Petite chronique du procès Bonnemaison - commentaires Petite chronique du procès Bonnemaison 2014-07-05T10:39:02Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article115#comment10119 2014-07-05T10:39:02Z <p>Bonjour.</p> <p>Je comprends ce que vous voulez dire. Et cette comprehension est d autant plus claire que j ai connu (nous avons tous connu) des situations ou la fin de vie, sans etre particulierement penible, est simplement interminable. A quoi sert alors de refuser d accelerer les choses ?</p> <p>La tentation est la, elle fait partie, j ose le dire, du quotidien des medecins specialistes du mourir.</p> <p>Personnellement j ai toujours considere : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Qu a s aventurer dans cette voie, on serait bien vite en difficulte pour preciser les limites de ce qu on se permet et de ce qu on ne se permet pas. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Qu en disant que cette attente est inutile, on prend un risque demesure : je ne compte plus les familles qui, tout etant termine, m ont confie combien, mais reflexion faite, cette reflexion qui manque si cruellement, ce temps d attente, inconfortable, penible, insupportable, epouvantable, avait ete precieux. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> Que ce que l on considere ici, c est la souffrance de la famille, non celle du malade. J entends que cette souffrance est un probleme majeur auquel il faut donner reponse. Mais qu on ne vienne plus me dire qu on parle du malade.</p> <p>Redisons le : cela n a rien a voir avec le proces Bonnemaison : si c etait le cas l accuse n aurait pas manque de decrire longuement les « souffrances insupportables » auxquelles il fallait absolument mettre fin. Et je souscris tout a fait a ce que vous dites :</p> <p>nous limitons la comprehension par la societe et la justice (a posteriori et par un jugement) des cas d euthanasie a ceux ou le manque de moyens rend impossible le traitement de la souffrance a laquelle on ne peut soustraire le patient autrement qu en lui donnant la mort.</p> <p>J ajoute simplement que ces cas n existent pas. Du moins pas en France en 2014.</p> <p>Bien a vous,</p> <p>M.C.</p> Petite chronique du procès Bonnemaison 2014-07-05T10:38:28Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article115#comment10118 2014-07-05T10:38:28Z <p>En effet, il y a cette question et nous ne pouvons pas l evacuer facilement. Mais le point qui me semble incontournable c est qu on ne peut pas inscrire dans une loi un principe au nom duquel on pourrait oter la vie de quelqu un au motif que cela diminuerait la souffrance d une autre personne. Je n entre meme pas dans un autre debat, pourtant relatif a un fait de constatation courante en soins palliatifs, qui est que, si dure a contempler qu elle soit, l agonie a une fonction preparatoire au deuil.</p> <p>Mais il y a d autres lecons a tirer de vos deux exemples.</p> <p>Dans le premier cas, celui du malade qui s etouffe avec sa salive, il y a des traitements efficaces ; mais surtout une injection de potassium, si elle est faite comme il convient, tue en beaucoup moins d une heure. Nous avons donc la l exemple d un medecin qui, pour etre chef de service, n en était pas moins inexperimente sur ce point ; autant dire que ce qui a parle a sans doute été surtout sa propre souffrance. Sinon un simple appel au medecin de soins palliatifs le plus proche lui donnait la solution.</p> <p>Dans le second cas, il s agit d un malade qui refuse toute poursuite des soins ; si je comprends bien il a accepte la sedation. Donc il n y a aucun probleme de fond. Par contre il y a une hesitation sur la phrase : « j ai pousse une seringue d Hypnovel ». Car on ne pousse pas une seringue d Hypnovel ; on agit au contraire avec precaution, en dosant son injection, et en relayant le plus rapidement possible avec une seringue electrique ou une perfusion. Cela me fait soupconner que le medecin s est place dans un entre deux pas tres clair, ou il a utilise un produit qui en soi n est pas euthanasiant, mais en esperant bien quelque part qu il allait avoir un accident, alors que ce n etait nullement necessaire.</p> <p>Ce sont des humains.</p> <p>Bien a vous,</p> <p>M.C.</p> Petite chronique du procès Bonnemaison 2014-06-24T09:09:42Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article115#comment10115 2014-06-24T09:09:42Z <p>Soit, en France en 2014, il n y a aucun cas de souffrance qui exige qu on tue le patient. Et s il y a une souffrance, c est celle de la famille, mais pas celle du patient agonisant et sedate.</p> <p>Cependant, l argument ne semble pas partage ni par tous les medecins, ni par la justice, qui semblent tolerer que d autres cas de figure que la seule souffrance irreductible justifient l euthanasie.</p> <p>Par exemple, prenons les 2 temoignages de la chronique du monde.</p> <p>Le premier cas est un cas d euthanasie ie produit letal dans le seul but de donner la mort (Il etait sous morphine, il fallait l aspirer toutes les demi heures car il s etouffait avec sa salive. Mais son coeur etait solide. Au cinquieme jour, mon chef de service a mis en place une injection de potassium et son coeur s est arrete au bout de deux heures).</p> <p>Dans le second cas, le patient refuse le respirateur, et l Hypnovel accompagne la fin (A un moment, il est devenu necessaire de le mettre sous respirateur. Il a tres fermement refuse. Sa femme etait la, elle m a dit qu il fallait l ecouter. Il avait trois enfants de l age des miens, il a souhaite les voir. Il a aussi demande que sa premiere epouse vienne et qu on lui explique la situation. Je<br class="autobr" /> l ai fait, je les ai tous reçus. J ai fait le point avec le radiologue. On s est<br class="autobr" /> mis d accord sur le fait qu on allait s en tenir la. Je suis revenue vers sa<br class="autobr" /> femme. J ai explique encore. Je lui ai dit Il va perdre pied, il ne pourra<br class="autobr" /> plus decider. Voulez vous qu on s en tienne a ce qu il a demande ? Elle a<br class="autobr" /> acquiesce. Ça m a pris quatre heures. Sa voix s etrangle. Elle reprend. Au<br class="autobr" /> bout de ces quatre heures, j ai pousse une seringue d Hypnovel et il est mort<br class="autobr" /> dans les bras de sa femme).</p> <p>Selon l argument, il n y a pas de justification de l euthanasie puisqu aucune<br class="autobr" /> souffrance n est actuellement irreductible, le premier cas n est pas acceptable.</p> <p>Pourtant, il semble pratique par des medecins, audible, comprehensible et exemplaire dans le cadre d une audience de justice, et par vous meme (Sur ce point les agissements du docteur Bonnemaison ne sont guere differents de ceux de nombre de medecins qui effectivement pratiquent des euthanasies ni vu ni connu ; et la justice ne va pas y voir. Et elle a bien raison).</p> Petite chronique du procès Bonnemaison 2014-06-23T05:30:52Z http://michel.cavey-lemoine.net/spip.php?article115#comment10112 2014-06-23T05:30:52Z <p>Je ne suis pas precisement les details de cette affaire, dont les aspects sont nombreux et ne concernent pas tous la fin de vie, mais aussi la responsabilite d une equipe, du medecin, de leur formation, de leur competence, etc.</p> <p>En ce qui concerne la fin de vie et par rapport aux questions deja discutees ici, il y a deux points importants souleves par les commentateurs du compte rendu de l audience du19/06/2014, dans le cas d une sedation permettant de mettre en paix le patient sans le tuer :</p> <p>1) La duree de la fin pour le patient refusant toute alimentation. <br class="autobr" /> 2) La duree de l agonie (inconsciente, mais eprouvante pour l entourage).</p> <p>1) Nous avons vu le critere indispensable qu est la decision du patient et l acte d arreter de s alimenter pour s avancer vers la mort qu il choisit. Nous avons vu que la sedation lui permet de ne pas assister a sa propre mort ni de souffrir des defaillances successives de ses organes. Faut il attendre la fin, ou y a t il un point de non retour permettant a la fois de considerer que la volonte du patient a ete exprimee et respectee, et de mettre un terme a une attente inutile ? Il y a aussi une sous question, celle du produit utilise, celui qui permet d abreger l attente : il me semble qu il y a une difference entre une injection de potassium et une dose excessive d hypnovel, non pas dans la volonte de tuer qui est la meme, mais dans l effet eventuellement ressenti.</p> <p>2) Abreger l agonie inconsciente ? Si les manifestations de l agonie ne sont pas reductibles par usage de sedatifs meme a forte dose, on en revient au point precedent.</p> <p>Donc, peut on abreger la vie lorsque la mort est inevitable, qu elle a ete choisie et entamee par le patient, et que la phase de l agonie est la pour une duree indeterminee ? Ce n est pas exactement un cas de souffrance irreductible puisque le patient est sedate. Est on dans un cas d euthanasie ? On sait que le patient est en train de mourir, et de quoi il meurt. Est il legitime de vouloir ecourter l agonie meme inconsciente ?</p> <p>Je vois bien les contradictions et nuances des discussions possibles, cependant la question merite d etre posee, car elle concerne un cas de figure tres particulier dans lequel la solution de la sedation ne suffit pas a convaincre completement : pourquoi attendre durant des semaines ?</p> <p>(...)</p> <p>Je vois que vous avez repondu dans la suite de votre chronique. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On peut reduire la souffrance du patient et le rendre inconscient. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On peut reduire les manifestations de l agonie.</p> <p>Neanmoins, la question de la duree de l agonie reste posee : l agonie est la, irreversible, le patient a exprime sa volonte eventuellement en accelerant lui-meme cette agonie (en refusant traitement/alimentation), et il aurait souffert de se savoir dans cet etat s il avait ete conscient.</p> <p>Ce cas de figure n est pas exactement le cas recurrent dans l affaire du Dr Bonnemaison. <br class="autobr" /> Mais si nous disons qu on ne peut justifier de tuer pour accelerer la mort, a contrario nous limitons la comprehension par la societe et la justice (a posteriori et par un jugement) des cas d euthanasie a ceux où le manque de moyens rend impossible le traitement de la souffrance a laquelle on ne peut soustraire le patient autrement qu en lui donnant la mort.</p> <p>Ce qui limiterait considerablement les cas d euthanasie relates dans de nombreux temoignages, qui semblent tres comprehensibles et souhaitables, et justifierait qu on demande a la justice de les examiner de façon rgoureuse.</p> <p>Donc, 3 options : <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On ne peut justifier de tuer pour accelerer la mort : pas d euthanasie dans ce cas, meme toleree. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On peut justifier de tuer pour accelerer la mort, c est le medecin qui en decide : euthanasie du fait du medecin en concertation avec le patient, illegale mais toleree, avec jugement eventuel lorsqu il y a contestation. <br /><img src='http://michel.cavey-lemoine.net/squelettes-dist/puce.gif' width="8" height="11" class="puce" alt="-" /> On peut justifier de tuer pour accelerer la mort : critere de demande d euthanasie en phase agonique, faite par le patient au prealable, ou bien par l entourage durant la phase agonique.</p>