rien Je vois ma mère démunie devant le pouvoir de l'instition qui s'exerce sans "charité" traitant des numéros et pas des personnes singulières dans leur dernier instant d'humanité avec pour ultime objectif de me faire accepter son inhumanité - le comble !</p> <p>Voilà où nous en sommes Merci de votre regard expérimenté sur une situation -somme toute assez banale vu le nombre de personnes agées tranfusées et mourantes dans les chambres voisines- jusqu'à ce que mort s'en suive <br class="autobr" /> Dans le cas de mère elle me semble lucide et dans un état de souffrance qui n'est pas reconnu <br class="autobr" /> Je sais qu'elle est courageuse mais il y a des limites à ce qui me semble non-assistance à personne vulnérable et en danger</p> <p>Si je n'abuse pas de votre temps "sous les pommiers" merci de me dire ce que vous en pensez et comment au mieux aborder la question avec le médecin dont les convictions ne me semblent pas dépasser les protocoles <br class="autobr" /> Bien cordialement <br class="autobr" /> Catherine</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-09T12:34:35Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17002 2021-08-09T12:34:35Z <p>Les Lois sur le handicape sur équipe mobile de soins palliatifs ou had et SSIAD des aides soignantes tu il a pas droit à cause de grille évaluation le handicape rentrée pas dedent vous souffrez mais j'ai pas droit la France les loi sont mâle fait peut être etanger mieux au niveau soins</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-09T05:47:54Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment17001 2021-08-09T05:47:54Z <p>En tout cas elle ne refuse pas de vous parler.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-08T18:45:59Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment16997 2021-08-08T18:45:59Z <p>Je c'est pas si sa va passer sans courrier médecin généraliste ou spécialiste il refuse pour le moment et c'est à ma demande</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-08T17:42:36Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment16996 2021-08-08T17:42:36Z <p>Bonsoir, David.</p> <p>C'est une bonne chose que l'intervention de ce médecin. Elle pourra vous aider si vous acceptez de lui dire ce qui vous est arrivé...</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Définir les soins palliatifs 2021-08-07T18:22:44Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article59#comment16995 2021-08-07T18:22:44Z <p>Bonjour monsieur madame vous connaissez grâce à ma vessie neurologie en retention urinaires aiguë et chronique j'ai eu des compliqation et alternance diarrhée j'ai eu compliqué avec infirmière libérale j'ai une douleurs induit au soins pose sonde urinaire je stress quand elle pose j'ai Male j'ai une douleurs neuropathies et chronique au dos avec des fourmillements dans les pieds et crampes dernière les jambe problème lombociatagie et discopathie l5 et s1 j'ai fait demandé au chu dans un service de soins palliatifs le médecin du soins palliatifs ma appelé à ma demande et elle va comprendre mon parcours médical essayer de trouver solutions en fonction de mes besoins et ce que je vais être hospitalisé je c'est pas c'est une consultation en externe je c'est pas se que sa veut dire au niveau soins palliatifs et ce que il aurait had ou SSIAD des aides soignantes et équipe mobile de soins palliatifs j'ai des problème a habillage et toilettes j'ai perdu en autonomie je gère mes médicaments et tous reste</p> Les troubles du transit en gériatrie 2021-08-05T09:05:06Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article58#comment16991 2021-08-05T09:05:06Z <p>Bonjour, Cath.</p> <p>Je comprends votre désarroi. Et les questions que vous vous posez sont légitimes. D'ailleurs on pourrait les résumer aisément avec votre dernière phrase : <i>Ma mère est-elle condamnée à vivre ses derniers mois dans la souffrance ?</i> Et la réponse est non, mille fois non.</p> <p>Car quelle est la situation ?</p> <p>Nous avons affaire à une très vieille personne, grabataire, probablement démente, et dont l'espérance de vie est très restreinte (vous parlez de ses derniers mois, je crains que ce ne soit optimiste). Sa qualité de vie est mauvaise. Dans ces conditions, nous avons l'obligation, non seulement déontologique mais aussi légale, d'assurer son confort ; en d'autres termes si aucun autre moyen ne peut être trouvé, et si l'état de souffrance le justifie, il faut l'endormir. Je vais très vite, mais s'il le fallait la démonstration juridique de cette obligation ne pose aucun problème. Je ne vous la fais pas parce que dans la pratique ce n'est pas avec des raisonnements juridiques qu'on emporte la conviction du médecin. Tout ce que je veux vous dire c'est que d'une manière ou d'une autre la solution existe.</p> <p>Maintenant, essayons de réfléchir.</p> <p>Je dis bien : <i>réfléchir</i> ; car le point essentiel est que je n'ai pas vu votre mère. Je parle donc sans savoir, et je vais me borner à émettre des hypothèses, qui ne valent pas plus qu'elles ne valent. Allons plus loin : on aurait raison de me rétorquer que je ferais mieux de me taire.</p> <p><i>Je suis désemparée devant l'état de ma mère 90 ans qui devient de plus en plus critique et surtout DOULOUREUX</i>.</p> <p>Permettez-moi une réserve de principe : il n'est pas si facile de diagnostiquer la douleur chez le malade en proie à des problèmes de communication. La douleur a si longtemps été négligée qu'on se met à en voir partout, sans songer qu'un dément qui se plaint peut être un dément qui a peur, qu'on dérange, qui se gratte, etc. Vous écrivez qu'elle a mal, soit ; mais si cette douleur est un tant soit peu ancienne, je voudrais savoir ce qui a été fait pour la diagnostiquer : quand on a mal, on a mal quelque part, et pour une raison. Je suis bien placé pour savoir que quand on cherche à préciser les choses on se casse les dents une bonne fois sur deux, mais on est encore moins efficace quand on ne cherche pas. Il faut aussi compter avec ces douleurs, loin d'être rares, dont le mécanisme fait qu'elles résister à la morphine, et pour lesquelles il faut envisager d'autres traitements. Bref, vous me dites qu'elle a mal, ma réponse est : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Comment le sait-on ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Qu'a-t-on fait pour en savoir plus ?</p> <p><i>Hébergée en USLS depuis 2016 elle a peu à peu perdu son autonomie</i></p> <p>Que s'est-il passé ? Pourquoi est-elle allée en institution ? Pourquoi une USLD plutôt qu'une autre structure ? Quelles sont ses autres maladies ? Ses traitements ?</p> <p><i>A ce jour elle a une sonde vésicale depuis plus de 2 ans</i>,</p> <p>Mêmes questions : j'ai toujours détesté les sondes à demeure, d'ailleurs il est rarissime que les femmes en aient besoin, et j'ai toujours déployé beaucoup d'efforts pour trouver des solutions alternatives. Dans mon souvenir je les ai toujours trouvées (du moins chez les femmes). Il faut donc savoir pourquoi les choses sont comme elles sont.</p> <p><i>ne marche plus depuis au moins 4 ans, ne parle plus depuis un an tout en gardant une capacité d'audition ce qui handicape notablement la communication</i></p> <p>Je suppose que cela signe la profondeur du déclin cognitif.</p> <p><i>La situation s'est accélérée depuis 3 semaines : elle refuse de boire et de s'alimenter</i></p> <p>De deux choses l'une : ou on accepte cette situation (c'est peut-être bien ce que je ferais) ou on la refuse. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si on la refuse, il faut se demander pourquoi elle ne mange plus. Il y a là tout un raisonnement gériatrique à mener ; je ne vais pas le détailler : s'il y a un gériatre un peu chevronné dans l'équipe il a fait le travail, et s'il n'y en a pas il reste à prendre les choses comme elles sont. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si on accepte la situation cela signifie qu'on ne va pas se battre pour l'alimenter, parce que c'est une cause perdue ; on entre alors dans une problématique de fin de vie.</p> <p><i>et vient de faire une infection urinaire qui a été traitée Il y a environ 10 jours </i></p> <p>Très banal dans un tel contexte. Cependant c'est une question plus difficile qu'on ne pourrait le croire car, ne l'oublions pas, une sonde à demeure s'infecte <i>toujours</i>, ce qui fait que le diagnostic d'infection urinaire <i>stricto sensu</i> ne va pas de soi. Mais passons.</p> <p><i>Elle a été amenée à l'hôpital pour une radio de l'abdomen qui a montré un fécalome haut</i>.</p> <p>Tout aussi banal, d'autant que les infections urinaires causent des fécalomes et que les fécalomes causent des infections urinaires.</p> <p><i>A ce jour son traitement médicamenteux est le suivant : antidépresseur (elle en prend depuis des années), laxatif et Matrifen</i></p> <p>Deux questions : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Si son traitement se résume à cela, que fait-elle en long séjour ? <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Le Matrifen est un patch de morphine. Celui qui le lui a prescrit a donc pensé qu'elle avait mal. Qui ? Quand ? Pourquoi ? Quel raisonnement ? Quel dosage ?</p> <p><i>Perfusion quotidienne bien évidemment</i></p> <p>Quelques premiers lavements n'ont rien donné et ont été arrêtés</p> <p>Là, vous me mettez dans l'embarras.</p> <p>Car la perfusion n'a justement rien d'une évidence. Elle n'a d'utilité que si on est convaincu d'avoir affaire à une situation provisoire, qu'on a de fortes chances de pouvoir inverser. Sinon elle n'a pas d'intérêt, notamment en termes de confort. Il serait donc très important de savoir comment on a raisonné.</p> <p>Quant aux lavements, il va de soi qu'ils ne risquent pas de venir à bout d'un fécalome haut situé. Il faut d'autres moyens, dont vous ne me parlez pas.</p> <p>Et c'est là que je suis embarrassé : car ce que je vous raconte vient d'une longue pratique, notamment du combat contre la constipation morphinique. La gériatrie, les soins palliatifs, ce n'est pas de la haute technicité, c'est les mains dans le cambouis à faire des choses pas forcément exaltantes mais fondamentales, et très précises. Cette pratique on l'a ou on ne l'a pas. Je suis embarrassé pare que j'en viens à me demander si dans la boucle de décision il y a un praticien de ces disciplines. Je suppose bien qu'il y a un gériatre, mais ce qu'il faut c'est un gériatre un peu déjanté, comme je l'étais (je veux dire que pour moi un gériatre qui n'a jamais fait une toilette, qui n'a jamais fait manger une vieille dame, n'a pas compris la nature de ce qu'il a à faire).</p> <p>Du coup, cela me pousse à remettre sur le tapis la question du Matrifen.</p> <p>Il se peut qu'il ait été donné à la suite d'un raisonnement rigoureux et argumenté.</p> <p>Mais ils sont nombreux, les médecins qui, n'ayant pas la pratique des situations de fin de vie, croient de leur devoir de prescrire, un peu à tout hasard, une sorte de verrou antalgique. Le résultat n'est jamais correct : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Soit le malade n'a pas mal, et ils le prescrivent pour rien. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Soit il a mal, et dans la quasi-totalité des cas le verrou est insuffisant.<br class="autobr" /> Dans les deux situations on la les inconvénients de la morphine et pas les avantages.</p> <p>Comprenez-vous maintenant ma question ? Car si on n'est pas si assuré que ça que votre mère a mal, la première chose à faire est de repartir à zéro en retirant le Matrifen.</p> <p>Avez-vous songé à demander l'intervention d'un médecin de soins palliatifs ?</p> <p><i>Aujourd'hui un autre petit lavement a dégagé quelques selles </i></p> <p>Possible ; il se peut aussi que mine de rien le fécalome progresse vers la sortie. Mais quels moyens s'est-on donné pour lutter contre un fécalome haut ? Ils sont très spécifiques.</p> <p><i>Ne pouvant plus parler ni exprimer une plainte ou gémissement je lis sur son visage grimaçant des signes de douleur manifeste</i>.</p> <p>Il se peut que vous ayez raison. Il se peut aussi que vous ayez tort : l'inconfort du fécalome peut suffire, et ce n'est pas nécessairement de la douleur. Pour autant, ce n'est pas à négliger, et si d'aventure on se trouvait sans autre solution, alors cet inconfort devant absolument être réduit, ce serait une raison de l'endormir.</p> <p><i>Le médecin me dit ne pouvoir rien faire</i>.</p> <p>Je ne pourrais vous en dire quelque chose que si je savais quel a été le raisonnement, et ce qui a été fait.</p> <p><i>Il me semble avoir compris le mécanisme vicieux de la morphine qui est donc exclue dans ce cas</i>.</p> <p>Mais… elle <i>a</i> de la morphine.</p> <p>Soit on espère que l'arrêt de la morphine, ou une prise en charge très agressive du fécalome permettrait de sortir de l'impasse.</p> <p>Soit on ne l'espère pas et il ne reste plus qu'à augmenter la morphine jusqu'à assurer le confort, et tant pis pour le fécalome. Je dis bien : tant pis, car elle risque d'en mourir. Mais c'est ce qu'on nomme<a href="http://www.michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article87" class="spip_out" rel='nofollow external'>la règle du double effet</a>, qui nous autorise à prendre des risques, éventuellement insensés, pour assurer la paix de la personne, du moment qu'on fait tout ce qu'on peut pour limiter les inconvénients. C'est seulement du grand art, cela demande une grande pratique, d'où ma suggestion de mettre un médecin de soins palliatifs dans le circuit.</p> <p><i>Mon souhait et celui que j'ai promis à ma mère est de la défendre contre une mort douloureuse comme nous l'avons fait ensemble pour mon père avec l'écoute du médecin - mais c'était une autre situation -</i></p> <p>Et il le faut.</p> <p><i>Que peut-on faire pour alléger ses souffrances ? Que me conseillez-vous pour mieux communiquer avec le médecin ?</i></p> <p>Si j'ai bien compris la situation, et je vous redis que je suis ici, confortablement installé sous les pommiers d'une fermette dans le Perche, vous devez reconnaître que le médecin fait tout ce qu'il sait faire, et qu'il est aussi démuni que vous ; c'est là que prend tout son sens l'idée de recourir à un expert. Ce qu'il y a (peut-être) à faire ne s'invente pas.</p> <p><i>J'ai trop l'impression que parce qu'elle n'exprime aucune douleur et a perdu l'usage de toutes cordes vocales ses douleurs ne sont pas prises en considération</i>...</p> <p>Cela se produit ; mais j'ai tout de même le sentiment que vous avez affaire à une équipe consciencieuse, qui fait tout ce qu'elle peut. Mais la situation est telle qu'elle requiert l'utilisation de techniques très particulières.</p> <p><i>mon désarroi m'égare probablement</i>...</p> <p>Cela se peut aussi. Mais votre souffrance aussi fait partie du problème, et vous aussi, pour cette raison, avez besoin du soutien spécifique d'une équipe rompue à ce genre de problèmes, qui puisse vous aider à supporter une situation dont, alors, vous surestimeriez la gravité.</p> <p>Je reste à votre écoute.</p> <p>Bien à vous,</p> <p>M.C.</p> Les troubles du transit en gériatrie 2021-08-04T19:48:21Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article58#comment16990 2021-08-04T19:48:21Z <p>Bonsoir Docteur,<br class="autobr" /> Je suis désemparée devant l'état de ma mère 90 ans qui devient de plus en plus critique et surtout DOULOUREUX. Hébergée en USLS depuis 2016 elle a peu à peu perdu son autonomie <br class="autobr" /> A ce jour elle a une sonde vésicale depuis plus de 2 ans , ne marche plus depuis au moins 4 ans , ne parle plus depuis un an tout en gardant une capacité d'audition ce qui handicappe notablement la communication <br class="autobr" /> La situation s'est accélérée depuis 3 semaines : elle refuse de boire et de s'alimenter et vient de faire une infection urinaire qui a été traitée Il ya environ 10 jours elle a été amenée à l'hôpital pour une radio de l'abdomen qui a montré un fécalome haut A ce jour son traitement médicamenteux est le suivant : antidépresseur (elle en prend depuis des années ) laxatif et matrifen Perfusion quotidienne bien évidemment <br class="autobr" /> Quelques premiers lavements n'ont rien donné et ont été arrêtés <br class="autobr" /> Aujord'hui un autre petit lavement a dégagé quelques selles <br class="autobr" /> Ne pouvant plus parler ni exprimer une plainte ou gémissement je lis sur son visage grimaçant des signes de douleur manifeste Le médecin me dit ne pouvoir rien faire Il me semble avoir compris le mécanisme vicieux de la morphine qui est donc exclue dans ce cas. Je vois bien que la situation est critique <br class="autobr" /> Mon souhait et celui que j'ai promis à ma mère est de la défendre contre une mort douloureuse comme nous l'avons fait ensemble pour mon père avec l'écoute du médecin - mais c'était une autre situation - <br class="autobr" /> Que peut-on faire pour alléger ses souffrances ? Que me conseillez-vous pour mieux communiquer avec le médecin ?<br class="autobr" /> J'ai trop l'impression que parce qu'elle n'exprime aucune douleur et a perdu l'usage de toutes cordes vocales ses douleurs ne sont pas prises en considération ... mon désarroi m'égare probablement ... Ma mère est-elle condamnée à vivre ses derniers mois dans la soufrance ? <br class="autobr" /> Merci de votre réponse</p>